Chapitre 147

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Je fixe la pluie dévaler la vitre de la salle de jour du chalet d'Isaac. Je suis d'humeur mélancolique, plongée dans mes pensées tourmentées.

Je n'arrive toujours pas me remettre de ce qu'il s'est passé. Je ne retrouverai jamais mes souvenirs, et c'est extrêmement difficile à accepter. J'avais eu espoir pendant un temps de retrouver la mémoire, de me rappeler de chaque instants passés avec ma famille, avec Isaac. Mais, je n'aurais rien de tout ça. Mes souvenirs étaient partie en fumée avec l'âme de Destiny Silva.

J'éprouve une colère immense envers l'Enclave. C'en est trop. Ils nous ont fait bien trop de mal. Il est temps que ça s'arrête. Tout cela n'a fait qu'intensifier mon désir de vengeance. Je les éliminerais tous un par un, je leur en fait la promesse.

Il est difficile de garder espoir après tout cela. Pour la deuxième fois, nos chances de récupérer les preuves se réduisent à néant. Je commence à croire que c'est une guerre déjà perdue. Je ne vois pas ce qu'on pourrait faire dorénavant pour prouver aux loups-garous mon identité. Je sais que si je prétends sans preuve que je suis Bella, ils en me croiront pas. Mais, il n'y a plus d'autre solution. On a épuisé toutes nos possibilités.

Cette journée s'annonçait tragiquement maussade jusqu'à que Isaac débarque dans le salon, son téléphone à la main, en prononçant mon prénom. Je me retourne alors vers lui, et voit dans ses yeux une lueur que je n'avais pas perçu depuis bien longtemps. Une lueur de soulagement.

— Bella s'est réveillée.

Ce fut la nouvelle qui me redonna un sentiment de vie, alors que je m'étais sentie ces derniers jours complètement inanimée.

Sans plus attendre, on se rue à l'hôpital. L'avantage qu'à Bella, c'est que l'Enclave la croit morte. Elle ne risque donc rien là-bas. D'autant plus qu'on a demandé aux personnels soignants de rester très discrets la concernant. Ou, plutôt Monica leur a demandé. Elle les a hypnotisé pour qu'ils le fassent. C'est toujours utile d'avoir une sorcière dans son clan.

Les médecins nous autorise avec Isaac à lui rendre visite. On entrouvre la porte de sa chambre d'hôpital, et on la voit allongée, le visage amaigri mais souriant quand elle nous voit arriver. Elle semble très fatiguée, si bien qu'elle peine à relever son buste pour se redresser sur son lit. Je lui fais signe de se ménager.

— Wow...Bella...c'est une si bonne nouvelle de te voir réveillée...je souffle, sentant l'émotion m'envahir.

— Va falloir m'expliquer ce qu'il s'est passé, parce que la dernière fois que j'ai ouvert les yeux, Alhorn Griffins venait de me flanquer deux balles dans le ventre et je m'apprêtais à mourrir, grommelle-t-elle avec cynisme.

— Donc, c'est Griffins qui t'a fait ça ? je demande alors, en fronçant les sourcils.

Bella hoche la tête et lâche un petit soupir.

— Il est venu finir ce qu'il a commencé.

— On t'a trouvé avec Linda inconsciente dans ta cabine. Les hommes de Griffins avaient mis le feu partout, on a dû fuir le bateau. Et puis, on t'a conduite à l'hôpital, explique Isaac, répondant à sa demande d'explication.

Bella s'adosse alors nonchalamment, s'emmêlant avec sa perfusion.

— Wow...quelle histoire...je suis soulagée de voir que vous n'avez rien, finit-elle par répliquer.

Bella paraît encore épuisée. Ce n'est pas si étonnant quand on sait qu'elle a frôlé de très près la mort. Je suis si contente de la voir réveillée.

— Comment tu te sens ? je réplique.

Elle hausse les épaules, le regard un peu vide.

— J'ai mal, même avec la dose de morphine qu'ils m'ont injecté. Mais ça va. Je n'ai pas eu de perte de mémoire. Les médecins m'ont dis que je devrais m'en sortir. D'après eux c'est un miracle si je suis encore en vie.

