Chapitre 43

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Alya

Il a pas bougé depuis que je suis revenue dans la chambre y a deux heures, il s'est endormi avec son carnet, et moi j'ai pas osé le réveiller. J'ai juste replacé délicatement son oreiller pour qu'il n'ait pas mal en se levant, mais c'est vraiment la seule chose qui a changé depuis que j'ai posé les pieds dans la pièce tout à l'heure.

En partie parce que je voulais pas que ça change.

Ses cheveux qui se promènent librement autour de son visage, sa joue qui repose sur mon oreiller à moi, la manière dont, même en s'étant endormi, il protège les pages de son carnet avec sa paume, le capuchon de son bouchon qu'il devait avoir entre ses lèvres et qui a glissé jusqu'à la base de son cou, et sa deuxième main posée à plat là où j'étais couchée avant de rejoindre Lukas.

Il est trop beau, je sais pas ce que je fais de mal pour qu'il puisse penser le contraire.

- J'ai même pas osé monter sur le lit Ken, je souris doucement dans un murmure, le menton posé sur le bord du matelas.

J'ai laissé mon frère au salon y a un peu plus de deux heures déjà, et me voilà assise sur le parquet au bord du lit, à me noyer dans ce que je ressens pour Ken. Ma position est probablement inconfortable, mais la sécurité et le calme que notre chambre dégage quand on y est tous les deux, c'est supérieur.

Du bout des doigts, je rallume l'écran de mon téléphone, pour y faire défiler les images que je regardais juste avant de me faire happer par mon observation de Ken à nouveau. Lukas a raison, c'est pas normal, c'est pas logique, sa question était parfaitement justifiée, et elle m'a fait plus mal au coeur que ce que je suis capable d'admettre.

"Pourquoi tu ne portes pas encore son nom ?"

Peut-être parce qu'au final, même si j'essaie de le nier, de temps en temps, ça se sent que j'ai 7 ans de moins que lui. J'agis comme une enfant, alors que lui il ne rêve que de finir nos vies tous les deux. Inconsciemment, j'ai passé mon temps à avancer sur un détail du mariage pour qu'il sache que je n'ai pas changé d'avis, que je rêve toujours de l'épouser, mais en reculant sur un autre détail, histoire qu'on n'avance pas plus vite que ce dont je suis capable.

Ou étais capable. Étais capable.

Je sais pas ce que les deux heures passées avec Lukas ont changé, mais sa question n'a pas arrêté de tourner dans ma tête depuis tout à l'heure, à m'en donner une migraine, mais surtout, surtout, à m'en donner envie de réveiller Ken pour qu'on puisse limite régler les derniers détails avant le petit-déjeuner.

Mon sourire m'échappe, et même s'il n'y a que moi pour sentir la façon dont mes lèvres se sont étirées, et personne pour le voir, ça fait du bien.

- T'es belle, je relève les yeux de mon écran, juste assez pour croiser le regard brun de Ken, posé sur moi. T'es revenue quand ? Il grimace en se redressant, accompagné d'un bâillement.

- Y a deux heures à peu près, je le regarde s'étirer, et attacher ses cheveux avec le chouchou à son poignet.

Et en entendant la durée, il tourne la tête vers moi, les sourcils froncés.

- Deux heures ? Pourquoi tu m'as pas poussé pour reprendre ta place Lya ? Il se redresse complètement cette fois, au moins jusqu'à ce que ses yeux se posent sur l'écran de mon téléphone.

C'est lui qui a fait le document avec la liste, il l'a probablement reconnu à la seconde. Il n'a pas besoin de rester fixé sur mon téléphone plus longtemps pour savoir ce que je faisais. S'il ne remonte pas les yeux vers moi, je sais que c'est parce qu'il n'ose pas.

Milieu d'après-minuit · NekfeuWhere stories live. Discover now