prise de conscience

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trouver un appartement à paris c'est comme demander à un raclo de la banane (la cité) de mettre des cortez.

du suicide.

autrefois j'aurais sûrement pété un câble et insulté quelques grands-mères mais étrangement l'envie m'est passée. ça fait une semaine que je vois le verre à moitié plein, et c'est pas plus mal non plus comme état d'esprit.

je suis de bonne humeur. 

j'ai pris l'initiative d'appeler ivy pour lui proposer qu'on se pète à midi. histoire de manger un bout et d'oublier ces deux heures d'enfer à courir à droite et à gauche pour des appart plus petits que la chambre que j'occupe chez doum's. elle a été surprise mais elle a accepté.

je lui donne rendez-vous dans le premier mc do que je croise et commande le temps qu'elle arrive.

— vas y, dis-moi ce qui se passe, dit-elle une fois assise.

je l'interroge du regard.

— bah, rien.

— tu m'as jamais appelée depuis que t'es rentrée pour « rien  » kam'.

elle pioche une frite et je réprime un sourire.

— y'a des premières fois à tout.

— genre tu voulais me voir pour le plaisir ? elle demande.

— possible.

on mange en silence puis je reprends.

— j'ai trouvé un nouveau job.

— sérieux ? où ?

— mam's m'a branchée avec un des gars. 

— mais c'est trop bien, faut qu'on fête ça !

je secoue la tête et tape un méga croc dans mon hamburger. cette meuf trouve toujours un prétexte pour se mettre une race. et moi j'sors tellement jamais que j'ai l'impression de ne même plus connaître le goût de l'alcool.

qui a la vie la plus triste ? vous avez quatre heures.

— j'rigole pas kam' viens on sort wesh, comme avant !

— j'sais pas meuf j'suis ko.

— un physique de vingt quatre ans et un cerveau de quatre vingt... souffle-t-elle.

je lui brandis mon majeur.

— tu le vois celui-là ?

— on sort ce soir. je ramène des copines, tu ramènes ton cul. ok ?

elle a de la chance, je suis de bonne humeur. j'accepte sans broncher.

on prend la route jusque chez elle et l'appartement est vite sans dessus, dessous. elle s'occupe plus de ce que je vais mettre que de sa propre tenue.

— nan mais tu blagues ou quoi tu vas grave pas mettre de pantalon par contre ! geint-elle quand elle me voit essayer un de ses jeans.

— j'suis pas rasée, je prétexte pour me tirer d'affaire.

— c'est pas un problème, t'as mon rasoir dans la douche.

je secoue la tête devant le miroir puis lève les yeux au ciel quand je l'entends renchérir.

— tu sais depuis combien de temps j'attends ce moment ? me dit-elle en me lançant un bout de tissu que j'attrape au vol.

— que t'attends quoi ?

— ça ! qu'on se prépare pour sortir et qu'on mette des heures à se décider ! comme avant.

comme avant, ça c'est sûr.

j'ai jamais été ultra féminine en soi, mais il m'est arrivé quelques fois de faire un effort quand je me cherchais vestimentairement parlant. la brunette ne se garde pas de me le rappeler quand elle à l'occasion. mais j'suis comme ça, c'est tout.

je décèle une légère once de tristesse dans le timbre de sa voix. je crois qu'elle est en train de se remémorer des bails sombres que j'ai moi aussi envie d'oublier.

— tu sais quoi, je vais l'essayer tout de suite.

je m'enferme dans la salle de bain et m'appuie contre la porte en soufflant. c'est difficile avec ivy. même si c'est la seule personne que je considère vraiment avec doum's (depuis peu), je sais qu'un monde nous sépare.

le caractère, les manières, l'éducation...

mais en même temps, ce qui a fait qu'on ne s'est pas lâchées pendant toutes ces années, c'est parce qu'on s'est focus sur les choses qui nous rassemblent.

nos goûts musicaux, notre amour du danger et nos conneries sans fin.

est-ce que c'est pas le plus important, finalement ?

au fond je sens que notre relation est fragile, mais je n'éprouve pas l'envie de la laisser tomber. au contraire. malgré tous nos bas, et tout ce qui a pu nous arriver depuis que je suis rentrée, j'ai pas du tout envie que ça s'arrête.

en même temps c'est la seule personne que j'ai.

est-ce que j'ai le droit de lui cacher ce que je pourrais ressentir pour ken ?

en me mettant à sa place je sais que je m'en foutrais parce que je n'ai pas vraiment acquis les codes de l'amitié et l'asociale que je suis n'a pas réellement conscience.

mais il faudrait que j'y pense. même si c'est dur. elle m'en voudra c'est sûr.

— bah alors ? tu sors ? j'entends derrière la porte.

je retire mon t-shirt puis enfile la robe en vitesse et déverrouille la porte. elle sourit.

— t'es magnifique, elle te va trop bien, souffle-t-elle.

je me regarde à peine, loin d'être convaincue de l'habit qui part en évasé. la matière est agréable cependant. et ça date que je n'ai pas vu cet air sur le visage d'ivy me concernant. c'est mieux que des sourcils froncés ou des larmes, j'avoue.

son téléphone sonne, elle me fausse alors compagnie et j'en profite pour aller prendre une douche. parce qu'en effet, je pique.

🥀

qui veut un double update ? 😏

ShinkūWhere stories live. Discover now