L'entrepôt

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Je suis dans la voiture de Julian. Il sent un mélange de tabac froid et d'alcool. On dirait qu'il a commencé la fête tout seul.

- Où va-t-on Julian?

- T'inquiète, on va passer une bonne soirée, beauté.

Il accélère, et roule sans me regarder. Et alors que je pensais que nous allions vers le centre ville, il prend une direction opposée.

Je déteste son attitude, je ne me sens pas du tout à l'aise tout à coup. J'ai l'impression que ce n'est pas le Julian que je connais.

- Ce n'est pas ce que je t'ai demandé, où va-t-on?

Il est agressif et son corps tout entier transpire la colère et la frustration. Ses mains sont crispées sur le volant et il roule bien au-delà de la vitesse autorisée.

- On va rejoindre des potes à moi, à l'entrepôt. Ça te pose un problème Elsy? Tu préférais être avec l'autre?

- Pardon Julian?

- Tu as parfaitement compris. Mais elle m'a tout dit, on m'a prévenu, et je vois clair dans ton petit jeu. Alors tu n'as pas intérêt à la ramener.

- Laisse moi descendre de la voiture Julian.

Mais Julian ne me répond pas. Je commence a vraiment avoir peur de lui et de son attitude. Je ne sais pas où je vais et il n'est plus du tout le même. Il prend une fiole argentée et boit des gorgées d'un alcool fort, du whisky certainement.

Je m'empresse d'attraper mon téléphone portable de la manière la plus discrète qui soit. Je n'ai plus qu'un seul objectif: envoyer un message à Julie, tandis qu'on s'éloigne de la ville, je commence à perdre mon signal de batterie. J'ai peur. Pour la première fois depuis très longtemps, j'ai vraiment peur.

"Aide moi, j'ai peur. Il m'emmène à l'entrepôt. Je t'en supplie."

Pas de réponse. Comme je le craignais je perds la seule barre de réseau qui me reliait encore à la civilisation. Et nous nous enfonçons un peu plus encore vers l'inconnu. J'imagine le pire.

Julian a bu et je pense qu'il a probablement consommé de la drogue eu égard à l'odeur forte qui émane de l'habitacle de sa voiture. Il n'est vraiment plus lui-même. Je m'en veux tellement de ne pas l'avoir vu tout de suite. Avant de monter dans son fichu 4x4.

- Ce soir, je vais te rendre heureuse, beauté.

Je ne dis plus rien, il me caresse la cuisse et remonte ma jupe pour parvenir à ses fins. Je frissonne et une larme se dessine lentement sur mon visage crispé et inexpressif, tandis qu'avec mes mains, je bloque l'ascension de sa main moite.

Nous roulons quelques minutes dans le silence le plus total. Je me demande ce que j'ai fait de mal, et pourquoi moi. Il pourrait avoir toutes les filles qu'il voudrait. Pourquoi me fait-il ça?

Nous arrivons enfin devant une grande bâtisse désaffectée, il fait nuit. Il y a quelques personnes dehors et des gros bidons en métal noirci où brûlent des feux improvisés pour éclairer l'entrée.
Les locaux sont tagués et insalubres. Il fait froid.

Il y a de la musique, beaucoup trop forte, et il y a de l'alcool, beaucoup d'alcool. Des détritus jonchent le sol, principalement des bouteilles et des canettes. Il me tire par le bras et je suis comme spectatrice de moi-même. Je ne me débats pas. Il est de toute façon beaucoup trop fort pour moi. A quoi bon?

A l'intérieur, il y a une fille a moitié nue qui semble droguée, elle est assise sur un mec. Plus loin deux mecs en sang se battent sur un ring improvisé. Un peu partout, c'est un spectacle de désolation.

Cet endroit est effrayant. Personne ne prête attention à moi. Ils sont tous dans un état second.
J'ai soudain l'impression d'être dans un film d'horreur. Mon film d'horreur. Personne ne viendra me chercher ici. Je me sens tellement seule et je m'en veux tellement.

Julian m'attire dans un coin reculé, il resserre ses doigts autour de mon bras pour me diriger.

- Je vais te donner une bonne leçon, beauté. Personne ne se fout de ma gueule. Et certainement pas toi. Le plus drôle dans tout ça c'est que j'ai découvert cet endroit grâce à ton ami, Ethan. Marrant, n'est ce pas?

Je me risque à lui parler, j'aimerai tant le raisonner.
- Julian, tu n'es pas...

Il s'en va, ne me laissant pas l'occasion de terminer ma phrase. Quelqu'un l'a appelé, il vient de claquer la porte. J'entends qu'il s'éloigne. Je suis enfermée dans une sorte de vieux bureau, il n'y a qu'une issue: la porte en métal qu'il vient de fermer à clef.

Je me laisse tomber sur le sol, impuissante et fragile.
Je m'effondre, je me couche par terre et me recroqueville sur moi-même sur le sol en béton glacé.

J'ai froid.

Évite Moi, si tu peux... (Terminée) Where stories live. Discover now