Chapitre 32

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J'ai pris goût à la course.

Même si je suis bien moins endurante que Vildred, je sens qu'à mesure que les jours passent, je deviens un petit peu plus performante.

Vildred est un entraîneur assez dur. Il me laisse peu de moment de répit et me pousse à chaque instant dans mes retranchements, mais ses conseils sont bons et sa motivation précieuse. J'apprécie ces moments malgré que je me retrouve souvent épuisée après. Il réussit à me donner confiance en moi, dissipant peu à peu le syndrome de l'imposteur qui s'était délibérément accroché à moi.

Je me demande pourquoi le chasseur fait tout ça pour moi. Par moment, j'ai l'impression qu'il m'apprécie et qu'il tient un minimum à moi mais je me souviens rapidement que ce n'est pas possible parce qu'il ne ressent aucune émotion. Je ne peux pas me résoudre sur le fait qu'il se sert juste de moi pour ses propres intérêts. Je sais que c'est en partie vrai, mais j'ai l'impression qu'une partie de lui reste attachée à moi. Je vois comment il se comporte avec Nathanaël par exemple. Même s'il ne ressent pas d'émotion, je sais qu'il ne le supporte pas, vu toutes les critiques qu'il lui lance à chaque fois qu'il traine dans ses pattes. Ce n'est pas pareil avec moi, il se comporte d'une autre manière. Peut-être qu'il fait semblant d'être gentil, et c'est si le cas, il est très fort.

— Où est-ce que tu m'emmènes? Je lui lance, à bout de souffle, alors que je peine à suivre le rythme.

Je me rends compte rapidement que le chemin que me fait emprunter le chasseur s'écarte des sentiers habituels. Et, ce n'est pas dans les habitudes du jeune homme de modifier ses entraînements habituellement très ritualisés.

— Te montrer quelque chose, répond-il très brièvement, sans véritablement répondre à ma question, gardant un air mystérieux et déstabilisant.

On s'engouffre peu à peu dans l'obscurité de forêt, alors que le crépuscule pointe déjà le bout de son nez en ce mois d'octobre.

Je me rends compte que cet endroit est complètement désert contrairement à ceux qu'on avait l'habitude de longer. Je commence à me poser des questions.

— Personne ne vient jamais là? Je demande alors le cœur battant, observant attentivement les alentours vides des bois.

— On l'appelle la Forêt des Recluses Brunes, poursuit le chasseur ne répondant toujours pas à mes questions.

C'est quelque chose que j'ai remarqué chez lui et qui est assez étonnant: il ne répond jamais véritablement.

— C'est quoi ça, des Recluses Brunes? Des espèces de fantômes comme la dame blanche qui hante la forêt, attaquant les voyageurs qui osent s'y aventurer? Je réplique sur le ton de la plaisanterie pour détendre l'atmosphère, et oublier la légère angoisse qui grandit en moi à mesure que Vildred m'engouffre dans les bois.

— Pas du tout. C'est une espèce d'araignée typique. On en trouve particulièrement dans cette forêt. Elle sorte généralement la nuit tombée, donc si tu es attentive tu peux en observer.

J'esquisse un air de dégoût, regardant les alentours un peu mal à l'aise.

— Elle sont dangereuses?

— Dans les cas les plus graves, les morsures les plus graves provoquent la nécrose des tissus touchés, nécessitant une chirurgie pour retirer les morceaux de chair touchés.

Rassurant.

— Ah. Et tu comptes m'emmener ici pour les chasser? Je poursuis sur le ton de la plaisanterie.

DoppelgängerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant