Chapitre 9 : Evan

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Les choses sérieuses commencent. Nous sommes en route vers l'université dans laquelle le petit ami de Rachel étudie et réside. Elle est à trois quarts d'heure de route de Lockhart Investigations. Enfin, quand on avance à une vitesse normale. Comme Alyssa est au volant, il faut plutôt compter une bonne heure. Elle a toujours conduit de manière très prudente. Certains diraient probablement trop prudente.

Je suis obligé de m'inclure dans ces "certains". J'ai l'impression d'être assis sur la banquette arrière de la voiture depuis une éternité. Et pour ne rien arranger, Alyssa enchaîne les choix de musique étranges. C'est le quatrième morceau de country d'affilée. Trop de country tue la country.

Charlotte est installée à côté de moi, le nez plongé dans un roman. Et Jamie est sur le siège passager, remuant comme un enfant hyperactif. À ce que je vois, je ne suis pas le seul à trouver le temps long. Soudain, il se met à geindre sans la moindre discrétion.

— Quoi ? demande Alyssa d'un ton déjà irrité.

— On pourrait changer de registre musical ? rétorque Jamie en guise de réponse. Je suis à deux doigts d'utiliser ma ceinture de sécurité pour me pendre.

— Quel est le problème avec ma musique ?

— C'est de la merde, le voilà le problème. Le gars chante comme s'il venait de se cogner les orteils dans une table. Et je suis quasiment sûr que sa chanson parle du fait que sa guitare lui manque quand il n'est pas chez lui.

Je ne vois que l'arrière de sa tête, mais je suis prêt à parier qu'Alyssa est en train de lever les yeux au ciel. Bien entendu, ses yeux restent rivés sur la route, car même toute l'irritation du monde ne la fera pas déroger au code de la route.

— C'est au conducteur de choisir la musique, dit-elle simplement. C'est la règle. Que ça te plaise ou non.

— Non, c'est faux, répond Jamie. Les conducteurs sont censés rester silencieux, t'amener où tu veux, et t'amener une petite boisson si tu as soif.

— Tu confonds avec les chauffeurs, interviens-je. Les personnes dont c'est le métier de conduire des gens riches d'un point A à un point B.

Jamie se retourne vers moi, puis il soupire lourdement, comme si je venais de lui rappeler un souvenir agréable.

— Ça me manque d'avoir mon propre chauffeur, dit-il du même air nostalgique. Maintenant je dois me déplacer par mes propres moyens. Je trouve ça vraiment barbare.

— Bienvenue dans le quotidien de 99% de la population, Jamie, dis-je avec un petit rire. Bientôt, tu vas découvrir une invention révolutionnaire qu'on appelle le métro.

— Tu veux dire, les boîtes de conserve pleines de microbes et de sueur ? Plutôt mourir que d'aller là-dedans.

Arrêtée à un feu rouge, Alyssa s'autorise à jeter un coup d'œil dans notre direction.

— C'est tout ce que ton père a trouvé pour te punir de tes débordements rendus publics ? demande-t-elle, incrédule. Te priver de chauffeur ? Tu t'en sors plutôt bien.

— Ne minimise pas les terribles souffrances que j'endure, Winters.

Jamie détourne rapidement le regard. Je suis assez surpris, car il n'a pas l'air d'être du genre à être vexé par la moindre petite pique. Non, ce n'est pas de la susceptibilité, puisqu'il a réussi à répondre avec son sarcasme ordinaire. C'est autre chose. Comme si Alyssa venait d'aborder un sujet potentiellement sensible.

— Bon, ça suffit ! s'exclame Jamie en trifouillant les touches du poste radio. Je vais mettre quelque chose qui ne fait pas saigner les oreilles.

Les assistantsWhere stories live. Discover now