Chapitre 42 : Jamie

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Il y a énormément de responsabilités lorsqu'on est adulte. Avoir son propre appartement est déjà une expérience à mi-chemin entre la bénédiction et la malédiction. Je n'ai jamais été très doué pour faire à manger, ni faire le ménage, mais maintenant je dois également m'assurer que toutes les factures sont prises en charge. Et la paperasse est le pire casse-tête qui soit. 

Dommage pour moi, mon travail chez IRIS en comprend aussi beaucoup, car je suis l'assistant d'un des cadres du service téléphonie. En d'autres termes, je suis prisonnier d'une boucle sans fin qui est constituée de photocopies, de prises d'appels et d'emplois du temps à gérer. Pour le moment, je n'ai pas encore fait de bêtise irréparable, ni au bureau, ni à la maison, donc on peut dire que je m'en sors bien.

Et non, tous les plats que j'ai ratés ne comptent pas. C'était la faute du four. Et des plaques de cuisson.

Je finis de me préparer après ma douche du matin quand Matthias m'appelle depuis l'autre pièce. Il est resté dormir chez moi cette nuit, ce qui signifie qu'il s'est donné pour mission de préparer un petit déjeuner gargantuesque. Je le taquine toujours en disant qu'il cuisine assez à manger pour trois armées et leurs familles, mais pour être franc, il m'arrive souvent d'utiliser les restes comme repas du midi ou du soir. Pour résumer, sans l'intervention de mon petit ami et des livreurs de nourriture, je serais probablement déjà mort de faim.

J'attrape une chemise en vitesse dans mon placard. Sans le vouloir, mes yeux s'attardent sur le sac de sport qui se cache derrière mes quelques paires de chaussures. Ma part de la récompense de Victor Parks se trouve encore à l'intérieur. Il ne manque pas le moindre dollar. Je n'ai pas pu me résoudre à m'en servir pour m'acheter quoi que ce soit. Tout ce que je dépense provient soit de mon salaire, soit des quelques économies que j'aie pu faire lorsque je ne payais pas de loyer. Je referme la porte du placard, essayant de toutes mes forces de ne pas repenser à ce qui m'a amené à recevoir cette énorme somme d'argent.

Lorsque j'arrive dans la cuisine, Matthias est déjà en train de dresser nos deux assiettes. Je suis obligé d'utiliser ce terme car il fait cela comme s'il était en finale d'un concours de cuisine. Je n'ai absolument pas l'étoffe d'un juré, mais je décrète que son plat mérite un dix sur dix.

— J'ai préparé des gaufres chocolat banane, annonce-t-il fièrement. Il y a aussi un bol de fruits et des œufs brouillés avec des petits dés de bacon.

J'en ai déjà l'eau à la bouche avant même de goûter. Je me place derrière Matthias pour venir l'enlacer et déposer un baiser sur sa joue.

— Tu sais que tu n'as pas besoin d'autant te compliquer la vie, dis-je en posant ma tête sur son épaule. Si tu préfères faire la grasse matinée, tu peux aussi balancer des céréales dans un bol.

— Je vais faire comme si tu ne venais pas de m'inciter à commettre un crime, rétorque Matthias avec un petit sourire en coin. Ça me fait plaisir de passer du temps dans la cuisine. Je trouve ça apaisant.

Tandis que je prends place devant mon assiette, Matthias met quelques ustensiles au lave-vaisselle. J'hésite un instant, me demandant si je devrais attendre pour faire ma proposition. En fin de compte, j'arrive à la conclusion qu'il n'y a rien de tel que le moment présent.

— Hé, je me disais... commencé-je d'un ton incertain. Je sais qu'il y a un peu de route entre mon appart et l'université, mais je pensais que... Peut-être que tu aimerais emménager ici une fois que les cours seront terminés et que tu auras reçu ton diplôme ? En entendant, je pourrais te libérer quelques tiroirs. Enfin, si tu es partant, bien entendu. Si tu penses que ce n'est pas le bon moment, ou que tu ne veux pas, tu peux très bien...

Je n'ai pas l'occasion de terminer mon discours décousu, car Matthias se jette sur moi pour m'embrasser. Je ne vais certainement pas me plaindre, mais j'avoue que je n'étais pas du tout préparé à cette réaction.

Les assistantsWo Geschichten leben. Entdecke jetzt