Chapitre 23 : Sans-abri

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Si le Darkling avait vraiment décidé de me faire suivre, ses espions étaient vraiment bons.

Je n'en avais repéré aucun. Afin d'éviter les ennuis avec le pitbull de l'écurie, je m'étais faite toute petite, le temps de déterminer si cet être au caractère déplorable était présent. Par miracle, le palefrenier de l'enfer ne montra pas le bout de son nez. Ma chance était donc revenue.

Par la suite, j'avais profité de l'absence du gardien des lieux pour aménager une cachette dans le foin, une sorte d'espace où j'avais juste la place de rentrer et de me coucher. Vu de devant, j'étais invisible. Il fallait faire le tour pour remarquer le trou dans la paille.

En attendant de faire quelque chose de mieux, j'étais déjà protégée de la pluie. Un bon début dans ma nouvelle vie d'exclu de la société. Une fois cela fait, j'avais pris le livre et avais feuilleté les dernières pages qui m'intéressaient. Ma lecture était un peu plus fluide qu'hier. C'était comme renouer avec quelque chose que j'avais perdu il y a longtemps.

J'appris que la relation entre l'Hérétique et elle s'était terminée de manière abrupte quand ce dernier avait créé le Fold. Il était dit ici qu'elle aurait tenté de l'empêcher de commettre cet acte. Elle aurait disparu en même temps. Bien que les choses ne soient pas dites explicitement, Morena serait morte en même temps que les gens présents dans la zone fauchée par les ténèbres.

Fin tragique pour une si proche collaboratrice. Est-ce que Kirigan était du même genre que son oncle ? Ou pouvait-il être pire en gardant ce masque de sauveur jusqu'à planter un couteau dans le dos de ses plus proches amis ? Bien qu'à mon humble avis, je n'en ai jamais eu vraiment.

Je ne glanais rien de plus concernant ma possible ancêtre.

En revanche, je me tournais vers l'Hérétique disparu quelque temps plus tard, sans laisser de trace. Là encore, des suppositions, comme le fait qu'il se soit fait dévorer par des volcras alors qu'il tentait de pénétrer dans la brume ténébreuse. Une autre concernant une possible aventure avec une aristocrate déchue (plus tard confirmée par la venue d'un Kirigan à la Cour) ainsi que d'autres hypothèses bien trop fantaisistes même pour moi.

Un bruit me fit sortir la tête doucement de ma cachette. Le jeune Palefrenier tenait sa fourche d'une main tremblante. Il comptait sans aucun doute venir en prendre pour nourrir les chevaux.

Note à moi-même : Se cacher dans la paille, bonne idée. Mais y rester, quand un jeune homme tremblotant compte y enfoncer une fourche, pas bonne idée.

J'aurais dû penser à ce détail avant de m'installer ici. J'imagine que j'allais de nouveau devoir plier bagage. Je m'apprêtais à sortir quand la voix bourrue du palefrenier se fit entendre. Oh non pas lui...

Espèce d'asticots mangeurs de crottin ! Tu vas te bouger un peu le derrière au lieu de fixer le foin comme s'il allait te sauter à la gorge ?

- Je... Je... Tenta de dire Piotr sans arriver à formuler la moindre phrase.

Donne-moi ça ! On ne va pas y passer la nuit ! Qui a bien pu me refiler un emploi pareil...

Je rentrai illico ma tête dans mon abri. Il ne fallait pas qu'il me voit. Je me renfonçai le plus loin possible afin de ne pas être touché par les pointes de la fourche que détenait maintenant ce psychopathe.

Ce dernier fourragea dans la paille, faisant trembler et bouger ce que j'avais mis du temps à construire. Mon abri n'allait pas tenir le choc sur le long terme, c'était une certitude. J'allais devoir me trouver un autre abri.

Je ne voyais qu'un endroit où je pourrais me reposer sans que personne ne vienne m'importuner, surtout Kirigan et son palefrenier démoniaque. Baghra n'allait pas apprécier du tout, mais j'essaierai de me montrer très persuasive.

