Le lieutenant Madden Eastley a tué exactement 147 personnes dans sa vie, a couché avec la femme de son meilleur ami, l'a quitté lorsque celui-ci s'est suicidé... en bref : il mérite d'aller en enfer.
Quelque chose qu'il finira très vite par faire, c...
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Je prends une grande inspiration et croise mes mains dans mon dos. La douce sensation de mes plumes frottant le sol fait accroître le sourire qui est déjà gravé dans mes lèvres.
Ah. Terre.
Les humains.
Leur vie.
Je m'arrête sur le palier de l'église dans laquelle je me suis infiltrée et regarde les flocons valser autour des passants, chutant des cieux que Père a créé pour eux. Je tends ma main dans l'espoir vain d'en attraper une, mais elle traverse ma peau sombre, m'arrachant un soupir, au passage. Un raclement de gorge vient bouleverser mes pensées et je me retourne brusquement vers Azrael.
Ses grandes ailes blanches parsemées de fins fils dorés rejoignent ceux qui s'éparpillent lumineusement de sa magnifique auréole ambrée. Son apparence terrestre est d'autant plus magistrale avec son masque mortuaire, peint minutieusement sur son visage avec un pineau divin. Si cet aspect squelettique est celle qu'il porte lorsqu'il descend, c'est pourtant la vitalité même qui s'émane de lui lorsqu'il m'adresse un sourire.
— La prochaine session de purge commence bientôt, Gabrielle. Tu devrais revenir à la Maison Grise.
— Je sais. Je voulais juste prendre l'air, pendant une seconde.
Mon frère se penche sur moi et regarde dans la direction qu'ont pris mes yeux.
— Madden, hein ?
Mon sourire s'épanouit sur mon visage lorsque le concerné se dessine à l'entrée de l'église. Je viens m'asseoir sur l'un des sièges de prière et le regarde hésiter, les poings serrés sur ses cuisses.
— Oui. Je voulais le voir.
— Quand est-ce qu'il a adressé sa dernière prière, déjà ?
Ironise mon frère en prenant place à mes côtés. Je le pousse légèrement du bout du coude et ronronne en sondant l'humain de toute son entièreté vitale.
— Arrête, Azrael. Tu sais très bien qu'il ne retient de nous que ce que ce fou lui a appris.
— Alors que fait-il ici ?
— Je n'en sais rien.
— Comment savais-tu qu'il allait venir, dans ce cas ?
Le silence répond à la Mort qui bascule sa tête en arrière, un rire sincère secouant sa pomme d'Adam.
— Je ne suis donc pas le seul à avoir lancé de dés.
— Non. En effet.
Nous nous échangeons un regard compris avant qu'il ne poursuive :
— Si on avait échoué, Gabrielle... Père nous aurait déchu. Nous avons pris un énorme risque de renvoyer ces deux-là.
— Même si on ne peut pas tout savoir... J'en attendais pas moins d'eux. On leur a effacé la mémoire, remis sur Terre avec un océan entier d'écart... Et pourtant, ils se sont retrouvés. Sans qu'on ait quoi que ce soit à faire dans l'histoire. On leur a fait face aux mêmes tentations... Mais... Regarde-les aujourd'hui.
