Twins Campus

Chapitre 43

43

Break the chains

J'entends un rire, dans ma tête. Je sens que la balance est en train de pencher en ma faveur, cette fois. Je n'ai pas eu la chance de voir la prestation de Bianca, lorsqu'elle enregistrait son morceau, mais je sais que celui qu'elle a chanté en face d'Annie Goldberg était magnifique.

— Non, ce n'est pas possible ! peste Justin.

Je me tourne vers Bianca, qui reste encore toute timide. Elle ne l'a peut-être pas compris, mais les cartes viennent de changer de main parce qu'elle a eu l'adhésion du public sur un projet qui n'a pas été validé par son producteur. En plus de cela, elle est libre. Je parle bien d'elle, parce que c'est elle et personne d'autre qui a interprété le morceau qui a piqué l'intérêt d'autres professionnels du milieu. Ce n'est pas à moi de m'en attribuer les mérites.

— Voilà ce qu'on va faire, Justin : je vais te rembourser à toi et à Anton tout ce que je vous dois. Ensuite, vous n'entendrez plus parler de moi et je serai libre. Concernant Percy, je veux que tu insistes pour qu'il soit relâché. Je ne t'appartiens plus. Pas plus que Bianca n'est à toi.

Dans un premier temps, il serre le poing, puis se rend à l'évidence. Puisqu'il n'est plus officiellement impliqué dans la production de mes albums, il va devoir se contenter de ça. S'il refuse ma proposition, nous partons pour un interminable procès duquel il n'est pas certain de ressortir vainqueur. S'il décide de renoncer, il peut empocher une grosse somme et repartir la tête haute.

— Tu avoueras publiquement que tu m'as été infidèle.

— Entendu.

— Ça brisera ton image.

— Je m'en fiche, rétorqué-je aussi sec.

Ce n'est plus le genre de préoccupation qui me trotte dans la tête. Aujourd'hui, je crois que j'ai bien plus à offrir qu'une simple image de marque. Je ne veux plus être le produit de producteurs avides. Je souhaite mener une toute autre vie et c'est Percy qui m'a ouvert les yeux à ce sujet.

— Tu... Tu renoncerais à tout ça ? s'étonne-t-il.

— J'y ai goûté. Je peux en revenir.

Justin me rend mon téléphone. Ça y est. Ma vie m'appartient de nouveau.

L'affaire est conclue et les contrats déchirés. Plus rien ne me relie désormais à Justin, sinon une dette énorme, à hauteur de plusieurs millions de dollars pour les préjudices de l'annulation des concerts. Mais lorsque je me serai acquittée de la somme, nous n'aurons plus rien à voir ensemble. Ce sera comme si nous n'existions plus, l'un pour l'autre.

Lorsque nous quittons le poste de police, je sais que Justin assurera la libération de Percy en convainquant Cole et sa famille. À condition, bien sûr, que l'argent lui soit versé rapidement. Justin est un homme qui aime posséder de belles choses et j'en faisais partie, mais il aime encore plus que son compte en banque soit bien rempli.

— Bon... Et maintenant ? demande Bianca.

Nous nous retrouvons l'une en face de l'autre. Je suis elle et elle est moi.

— On devrait marcher un peu, proposé-je.

Nate est resté au poste de police, afin d'assurer que tout se passe exactement comme je l'ai demandé. Nous profitons de notre moment seule à seule, avec ma soeur.

— J'ai adoré être dans ta peau, avoué-je.

— Moi aussi. Même s'il y a eu énormément de moments difficiles.

— Pour être plus précises, j'ai aimé me sentir normale... Rencontrer des gens et que les relations ne soient pas tout de suite biaisées. J'ai eu l'impression de retrouver le terreau d'humanité qu'il me manquait et je ne veux plus perdre ça.

Bianca tourne la tête vers moi.

— Attends, est-ce que tu parles de Percy ?

