Le lieutenant Madden Eastley a tué exactement 147 personnes dans sa vie, a couché avec la femme de son meilleur ami, l'a quitté lorsque celui-ci s'est suicidé... en bref : il mérite d'aller en enfer.
Quelque chose qu'il finira très vite par faire, c...
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Allongée dans mes bras, je la regarde dormir. En silence, elle n'avait pas arrêté de trembler toute la nuit, les doigts serrés autour de mes muscles.
Je n'ai pas dormi. J'ai veillé sur elle.
Il manquait une âme à Lucifer, le quatrième jour.
Mais je m'en tape du diable. Je me fous éperdument des répercussions de damnation éternelle qui s'abotteront sur moi. Merde, j'en ai même rien à foutre lorsque mon reflet dans le miroir indique un deuxième marquage sur ma gorge.
Tout ce que j'y vois, c'est le corps de Rhym, enfoncée dans mes bras.
Je ne cesse de jeter des coups d'yeux nerveux sur la porte ornée. Qui sait, peut-être qu'à tout instant, Gabrielle surgira de nulle part et m'enverra droit dans les limbes, peu importe s'il me reste encore dix jours.
Je tente de me redresser, mais Rhym me prend tout mon bras, cramponné comme à un rocher. Il fait encore sombre, mais le pénombre s'estompe petit à petit pour laisser place à la lueur de bougies. Suis-je le seul qui a passé sa nuit ici ? Est-ce que cette immense cathédrale qui n'a aucun sens d'orientation n'a abrité qu'une unique âme ?
Un paradoxe, perdu au milieu de nulle part, entouré de murs de pierre froide et de grisaille.
À quelques choses près, la Maison Grise ressemble au domaine perdu de ma secte.
Un frisson m'assaille au souvenir de Pierre qui nout tirait, nous, les enfants du lit au petit matin afin d'aller prier sur nos genoux écorchés dans les chapelles abandonnées de Dieu. De la façon que nos doigts saignaient au contact de cette infâme règle en fer, si on osait les décroiser.
Pas de doutes. Les archanges ici ne valent pas mieux que ce foutu connard.
Je fronce le nez en songeant à mon idée vengeresse et parvient tout de même à me dégager doucement de l'emprise de Rhym. Je pose ma main sur son épaule et la secoue légèrement.
— Hey.
— Hmmm.
— Rhym, réveille-toi.
Ses yeux se plissent, sans s'ouvrir et ses doigts se contractent sur les draps gris dans lesquels elle est enfouie. Je me redresse et me frotte avidement le visage, comme si je venais de sortir d'un grand sommeil. Une grande fatigue m'assaille et ma peau semble se mettre à picoter, comme parsemée d'un tremblement fiévreux. Rhym le voit et cesse de s'étirer.
— Tu vas bien ?
— Oui.
Non.
Je porte un instant mes doigts à mes oreilles qui bourdonnent et je touche quelque chose de visqueux et de froid. Quand je les porte à nouveau à mon visage, je manque de sursauter. Du sang. Enfin... C'est la même matière, la même sensation... Mais noire.