Le croque mitaine donna encore quelques coups de fourche dans la cachette avant de partir, suivi de près par un jeunot totalement traumatisé. Une fois sûre qu'il ne se montrerait pas de nouveau, je m'extirpais de là-dessous en rampant. J'époussetais mes vêtements et mon sac de fortune. Le ciel s'était considérablement assombri, indiquant que la nuit ne tarderait pas et que j'étais en retard pour le dîner. Je n'allais quand même pas louper une occasion de contrarier le gang des privilégiés de cet endroit. Et puis, je devais raconter ma journée à Alina. J'en profiterai pour déposer le livre à sa place.

Je ne devais pas avoir fière allure, mais je ne m'en formalisais pas. Après tout, j'étais censé avoir passé ma journée à l'écurie. Chose à moitié vraie. Quand j'entrai dans la salle, tout le monde se tut.

Je vous en prie, continuez ce que vous faisiez. Je ne fais que passer.

– Mademoiselle Krasowski. Heureux de voir que votre nouveau lieu d'apprentissage vous plaît tellement que vous en avez ramené un peu avec vous.

Je le dévisageai sans comprendre. Puis je compris, j'avais sûrement de la paille dans les cheveux.

Disons que j'ai dû composer pour ne pas finir empalé au bout d'une fourche. Merci pour vos observations constructives, Général.

Je cherchais Alina parmi les gens attablés, mais ne la trouvais nulle part.

Où est Alina ? Demandais-je, un peu étonnée de ne pas la voir ici.

Elle est encore avec Baghra.

– Encore ? Puis-je vous demander l'heure, Général ?

— Il est 20 h 30, Mademoiselle.

— Vous voulez dire qu'elle a bientôt passé 6 heures dans le four qu'est la demeure de Baghra ? Vous êtes totalement barge, ma parole.

Je pris deux morceaux de pain dans une corbeille et fit demi-tour pour aller sauver mon amie d'une mauvaise grippe.

Attendez, Giva ! Que faites-vous ?

– Votre job ! Criai-je en passant la porte.

Je me mis à courir une fois la porte du palais atteinte. Cet imbécile n'était obsédé que par les pouvoirs d'ALINA. Seuls les résultats lui importaient. Tout le monde sait que pour un bon apprentissage, le temps est nécessaire, qu'une seule leçon ne suffirait pas à maîtriser le genre de pouvoir qu'elle et moi détenions. Si ses entraînements se passaient en plein air, je n'aurais rien dit et me serais assise pour manger tranquillement. Mais là, on parlait de l'antre de Baghra où même le fait de poser un œuf sur une table pourrait en faire un œuf dur.

J'arrivais devant la dite antre quand un faisceau de lumière surpuissant passa en dessous de la porte, m'éblouissant légèrement. Je toquai rapidement à la porte. Des pas rapides s'approchèrent. C'est Alina qui m'ouvrit. Elle sembla étonnée de me voir. Comment aborder les choses sans mettre Baghra en boule ?

Excusez-moi de vous déranger toutes les deux, mais il est presque 21 heures. Je pense qu'une pause s'impose pour vous deux. Alina, tu devrais aller manger avant qu'ils n'aient fini.

Alina se tourna vers la sorcière qui nous avait rejoints.

Tu peux y aller. C'est tout pour aujourd'hui. Reviens demain à la même heure. Quant à vous, Giva... Ne refaites jamais ça. Ajouta-t-elle froidement.

Je suis désolé, Madame. Mais une Alina malade est aussi inutile qu'une Alina sans pouvoir. Il faut bien qu'elle fasse une petite pause pour pouvoir donner le meilleur d'elle-même.

Baghra soupira, mais acquiesça, avant de dire ceci.

N'oubliez pas notre rendez-vous de tout à l'heure.

- Bien sûr Je serais là.




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