Je hausse les épaules, sans quitter le trottoir des yeux.

— Je ne sais pas. Peut-être bien, oui. J'ai pris tout le monde de haut, quand j'étais là-bas. Mais pas lui. Plus maintenant, en tout cas. Il m'a appris l'humilité. J'ai goûté à la vie de star, au luxe et aux paillettes, Bianca, et je n'en veux plus. Tout ça... C'est derrière moi, désormais.

— Attends, tu es sérieuse ? Tu vas vraiment renoncer à cette vie ?

Je ne suis plus hésitante vis-à-vis de toute cette histoire, maintenant. Je sais exactement dans quelle direction je veux mener la suite de mon existence. Le show-business n'est pas la bonne route, pour moi. Il n'est pas exclu que j'y revienne un jour. Mais pour le moment, j'ai besoin d'une pause. Une très longue pause. Loin des médias, loin des flashs, loin des paillettes...

— Je crois, oui. C'est ce dont j'ai besoin. Je me suis usée dans ce rythme. Mais toi, par contre, tu as du talent. Ce serait dommage de le gâcher.

— Tu... Tu penses vraiment ?

Bianca se met à rire doucement, puis reprend :

— Avoir été dans ta peau m'a permis de m'affirmer et de comprendre ce que j'aimais vraiment. Ça m'a tout de suite donné une position avantageuse, sur un piédestal. J'ai eu l'impression que le monde m'appartenait. Mais surtout, j'étais une artiste. Et ça... Ça n'avait pas de prix. Mais bon, j'imagine que je dois retourner à ma vie d'avant. Tout a une fin.

Je suis triste pour elle, mais j'ai peut-être une solution.

— Tu n'as pas besoin de renoncer à tout, Bianca. Si j'en crois ce que j'ai vu lors de tes prestations, tu assures grave. Pourquoi tu n'essayes pas de te lancer là-dedans ?

— Comment ?

Je dégaine mon téléphone et montre à Bianca tous les numéros qui ont appelé depuis que ma prétendue prestation a fait le buzz sur les réseaux sociaux.

— Je vais m'assurer que j'en ai bien les moyens, puis je te ferai une proposition, OK ? Je vais aller voir Percy. Je m'inquiète pour lui.

Quelques heures plus tard, je récupère enfin mon camarade de classe.

Lorsque je l'aperçois sortir du poste de police, je lui saute au cou.

— Enfin, te voilà ! Je suis tellement heureuse que tu ailles bien ! Alors, qu'est-ce qu'il s'est passé ? Qu'est-ce qu'ils t'ont dit ?

J'ai encore la boule au ventre. Même si j'ai confiance en l'avidité et en l'influence de Justin, même si Nate s'est assuré que tout se déroule précisément comme je l'ai demandé, une part de moi se dit que le destin est toujours prêt à frapper pour jouer un mauvais tour.

— Je n'ai rien compris à ce qu'il s'est passé, avoue-t-il. D'abord, ils m'ont dit que j'étais dans la merde, puis ils sont revenus sur leur décision et j'ai été libéré. Un gars est venu me voir : Justin. Il m'a dit de prendre soin de toi, parce que tu le méritais.

Les bras de Percy se referment autour de mon dos dans une douce étreinte.

— ... Et c'est ce que j'ai l'intention de faire, conclut-il. Tu m'as sauvé les fesses.

— Ces fesses sont trop belles pour aller en prison.

Mon partenaire se retire de notre accolade, puis me prend par les épaules.

— Écoute, euh... Camilla ? Je... Je ne sais pas si...

— Non, ne le dis pas. Oui, nous pouvons être ensemble et non, nous ne risquons rien. J'ai l'intention de me retirer de ma vie d'artiste pour le moment. Percy, tu m'as touchée en plein coeur, tu m'as rendu l'humilité que j'avais perdu et tu m'as rendue dingue. Je n'ai pas envie de renoncer à tout ça. À la vraie vie.