CHAPITRE 1

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Assises dans l'ombre, derrière un poteau de la balustrade, ma sœur et moi, pleurons la triste nouvelle que nous venons d'apprendre. Je regarde ma mère s'effondrer peu à peu devant le récit tragique de mon père.

— Alors, on a tout perdu, on n'a plus rien !? répète-t-elle à voix basse, entre deux sanglots.

Pour toute réponse, son mari s'effondre à genoux et se met à pleurer, peut-être pour la première fois de sa vie, totalement impuissant. Jack Heaton vient de faire faillite en emportant avec lui toute sa famille et patrimoine. Ma mère reste interdite, le temps d'assimiler chaque mot qu'elle vient d'entendre afin de les comprendre, puis son visage se remplit de larmes silencieuses qui s'écoulent lentement à ses joues.

— Pourras-tu un jour me pardonner Sylvia ?

— Avec la vie que tu m'as offerte jusqu'à présent, il serait égoïste de ma part de t'en vouloir sans te soutenir. Alors relève toi, car maintenant, il faut l'annoncer aux filles.

Mon père se redresse, las d'une discussion qui lui coûte, alors ma mère le prend dans ses bras avant de regarder par-dessus son épaule pour scruter le grand escalier qui mène à nos chambres et nous surprend, ma sœur et moi, les espionnant.

— Oh ! dit-elle gênée de nous savoir déjà au courant.

Mon père nous aperçoit à son tour. Son visage, bien triste, se ternit d'une étrange douleur. Alors prises en flagrant délit, Jane et moi, nous nous présentons près d'eux.

— Ça fait combien de temps que vous êtes là ?

— Assez longtemps, papa, confirmé-je sur un ton triste.

Inutile de lui faire répéter cette terrible nouvelle qui lui déchire le cœur, la situation est claire pour tous, nous sommes ruinés.

— Les filles, je suis désolé mais j'ai merdé, vraiment merdé.

Cet homme, dont l'aplomb naturel fait frémir plus d'un habituellement, se livre ce soir sans bouclier, portant seulement le poids de sa honte devant nous trois, les femmes de sa vie.

Sous l'emprise de sa détresse et pour l'amour inconditionnel que je lui porte, je me jette à son cou afin de lui diffuser mon affection, mon pardon et tout mon soutien. Ma sœur m'emboite le pas, suivie de près par notre mère. Dans cette étreinte riche en émotion, nous accusons notre faillite et notre futur incertain.

— Allons affronter notre nouvelle vie, les filles.

— Non, écrivons une nouvelle histoire, papa.

SantanaWhere stories live. Discover now