Évite Moi, si tu peux... (Terminée)

Ethan "Départ"

- Elsy. Je... bafouillai-je. Si je m'attendais à ça...

Elle resta silencieuse, seuls ses grands yeux prirent un air étonné et me fixèrent pus intensément que jamais. Elle se contenta d'un signe de tête comme si elle voulait me faire comprendre qu'elle m'avait entendu mais qu'elle ne savait ou ne voulait pas répondre.

Je ne pensais pas la revoir avant mon départ, devoir me confronter à elle, lui expliquer...

- Ecoute Elsy, je ...

Marc me coupa net dans mon élan en entrant brusquement dans la pièce.

- Salut Mec! s'exclama-t-il. Pardon, tu n'es pas seul? Mais tu ne m'as pas présenté cette charmante demoiselle...

- Marc, voici Elsy, une amie. expliquai-je.

- Je vais vous laisser, je pense que vous avez du travail. expliqua-t-elle.

- Attends Elsy, allons boire un café en bas. Tu as cinq minutes? demandai-je.

- Oui, bien sûr.

Nous descendîmes alors calmement jusqu'au café du bas de la rue. Sans un mot, sans un regard. Le silence pesant occupait tout l'espace.

J'étais décidé à ne pas lâcher, à ne pas céder et m'écouter. Nous nous assîmes à une table extérieure et elle se décida à briser la glace avant moi.

- Alors, tu pars? J'ignorais que tu devais partir... me lança-t-elle timidement.

La voir ainsi, désarmée, son regard intense et inquiet, son odeur, sa simple présence, tout m'attirait en elle. Je venais de passer un mois entier à me résoudre à l'oublier et à partir sans me retourner, et il aura suffit de quelques instants pour qu'elle réduise à néant tous mes efforts. Mais je devais m'en tenir à mon objectif, mon départ changerait tout. Je ne pouvais pas concilier les deux. Moi, là-bas, et elle, ici.

- Oui, pour Barcelone. J'ai l'opportunité de ma vie là-bas. On me propose un poste à l'Université et si tout se passe bien, dans un an, je serai titulaire. Je n'ai pas pu refuser.

- Je comprends. se justifia-t-elle, avant de poursuivre. Tu sais, ce matin-là, j'étais venue te voir, je vous ai vus tous les deux avec Lisa, j'ai cru que... Bref, je suis désolée, j'ai pris la fuite sans savoir. Je te dois des excuses. Mais c'est comme cela, on ne peut revenir en arrière.

Je ne savais tout simplement pas quoi lui répondre. J'avais moi aussi pris la fuite en quelque sorte en acceptant ce poste. Nos choix respectifs nous avaient emmenés à nous éloigner l'un de l'autre malgré l'amour naissant qui nous liait encore.

- Tu n'as pas à t'excuser. Tu as fait ce qui t'a semblé le mieux. J'ai essayé de gérer Lisa mais ça n'a pas fonctionné. Enfin... Tu as des projets pour la rentrée? lui demandai-je.

- Oui, non, pas vraiment. D'abord valider mon année et après, je verrai. Je ne sais pas vraiment ce que je vais faire...

Nous avons continué à parler de tout et de rien, de mon nouvel appartement à Barcelone, je voulais éviter de parler de "nous" car je ne savais plus du tout quoi faire. Quand soudain, Marc m'appela depuis la fenêtre pour le déménagement. Le camion était là. Il fallait y aller. J'avais un sentiment de frustration, une amertume certaine de devoir interrompre ma conversation. C'était comme si j'allais la perdre à tout jamais. Je ne savais quoi lui dire dans la précipitation de mon départ. Il fallait que je trouve quelque chose pour ne pas rester sur ces échanges.

- Je surveille les exams cette semaine, puis mon avion décolle samedi à vingt heures. Je pris une forte inspiration pour lui souffler: Tu m'as manquée Elsy.

Elle leva les yeux dans ma direction, et quand enfin son regard croisa le mien. Elle me répondit alors:

- Toi aussi. Bonne chance pour ton déménagement. C'était bon de te revoir Ethan...

Puis elle se leva et fila dans la direction opposée à la mienne, sans même que j'ai pu la serrer dans mes bras une dernière fois. Dans un sens j'en voulais terriblement à Marc de nous avoir interrompus. Et d'un autre côté, je lui étais redevable car pour elle j'étais prêt à tout, même à larguer mon poste. La chance de ma vie. Je ne pouvais pas lui imposer mes choix, je devais les assumer seuls. Quelque part, même si ça me faisait du mal de l'admettre, d'une certaine façon, Lisa, les évènements de ce matin-là, le reste,... tout nous avait éloigné l'un de l'autre.
Je devais m'y résoudre. J'avais imaginé mille fois la revoir pendant le mois passé. Mais rien n'était conforme au scénario qui venait de se jouer devant mes yeux. J'avais été comme happé par cette situation.

Je fus vite rattrapé par la réalité. j'étais sollicité par Marc, ce qui me fît sortir du brouillard épais dans lequel je me trouvais.

- Oui, oui, j'arrive. Je suis là! lui criai-je depuis la rue.

Mais dans mon esprit je "n'y étais pas vraiment". Je n'étais plus ici, je n'étais pas non plus là-bas. Je voulais juste prolonger un peu plus mes derniers moments passés avec Elsy.

Le reste de la semaine passa rapidement. Entre mon aller-retour à Barcelone et la surveillance des examens. Je n'eus pas une minute à moi. Les amis me firent la surprise de se réunir pour fêter mon départ. Je voulais appeler Elsy, l'entendre, la voir, savoir comment elle allait, mais je savais que cela ne nous mènerait à rien, sinon à souffrir d'avantage. Alors je pris sur moi pour ne pas appuyer sur la touche verte de mon téléphone, et plusieurs fois je dû effacer son numéro.

Le samedi arriva à une vitesse hallucinante, je devais faire mon état des lieux. Je pris un moment pour parcourir l'espace de mon appartement vide. Je ne reconnaissais plus rien. Marc devait m'emmener à l'aéroport pour dix huit heures. Il insistait pour restait avec moi jusqu'à l'embarquement. Mais j'avais envie d'être seul. Je le remerciai une dernière fois, puis pris congé. J'avais envie de tourner la page et de passer à autre chose. Dans l'avion, c'est certain, je me sentirai mieux. En partant comme cela j'avais l'impression de laisser une partie de moi-même ici. Je partais pour une nouvelle vie. J'allais devoir l'admettre. Une nouvelle vie sans elle.