Chapitre 13 : Le livre des Saints

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Le réveil fut difficile et violent. Gerda avait ouvert les rideaux avec la délicatesse d'un éléphant en rut. Je grognais tout en me retournant pour échapper à la clarté matinale. En même temps, se prendre les rayons du soleil en pleine figure n'a jamais fait plaisir à personne.

- Mademoiselle Giva... Ne faites pas l'enfant, s'il vous plait.

Hmmph... Fis-je en mettant ma tête sous l'oreiller.

Que les ténèbres étaient bonnes sous cet abri de fortune.

Il faut vraiment vous lever. Le petit déjeuner est servi à 8 h 00 et il est 7 h 30.

Je fis le calcul vite fait.

Encore 15 minutes, Gerda... Marmonnai-je sous les plumes et le tissu.

- Non. Levez-vous maintenant ou vous ne serez jamais prête à temps.

Je soufflais un coup, tout espoir de bonne humeur envolé. Sortant du lit comme un zombie, je vis l'effroi de Gerda face à ma tête des mauvais jours.

- Made...

- Si tu dis encore un fois "mademoiselle"... Je te jette par la fenêtre, Gerda. La menaçai-je en pointant la dite fenêtre.

Sur cette menace, j'allais dans la salle de bain pour me laver rapidement. Je coiffais mes cheveux en une queue de cheval basse, puis je sortais pour enfiler la tenue que Gerda avait soigneusement posée sur le lit.
Un kefta gris souris. En voyant l'air gêné de Gerda, je me mis à douter.

Pourquoi fixes-tu ce kefta de cette manière ?

- Je... Pour rien. Hésita-t-elle. Enfilez cela et allons dans la salle à manger.

– Il est hideux. On dirait presque qu'ils ont utilisé les rideaux pour le faire. Entendis-je alors que je m'étais retournée pour enfiler la dite chose hideuse.

Que je porte cette chose hideuse, bien qu'en effet elle semble faite de rideau, ne me pose aucun problème. Nous pourrons toujours y apporter quelques retouches pour clouer le bec à ceux qui seront du même avis que toi, Gerda.

Tout en finissant de boutonner la veste, je me tournai vers la servante pour voir si mes paroles avaient fait mouche. Vu son expression horrifiée, j'imagine que oui. Mais je pouvais aussi lire de la peur dans ses prunelles bleues.

Je savais que j'étais à faire peur, ce matin... Mais de là à faire une tête pareille en me voyant, les dégâts devaient être vraiment affolants. Tant pis pour le monde si je ne colle pas au canon de beauté de Ravka aujourd'hui. J'y penserai demain.

Je suis prête.

- Bien made... Giva. S'empressa-t-elle de corriger alors que je la foudroyai du regard.

Elle me marcha devant moi pour me guider.

Elle est vraiment terrifiante. Il faudra que je lui en parle...

Je décidai de faire abstraction de cette remarque qu'elle n'avait sans doute pas eu conscience de dire à voix haute. Nous finîmes par arriver devant une grande porte à double battant. Gerda s'arrêta et me fit de nouveau face.

Je vous laisse, ici. J'ai d'autres tâches à accomplir. Nous nous reverrons ce soir.

Il ne manquait plus que le « passez une bonne journée » ou le « ne chahutez pas trop les autres enfants, Mademoiselle ». J'avais l'impression d'être devant le portail de l'école au moment où ma mère me déposait devant avant de partir au travail. Sauf que je n'étais pas chez moi et que l'école n'en était pas une.

Istorii zabivatyy (Histoire oubliée)Where stories live. Discover now