Lalaloopsies

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Ce matin, j'ai dit bonjour à mes nouveaux voisins. Ils m'ont répondu seulement après avoir remis leurs têtes sur leurs épaules.


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Durant cet été, il m'a été donné de rencontrer une gamine qui était accroc à des poupées bizarres, des fillettes en plastique avec une tête de chibi et des yeux faits de boutons. Ce dernier point m'avait fait faire une grimace, ce qui m'avait valu quelques reproches de sa part.

En rentrant chez moi, je me suis demandé quelle était la société qui avait eu l'idée de faire jaillir ces horreurs. Ayant appris entre temps que ces espèces de jouets s'appelaient très élégamment «Lalaloopsy» (je doute que l'on puisse trouver plus niais), j'ai tapé ce nom dans la barre de recherche.


Le wiki expliquait que c'était MGA Entertainment qui était responsable de ce carnage. Le nom original, ayant rapidement changé: Bitty Buttons. Autrement dit, les boutons devaient être mis en valeur, mais on a hésité et changé à peine trop tard. Le CEO (aucune idée de ce que c'est) de la marque expliquait: ''Bitty Buttons a été créé pour apprendre aux enfants que chacun est unique, à sa propre façon. La nouvelle marque affiche l'idée que les vieilles choses peuvent devenir nouvelles à nouveau, tout peut être réutilisé et rien ne doit jamais se perdre''.

D'après la compagnie, les poupées étaient "confectionnées pour encourager l'imagination des enfants et leur créativité" et "pour enseigner des leçons de vie importantes, comme la diversité, l'individualité, et l'idée que tout sert à une seconde vie."


Bref, le discours banal du marketing pour justifier qu'on veut simplement se faire du pognon.
Tout de même intrigué par la dernière phrase, j'ai cherché le nom de l'orateur (Isaac Larian) sur Internet.N'ayant rien d'autre à faire, j'ai farfouillé un peu dans chaque ''O'' de Google pour tomber sur des images d'Isaac Newton, la biographie de Rousseau, ou un tableau de Bosch. Pour voir jusqu'où on pouvait aller, j'ai regardé la 20ème page, la 30ème. À la 45ème page, un seul résultat s'affichait, en anglais : « My First Website. Isaac Larian ». J'ai ouvert le lien dans un nouvel onglet. Juste après, le résultat a disparu, et d'autres sont apparus.

Je suis allé voir en bas de la page. Un avertissement s'affichait, près du 44ème "O" de Google sélectionné: « Afin d'afficher les résultats les plus pertinents, nous avons omis quelques entrées qui sont très similaires aux 443 entrées actuelles. Si vous le souhaitez, vous pouvez .» Trop tard. Juste à côté, la page était déjà chargée.


Un fond violet, un titre en bleu: My First Website, souligné d'un sous-titre rouge : Issac Larian. Le premier site d'un business man? Pourtant il devait avoir autour de 59 ans, soit bien 46 ans au moment où il avait créé ce site, comme l'attestait le «June 2000» en italique, en haut à droite.

Apparemment, le site faisait office de cours de business, je traduis:


«Je m'appelle Isaac Larian. À mes heures perdues, je fais de l'informatique sur Internet. Ce domaine étant un peu émergeant, je tiens à féliciter celui qui aura trouvé cette page, et pour l'en récompenser, il pourra lire tout ce que j'y écris. Tout.»


S'ensuivaient des lignes sur la fondation d'une entreprise, la maîtrise durant un déficit, et l'image de marque s'apparentant à une ''spécialité''. Bref, rien de vraiment intéressant. En descendant la page, on pouvait voir qu'il racontait ses journées en mettant des exemples: «J'ai licencié un homme, dites-vous que ce n'est pas un crime. Les procédures ont suivi et il n'a pas réagi: c'est donc un acte juste, qui sauve l'entreprise et des milliers d'employés. » En fin de compte, c'était pratiquement nul.

𝕻𝖆𝖓𝖉𝖊𝖒𝖔𝖓𝖎𝖚𝖒Where stories live. Discover now