Chapitre 23

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- Alors ? demande la voix de Vywyan dans mon oreille. Des pistes ?

- Une suspecte, réponds-je à voix basse.

Il est encore tôt ; mes pieds me guident seuls dans les couloirs déserts, sur le chemin déjà familier du réfectoire.

- Qui ?

- Thétis Grazziano. On a fait quelques recherches, mais ce serait bien si Tyler pouvait approfondir.

- Je lui dirai. Quoi d'autre ?

- Pas grand-chose. Ross et moi avons essayé de glaner des infos auprès des autres employés, mais on n'a récolté que des ragots sans intérêt.

- Et toi ? Tu vas bien ?

- Parfaitement bien.

Et je n'exagère pas. Cela fait longtemps que je n'ai pas été aussi en forme. Depuis notre arrivée il y a une semaine, je n'ai pas fait un seul cauchemar. Mes nuits ne sont peuplées que par une obscurité paisible et réparatrice. Je ne savais même pas que c'était possible.

J'ai beau essayer de me persuader qu'il n'y a pas de lien avec Ross, c'est difficile à nier. Chaque soir, on s'allonge aussi éloignés que possible ; chaque matin, on se réveille dans les bras l'un de l'autre. Comme des aimants.

- Et Ross ? s'enquiert justement Vywyan. Vous ne vous êtes pas encore étripés, tous les deux ?

- Non. Ça va.

- Comment ça, ça va ? Aux dernières nouvelles, vous ne pouviez pas passer deux minutes ensemble sans vous agresser verbalement.

- Ça s'est...amélioré.

- Amélioré ? Cass Jackson, qu'est-ce que tu me caches ?

Avant que je n'ai eu le temps de répondre, une porte s'ouvre à l'autre bout du couloir. Je me fige quand Thétis en sort. Elle me tourne le dos, et se met à avancer d'un pas rapide, ses talons aiguille claquant sur le marbre.

- Faut que je te laisse, soufflé-je à Vywyan.

J'arrache le globophone de mon oreille. Je glisse la petite sphère dans ma poche et me lance à la suite de la docteure, remerciant en silence les mocassins de Carole et leur semelle souple.

Thétis finit par s'arrêter en face d'une porte anonyme, qui ne se distingue que par le digicode intégré à sa poignée. Je suis tout juste assez près pour lire les quatre chiffres qu'elle y tape-5691-avant de se glisser à l'intérieur. J'attends trente secondes et l'imite. Je me retrouve dans un autre couloir, au bout duquel la porte d'un ascenseur est en train de se refermer. Si je n'entre pas, je n'aurai aucun moyen de savoir à quel étage Thétis se rend.

Un plan se forme dans mon esprit. Mauvais, mais je n'ai pas le temps d'en trouver un meilleur. Je clos doucement la porte derrière moi, veillant à ce que le verrou ne s'enclenche pas, puis me jette en avant et bloque la fermeture de l'ascenseur avec mon pied. Un instant plus tard, je suis dans la cabine aux côtés de mon ennemie. Immédiatement, je repère le bouton qu'elle a pressé : niveau -13. 

Puis je prends conscience de mon environnement, des parois métalliques qui m'entourent de tous les côtés. Un étau se referme sur ma poitrine. Je n'arrive plus à respirer.

- Carole ? m'interpelle la docteure, les yeux écarquillés.

Une vague de haine m'envahit, repousse ma panique naissante. Par miracle, je réussis à reprendre mes esprits. Je me concentre sur mon ennemie, sur le rôle que je dois jouer.

- Thétis ! m'exclamé-je avec un grand sourire. Quelle joie de vous revoir !

Le plaisir n'a pas l'air partagé.

Cass (sf/romance)Where stories live. Discover now