En voulant se démêler avec la perfusion, Bella se tord le buste et pousse un petit gémissement de douleur. Isaac va à son chevet pour l'aider à se dépêtrer pour pas qu'elle ne se fasse plus mal que ça.

— Qu'est-ce que c'est emmerdant tous ses fils, grogne-t-elle alors.

Ça me fait du bien de la voir user de son mauvais caractère. Cela prouve qu'elle va bien.

— Et ton ventre ? Qu'ont dit les médecins de particulier ? je demande alors.

Bella s'affaisse à nouveau.

— Ils m'ont retiré l'utérus. C'était le principal organe qui était touché. Il m'ont dit que je ne pourrais plus avoir d'enfant, mais ils ne savaient pas que j'étais déjà stérile. Une chose supplémentaire que l'Enclave m'ont pris, rétorque-t-elle.

Je hoche la tête rassurée. Au moins, ses organes vitaux sont hors de danger. C'est déjà rassurant.

— Tu vas écoper d'une belle cicatrice, je renchéris alors.

Bella lève les yeux au ciel.

— M'en parle pas ! Adieu les maillots de bain deux pièces ! Génial.

Bella attrape un paquet le gâteau que je lui tends pour l'entamer directement. Elle se goinfre alors avec une vitesse fulgurante. J'ai l'impression qu'elle ne s'est pas nourrit depuis un mois.

Sentant un silence lourd et pesant d'un très reposer entre nous, Bella nous fixe de nouveau avec Isaac.

— Alors qu'est-ce qu'il s'est passé depuis mon absence ? demande-t-elle, attendant impatiemment la réponse.

J'ai du mal à la lui donner. Ces derniers jours ont été un véritable cauchemar, et les mentionner n'est vraiment pas une partie de plaisir.

— Je ne récupérais pas mes souvenirs. Destiny Silva est morte, je finis par déclarer.

Bella entrouvre la bouche et le gâteau entier qu'elle tenait entre ses dents lui tombe dessus.

— Oh merde. J'en suis désolée pour toi. Que s'est-il passé ?

Je fais quelques pas dans la salle et hausse les épaules en poussant un petit soufflement.

— Oh, une longue histoire. On a merdé, une fois de plus. On tenait entre nos mains la possibilité d'avoir enfin cette fameuse preuve, mais nos espoirs se sont réduits à néant avec sa mort.

— Parce que vous vouliez utiliser tes souvenirs comme preuve de ton identité ? demande Bella, en quête de davantage de précisions

Je hoche la tête, en acquiesçant.

— On s'était dit que si je parvenais à énumérer des souvenirs d'enfances spécifiques, cela suffirait à prouver aux loups-garous que je suis la vraie Bella. Mais, c'est tombé à l'eau. On n'a dorénavant plus aucune preuve de mon identité. Et, plus aucune idée de s'en sortir.

— Pas tout à fait, déclare mystérieusement la jeune fille.

Nos yeux se rivent brusquement sur elle.

— Quoi ? lâche Isaac, nerveusement.

— Est-ce que vous avez retrouver mon téléphone ? poursuit-elle.

Mon cœur se met à battre plus vite. Je me demande alors à quoi elle fait référence.

— Il était dans la veste de ton blouson. Les médecins l'ont mis de côté. Pourquoi ? la questionne Isaac.

— Parce que quand j'étais avec Alhorn Griffins, je l'ai fait avouer ses crimes, et je l'ai enregistré avec mon téléphone.

Je me fige, incrédule.

— Attends...tu as fait quoi ? réitère Isaac, autant sous le choc que moi.

J'entrouvre la bouche, mais aucun son n'en sort. Ce qu'elle me dit me semble irréel. Mon cœur se soulève. Je suis dorénavant suspendue à ses lèvres, attendant qu'elle nous livre la suite de son propos.

Elle poursuit alors.

— Je savais que j'allais mourir, mais je voulais tenter une dernière chose. Je me suis dis que l'un de vous, s'il m'avait retrouvée, aurait sûrement été tenté de fouiller dans mon téléphone. Alors, je me suis débrouillée pour le faire parler. Tu voulais une preuve, Linda ? Et bien, tu en as une. Félicitations, tu vas pouvoir dès à présent retrouver ta famille.

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