vingt-sept

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Anja était restée un moment dans la salle de bain, elle n'aurait pas su dire combien de temps. Le cours des événements avait dévié de sa route et contrairement à toutes les autres fois, ce n'était pas elle qui menait la danse. Anja détestait perdre le contrôle, elle détestait être incapable de prédire ne serait-ce que vaguement ce qu'il allait advenir. 

Elle s'était sentie brusquement incapable de se confronter à nouveau au reste du monde. Elle était restée assise sur ce rebord de baignoire, la petite salle de bain manquant décidément d'un endroit plus confortable où s'installer. Elle serrait de temps à temps sa main bandée contre son torse comme si seul le contact de son corps pouvait la maintenir face à la réalité. Ou pour se rassurer peut-être. Elle n'était définitivement pas en état de croiser qui que ce soit. 

Anja se retrouva pourtant face à la silhouette de Thomas qui se détachait à contre-jour dans l'encadrement de la porte. Il avait glissé ses mains dans les poches de son pantalon et adossé contre le chambranle, il la toisait en silence. Cela pendant plusieurs secondes qui parurent une éternité à la journaliste.

- Qu'est-ce que vous faites ici ? lança-t-il finalement d'un ton détaché.

- Qu'est-ce que ça peut bien te foutre ?

Anja était sur la défensive et pour cause, ce début de conversation ne lui disait rien qui vaille et avait mis chacun de ses neurones en alerte. 

- Alors on se tutoie maintenant ? railla Thomas.

- La nuit est bien trop avancée pour les fausses politesses. Qu'est-ce que tu veux ?

- Juste... Discuter. De choses et d'autres.

- Leigh est toujours en bas ?

- Il est quatre heures du matin, elle est partie avec ses amies il y a plus d'une heure, comme la plupart de nos invités. Tu es quasiment seule avec moi. Est-ce que ça t'inquiète ? demanda-t-il dans un léger sourire. Ou alors... est-ce que ça te rassure ?

- J'ignore où tu veux en venir et ça ne m'intéresse pas.

- Au contraire, je sais que tu comprends parfaitement. Ce n'est pas facile de tenir son rôle en permanence, de jouer la comédie pendant plusieurs heures. J'imagine volontiers combien c'est épuisant.

- A quoi est-ce que tu joues, Thomas ?

- Je te retourne la question. Tu mens à Leigh, tu lui mens effrontément en priant qu'elle n'en apprenne jamais rien. Je n'ai jamais vu de décision d'un tel optimisme. Ou d'une telle stupidité, selon le point de vue. Tu connais pourtant la loi de Murphy : le pire est toujours certain.

- C'est seulement ce que tu avances. C'est ta parole contre la mienne jusqu'ici.

- Que tu crois. Contrairement à toi je n'ai pas fait l'erreur de sous-estimer mon adversaire. Tu as péché par orgueil, encore une fois. J'ai cherché à prouver mes allégations parce que je savais parfaitement qu'en trois répliques et deux mouvements de cheveux tu retournerais ma fiancée, comme toujours. J'ai bien pris la mesure de ton pouvoir vois-tu. Alors voilà, j'ai cherché, et tu sais quoi ? J'ai trouvé encore mieux, bien mieux, mille fois mieux. 

- Encore une fois, ça ne m'intéresse pas. 

- Et pourtant tu devrais. J'aimerais te proposer un marché.

- J'espère que tu plaisantes ? ricana Anja. Comme si j'allais accepter un quelconque accord avec toi...

- Laisse-moi d'abord t'expliquer ce que je te propose, avant de refuser. 

Thomas ménageait le suspense avec de longs silences et de grands sourires qui ne faisaient qu'inquiéter un peu plus la journaliste. 

- Si tu acceptes ma proposition, je te promets que Leigh ne saura jamais rien de ce qui te lie à mon père. Et pour information, je ne parle pas de cette petite liaison que tu nies avec véhémence mais dont nous savons tous les deux qu'elle existe. Non, je parle de votre "autre" affaire.

Éblouissante [gxg]Where stories live. Discover now