CHAPITRE 29

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Ce lundi, je traine des pieds, toujours aucune nouvelle. Qu'est-ce que je dois faire ? L'appeler ? Aller le voir ? Je n'en sais rien. Pourquoi tout devient si compliqué ? Être en couple ne devrait pas forcément être rythmé avec prise de tête et inconfort. Comme dit souvent mon amie Lysa : le remède pour retrouver le sourire, c'est de faire les boutiques, jusqu'à faire flamber sa carte de crédit. Bon, peut-être que pour aujourd'hui j'éviterai les achats compulsifs, au vu de mes maigres économies. Mais faire du lèche vitrine pour se vider la tête n'est pas une mauvaise idée ! Le plaisir des yeux est toujours mieux que de broyer du noir dans sa chambre.

Préférant la solitude à la compagnie de ma sœur et ma mère, j'arpente les magasins du grand centre commercial à la recherche d'une nouvelle lingerie. Bordel ! Je n'avais jamais remarqué le prix exorbitant d'un simple bout de dentelle. Il est bien loin le temps où je me prenais pour Pretty Woman, chez Aubade ou Lise Charmel. Autant faire une croix dessus, et s'offrir le luxe d'un soda à la terrasse d'un café. Six dollars plus tard, je sirote mon coca, en lorgnant mon téléphone dans l'espoir d'y voir le nom de Sony. Le néant !

— Salut Victoria. Quelle surprise ! Soit c'est une coïncidence, soit tu me suis.

Destin ou fatalité ? Quel est le mot adéquat quand on tombe nez à nez avec la personne qui a fait de votre nuit un enfer sans vraiment l'avoir voulu ? Parfois le karma nous joue des tours.

— Bonjour Jared. Moi je crois, au contraire, que c'est toi qui me suis.

Un petit rire amusé s'échappe du fond de sa gorge. Je ne pense pas que Jared me suive, il semble aussi surpris que moi de ce face à face hasardeux.

— Je peux me joindre à toi ? demande-t-il en regardant la chaise vide en face de moi.

Quelle demande impertinente et hors du commun. Bizarrement, j'éprouve de la sympathie pour lui, c'est un paradoxe quand on connait sa carte de visite.

— Si tu veux.

Mon ami de fortune s'installe face à moi, me dévoilant un monstrueux cocard violacé qui lui mange une partie du visage et son œil gauche est injecté de sang. La lumière du jour paraît lui faire un mal de chien, obligeant ses yeux à rester mi-clos.

— C'est douloureux ?

— C'est supportable !

— Je suis désolée pour ce qu'il t'a fait.

— C'est moi qui suis désolé. Je ne voulais pas te brouiller avec lui. Je sais que parfois il peut être, comment dire...

— Ingérable, colérique !

— ... tu l'as bien cerné Victoria. Nous avons tous des défauts, il paraît !

Je le trouve bien indulgeant pour un chef de gang qui à une image à faire respecter. A quel point il appréciait Sony quand ils étaient encore amis ?

— Est-ce qu'il risque des ennuis pour t'avoir fait ça ? demandé-je inquiète.

Les bras croisés sur sa poitrine, il pèse le pour et le contre, en réfléchissant sérieusement à la question.

— Pas cette fois ! lâche-t-il enfin. Personne n'a vu ce qui m'est arrivé, alors je vais passer l'éponge, car je lui ai réellement cassé les couilles, mais je ne serai pas toujours clément ! souligne-t-il avec une froideur qui me fait déglutir.

—Merci, soufflé-je en relâchant mes épaules.

Étrangement, je me sens en bonne compagnie. Jared parle posément, en arborant un sourire amical. Si on occulte son tatouage et son affreux cocard, il fait partie des personnes lambda, avec qui on aimerait passer du temps. Son coté macho s'est envolé, pour laisser place à quelqu'un d'agréable le temps d'un café.

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