Chapitre 37

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Alya

J'ai cru que je pouvais le faire, mais en fait non. En l'état actuel des choses, j'aurais jamais réussi à sortir un mot tellement ma gorge est serrée, et j'ai à peine les capacités physiques pour descendre les escaliers tellement mes respirations ne suivent pas le rythme de mon cœur. Va falloir que je réveille Ken, je peux pas le faire toute seule, c'est trop pour une première fois.

J'ai vraiment cru que ça allait être ok tout à l'heure quand je me suis levée, qu'il dormait encore, que j'ai pris son téléphone sur la table de nuit, et que je suis montée à l'étage. J'ai vu mon frère juste en face de moi le week-end dernier, on a échangé des mots, et j'étais réellement heureuse de le faire. En quoi ça pouvait être compliqué de prendre le téléphone de Ken pour l'appeler ?

C'est trop compliqué, j'ai même pas été jusqu'au stade de déverrouiller l'écran.

Mais peut-être pas seulement parce que je stresse à l'idée de parler en direct à Lukas. Y a autre chose. Avec mon travail, les jumelles, Thanos, et encore un petit peu plus depuis qu'Inès est à la maison avec Sousou et Himaya, je n'ai pas eu le temps que j'aurais voulu pour montrer à Ken que j'ai réalisé mes erreurs. Et là j'allais faire quoi ? J'allais utiliser son téléphone, sans lui, même pas au même étage que lui, pour faire quelque chose pour laquelle il m'a proposé 1000 fois du soutien, de l'aide.

C'est le deuxième truc qui n'aide pas mon cœur à se calmer. En plus d'appeler Lukas, je vais pouvoir partager ça avec Ken, et je sais que ça lui fera plaisir. Et, avec le recul des quelques minutes que j'ai passées à l'étage, je crois que ça lui aurait fait du mal s'il avait appris que j'avais autant avancé, mais sans lui dire.

J'ai l'impression d'être Thanos quand je déboule presque dans la chambre la seconde suivante, un grand sourire aux lèvres malgré mon stress. Parce que j'ai hâte, je vais pas mentir, j'ai hâte d'entendre Lukas de l'autre côté du téléphone, et au fond c'était tellement une sensation que j'ai recherchée ces dernières semaines, je l'ai voulu si fort mais ça venait pas, que maintenant qu'elle est là, que je la ressens pleinement, j'ai pas envie qu'elle ne disparaisse.

Je me calme un peu quand je tombe sur une vision que je n'avais pas eu depuis mercredi, Ken endormi dans notre lit. J'ai dormi avec Nessy jeudi soir, mais ça l'a pas empêchée de refuser de "gâcher", selon elle, une nuit de plus que je pourrais passer avec son frère, et on a finalement pas réussi à la dissuader d'aller s'installer dans la chambre d'amis avec Sousou et Himaya.

La règle d'aujourd'hui, la règle de demain, elle est simple : on ne parle pas d'Hakim, parce que Sousou a des contrôles au collège la semaine prochaine, qu'il est fatigué, que sa maman est fatiguée aussi, et que de toute manière, Monsieur Akrour n'a pas l'air décidé à faire quoi que ce soit. Aborder le sujet me tendrait plus que ça le fait déjà, et Ken au moins 100 fois plus.

Pas d'Hakim ce week-end. Une petite bulle de calme et de sourires pour Inès, c'est la seule chose qu'on peut faire pour l'instant. Je doute pas que mon bébé s'en chargera à peine réveillé, il a pas lâché sa tata depuis qu'elle a débarqué jeudi soir.

En faisant le moins de bruit possible, je me glisse jusqu'au bord du lit, près de Ken, avant de m'assoir sur le parquet. Mon sourire, j'arrive pas à retenir mon sourire. La joue écrasée contre son oreiller, le bras enroulé autour de la couette, il paraît toujours aussi serein. Je sais juste qu'il l'est un peu plus aussi quand il est réveillé, depuis qu'il m'a vu tester des gâteaux avec Tan.

J'oublie un peu mon frère quand je glisse mes doigts dans les cheveux de Ken, juste assez pour démêler les mèches qui émergent de l'oreiller. C'est rare que Thanos se lève tard le week-end, donc en général, j'ai que quelques secondes pour apprécier ce moment, tellement mon bébé est impatient d'avoir son père réveillé. Là, je laisse juste une minute entière s'écouler, ou peut-être deux, assez pour que j'éprouve le besoin de poser mon menton sur le bord du matelas, parce que ça devenait trop inconfortable de juste rester là.

Milieu d'après-minuit · NekfeuTempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang