Chapitre 14

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Lorsqu'on l'extirpa des bras de Morphée en tapant énergiquement à maintes reprises contre la porte de bois de sa chambre, Akis bailla ostensiblement, s'étira, et sentit de multiples douleurs courir le long de ses muscles. Ceux-ci avaient été mis à rude épreuve, entre le trajet à cheval, qui n'avait rien été d'autre qu'un long calvaire, et les tâches routinières réalisées la veille aux côtés des membres de la Huitième Brigade... Son ventre était plein, et de cela, il pouvait se satisfaire : mais il commençait à se demander s'il aurait jamais la possibilité de s'acclimater à cette vie de labeur qu'il n'avait jamais vraiment choisie. Avec un second bâillement, il se redressa en signalant d'un air encore ensommeillé qu'il était réveillé ; ce fut la voix étouffée d'Andrek qui lui parvint, de l'autre côté de la porte.

— Bien ! Viens directement à la salle d'eau, te nettoyer. On mangera après l'entraînement.

— Hein ? Comment ça, l'entraînement ?

Le rouquin n'eut malheureusement pas de réponse immédiate apportée à son interrogation légitime : les bruits de pas qui s'éloignèrent le long du couloir lui signifièrent qu'Andrek n'avait pas jugé bon de satisfaire sa curiosité. Quelque peu bougon, le natif d'Aville se décida à quitter sa couche avec lenteur, non sans prendre le temps d'étirer son corps de tout son long ; puis il se dirigea à la hâte jusqu'à la pièce où on semblait l'attendre, enthousiaste à l'idée de pouvoir bénéficier, encore une fois, d'un bon bain chaud.

Il s'apprêta à s'engouffrer dans le couloir qui menait au bassin lorsqu'il aperçut Keylan, qui réalisait le chemin inverse ; il lui adressa un léger signe de la tête en guise de salutations, mais ne reçut pour toute réponse qu'un sourire narquois. Relativement intimidé, et assurément mal à l'aise, le rouquin fit profil bas et détourna le regard ; quand Keylan parvint à sa hauteur, plutôt que de longer le mur sur sa droite pour éviter Akis, il gratifia ce dernier d'un virulent coup d'épaule, manquant de faire chuter le natif d'Aville. Sur sa nuque, Oscar se crispa en dirigeant ses deux yeux désolidarisés en direction de Keylan. Le garnement, lui, parvint à se rattraper in extremis en attrapant les briques entrelacées qui couraient sur son côté, et qui offraient pléthore de prises appréciables dans ce type de circonstances.

— Eh, commença-t-il à s'offusquer, j'aurais pu tomb...

— Désolé, gamin. Je t'avais pas vu.

Les yeux ronds, l'air sidéré, Akis détailla le visage de Keylan. Ce dernier affichait ouvertement son culot comme s'il s'était agi d'une médaille militaire : un rictus provocateur ne manquait pas d'étirer les commissures de ses lèvres, et son regard de serpent, vide de toute mansuétude, semblait lancer des éclairs à la nouvelle recrue. Bien incapable de comprendre pourquoi il s'était ainsi attiré les foudres de l'un de ses nouveaux compagnons, Akis se sentit blêmir et se figea, soudain mutique. La malveillance qui émanait de son vis-à-vis transparaissait limpidement : à tel point qu'il crut, l'espace d'un instant, que ce dernier n'allait pas manquer de lui sauter dessus afin de lui régler son compte.

Mais cela n'arriva pas : et pour cause, un éclat de voix provint des chambres, et une troisième silhouette fit irruption, encore plus glaçante que celle de Keylan.

— Fous-lui la paix, Keylan.

Sylas se trouvait là, à quelques pas seulement : froid, rigoureux, intransigeant. Ses yeux pétillaient d'une colère tue, pudique ; son port, aussi altier qu'à l'accoutumée, trahissait sa noblesse. Jusqu'à présent, Akis n'avait jamais eu de véritable interaction avec ce chevalier qu'il devinait travailleur et aiguisé. Il n'avait pourtant pas l'air aussi autoritaire que Lida, ou aussi inaccessible que Silvia ; il était simplement charismatique, trop impérieux pour qu'un paysan lambda ne puisse lui adresser la parole avec toute la sérénité du monde.

Le Royaume de BalhaanDove le storie prendono vita. Scoprilo ora