Chapitre 17

712 62 3
                                    


Alya

Il a tenu sa promesse, et maintenant je m'en veux d'avoir douté. Couchée sur le dos, encore sous la couette, je regarde le lustre se balancer doucement à chaque fois qu'un courant d'air rentre par la fenêtre de la chambre, que Ken a entrouverte en se levant.

Y a des jours où ça en est presque douloureux de réaliser à quel point l'homme avec qui je partage ma vie est incroyable. Je suis passée en quelques jours de ne plus pouvoir me voir dans le miroir, d'y penser toute la journée en continu, à profiter de ma matinée au lit, au calme, sans aucune pensée négative.

J'ai pas hésité très longtemps hier soir, quand il m'a proposé de me laisser dormir ce matin, qu'il s'occuperait des filles et de Thanos jusqu'à ce que j'ai envie de me lever. Y a deux semaines, j'aurais dit non d'entrée, pas parce que je ne lui fais pas confiance pour pouvoir gérer seul, plutôt parce que j'avais besoin de m'occuper constamment pour éviter de penser à mes problèmes. L'idée de rester à rien faire au lit était juste inenvisageable, je me serais perdue dans une tempête de critiques sur moi-même.

Et là, les mains serrées autour de la couette, j'ai la même idée qui tourne en rond dans ma tête depuis plus de 20 minutes, j'ai juste pas le courage de la réaliser. Il faudrait que je me lève, que je marche jusqu'au salon, que je m'approche de lui, assez pour lui dire à l'oreille ce qui m'occupe l'esprit, sans que Thanos n'entende.

C'est trop, c'est beaucoup trop. J'ai pas été aussi proche de lui depuis avant-hier, quand je l'ai embrassé, et rien que l'idée de lui murmurer un truc à l'oreille chauffe mes joues plus que quand je le regarde sortir de la salle de bain. Je suis pas sûre qu'il ait remarqué ça non plus, sinon j'aurais eu le droit à 1000 remarques. Il part du principe que depuis l'accouchement, j'ai envie de rien, juste d'être toute seule, qu'on ne soit pas proche lui et moi, mais s'il savait comment mon cœur s'agite pire que du cardio quand il débarque dans le salon avec les cheveux humides et sa serviette autour de son cou, il hallucinerait.

Donc je suis là, à alterner entre l'idée de prendre mon courage à deux mains, et l'idée de rester ici. Si je me sens pas d'y aller, c'est peut-être parce que je suis juste pas prête, c'est pas la peine de forcer. Mais d'un autre côté, j'ai si envie de l'avoir près de moi, même sans qu'il se passe quoi que ce soit, que je me dis que c'est bien un effort que je peux faire, d'aller jusqu'au salon pour lui dire que j'aimerais un câlin.

- Non, je soupire en fermant les yeux, quand la même image que depuis deux semaines vient s'imprimer sous mes paupières, pas encore.

Le sourire amusé de Lukas, celui qu'il me lançait quand j'osais pas faire un truc.

- C'est pas possible, je m'amuse à nouer et dénouer un bout du drap autour de mon doigt.

Si seulement j'avais qu'un seul problème à régler, ma vie serait plus facile. Mais comme il a toujours eu l'habitude de le faire, mon frère aime mettre le bazar là où ce n'est pas nécessaire, comme quand ma chambre finissait plus en désordre que la sienne, tout ça parce qu'il y passait plus de temps que dans la sienne.

Alors oui, c'est douloureux, toujours aussi douloureux qu'il y a un an, qu'il y a deux ans, qu'il y a trois ans, mais y a aussi quelque chose de différent. Il me manque, je l'ai dit à Ken. Je pourrais le redire à nouveau, puis une autre fois encore, et encore une autre : Lukas me manque. Y a ces jours où j'aurais juste envie qu'il m'emmène marcher avec lui quelque part, ou qu'on aille danser ensemble, ou qu'on parle juste tous les deux, affalés sur le canapé.

J'ai envie, mais peu importe comment je tourne le problème dans ma tête, j'arrive pas à trouver par où commencer. Et c'est pas aujourd'hui que ça commencera, quand une petite montagne de boucles trottine jusqu'au lit, Foxy dans les bras, les yeux encore à moitié fermés.

Milieu d'après-minuit · NekfeuDonde viven las historias. Descúbrelo ahora