Milan AC

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pour le coup, le mot fucked up définit à merveille ma journée.

j'avais qu'une envie, prendre mes pieds, me barrer d'ici. ou alors, prendre mes pieds et mettre des high kick à tous les clients hautains qui croisent mon chemin. et croyez-le ou non, il y en a à la pelle.

depuis ma dispute avec sasha, j'ai comme impression qu'ils se sont tous passés le mot pour me casser la tête.

doumam's s'est pris pour un bleu et m'a questionnée sur cette relation jusqu'à fatiguer. un peu plus et on croirait presque que c'est lui, mon gars. un gros lourd m'a demandé trente sept fois mon numéro de téléphone sur le chemin du travail avant que je dégaine mon portable pour lui montrer le numéro de la police. il est parti en moonwolk. une des rares fois ou le 17 est efficace.

on en parle du fait que je me sois faite abordée alors que je ressemble à une vapormax défoncée ou bien ?

— y'a sasha qui te cherche, lance maurice de loin.

j'hausse les épaules et vaque à mes occupations, c'est à dire me plaindre. mais le renoi insiste en ajoutant qu'il demande à me voir dans son bureau qui n'est pas le sien et qu'il partage avec tous les managers mal habillés du magasin. ne les jugeons pas.

je soupire et prends le pas jusqu'à la micro salle, adjacente à la réserve. je fige mon air le plus nonchalant au possible et entre après avoir toqué deux fois. Il se lève en me voyant.

— salut, il amorce.

— salut.

— ça va ? demande-t-il simplement.

j'hausse un sourcil et réprime un rire gras.

— ouais ? tu m'as fait venir pour ça ?

— nan.

on ne se lâche pas du regard. s'il essaye de discerner ne serait-ce qu'une ouverture il peut me zieuter longtemps. en soi j'ai plus aucune rancune par rapport à hier, mais j'ai strictement rien fait dans cette histoire (une première aussi, ma foi).

— désolé pour hier. j'ai grave forcé.

je hoche la tête le regard vague. je veux faire perdurer le drama une minute ou deux.

— comprends-moi aussi, avec ce mec, c'est bizarre. tout le monde jacte...

— qui tout le monde ? je le coupe.

— on m'a dit, c'est tout.

— t'écoutes les on dit, toi ?

silence. il me fous les nerfs.

j'aurais pas pensé qu'il soit de ces genres de personne qui déclarent pas les noms des commères. mais surtout qu'il soit de ceux qui les écoutent. si j'avais écouté les cancans de maurice, moi aussi j'aurais pu péter des câbles.

— bref, j'ai des joggings à vendre.

je m'apprête à partir mais évidemment il me retient.

— c'est bon pardon kamiya, écoutes excuse moi...

je me retourne, faussement ennuyée. j'attends qu'il poursuive son numéro du « pardonne-moi ». j'aime bien son regard de chien battu.

— c'est notre première dispute, il ajoute doucement.

je ne relève pas.

— ça me saoule, parce que...

je croise les bras sur ma poitrine pour lui montrer mon impatience. une vraie relou. en même temps je suis tellement calée en disquette, je m'attends à tout.

— je commence à avoir des sentiments.

sauf à ça.

comment ça « je commence » ? soit t'en as, soit t'en as pas chacal.

je mets ma conscience en sourdine et le regarde droit dans les yeux cette fois. il m'as prise de court ce fou, j'arrive pas à savoir si c'est pour me brancher ou si c'est sincère.

— garde ton speech pour plus tard, on va se poser des questions. je le coupe pour reprendre ses dires.

il capte mon ironie et secoue la tête.

— on se voit toujours demain, alors ? dit-il en parlant du réveillon.

je fais mine de réfléchir, même si dans ma tête c'est évident.

— mouais.

c'est pas comme si j'avais un milliard de plans. et vas y flemme de rester en froid avec lui cent ans.

je quitte son bureau, finis ma journée et prends la route pour rentrer.

j'arrive chez doum's, il n'y a personne à part lui à priori mais j'entends causer dans sa piaule. pas le temps de jouer les macrelles, j'ai une tenue à préparer, là.

je troque mon joggos Milan AC pour une jupe que j'avais acheté pour les occasions particulières qui ne se sont jamais présentées. trop bizarre de me voir comme ça, je suis tellement pas habituée que j'ai l'impression d'en faire trop. pourtant c'est une jupe toute simple, un peu patineuse et noire. plus basique tu meurs.

on frappe à la porte, un miracle dans cette baraque. je reste bloquée devant la glace et rétorque.

— tu veux quoi mam's ?

la porte s'ouvre et laisse entrevoir le petit k. évidemment, sinon c'était pas drôle.

il me toise rapidement et reste planté dans l'entrée comme un con. je demande alors.

— quoi ?

— rien.

— qu'est-ce que tu veux alors ?

— bah rien.

je fronce les sourcils puis décide de l'ignorer. mais son regard pèse sur moi à travers le miroir.

— nan c'était pour savoir... il reprend. y'a pas de galère, hein ?

— de quoi ?

— j'sais pas, avec ton mec askip ça s'est fighté.

— même pas.

j'ignore pourquoi j'essaye de mentir alors qu'il a entendu. et quand bien même il aurait raté ce merveilleux clash complètement nul, n'oublions pas que cette maison est peuplée de poucaves.

— ouais si peut-être un peu, mais tranquille.

— c'est à cause de moi, j'savais je-

— non wesh, je le coupe, c'est pas toi on allait s'embrouiller de toute manière.

la petite voix dans ma tête éclate de rire. en mode c'était prémédité.

je lis d'ailleurs l'incompréhension dans son regard mais il doit être habitué maintenant à mes délires chelous miskine.

— ok, souffle-t-il, simplement.

il est trop beau quand il est confus. il m'a pas habituée à ce spectacle.

mdr, quoi ?

— tu viens prendre ta raclée à fifa ? il demande alors.

je souris. là je le retrouve.

— vas y... dis-je en le rejoignant. attends, vas y je te rejoins.

il acquiesce et s'en va sans poser de questions. je retire ma jupe en vitesse et remets mon jogging.

c'est pas la fête.

ShinkūWhere stories live. Discover now