11. Bienveillance brune

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Laura était couchée sur le sol de la cafétéria, un être humain, bien réel celui-là, penché sur elle. Gareth Conway, le Brun de la Société. Derrière lui, debout, se trouvait James Hornet, au téléphone. Elle n'avait aucune idée du temps écoulé depuis son étourdissement. La douleur s'estompait dans sa main droite, là où le spectre l'avait touchée.

— Elle revient à elle, annonça Conway.

James Hornet avait raccroché.

— L'équipe médicale arrive quand même. Vérifier que tout va bien.

— Docteur Woodward ? demanda Conway.

Laura hocha péniblement la tête. Elle se sentait endolorie de la tête aux pieds, la vision floue, le coeur battant.

— J'ai fait un malaise... ça va, souffla-t-elle en prenant appui sur le bras secourable qu'on lui tendait.

Elle entendit couler de l'eau tandis que le psychologue l'aidait à se mettre en position assise. Il ne lui proposa pas de se lever et elle s'adossa à l'une des armoires à dossiers. James Hornet s'accroupit pour lui tendre un verre plein.

— Qu'est-ce qui s'est passé ? demanda-t-il, inquiet.

Elle but une gorgée, lentement, réalisa qu'elle avait encore les joues humides et les essuya du revers de la main. Ce simple contact la fit grimacer de douleur.

— Vous vous êtes fait mal ? l'interrogea Conway.

— Je ne sais pas. Peut-être en tombant.

Elle lui présenta sa paume, qui paraissait indemne, sans trace de brûlure ou d'hématome. Il l'effleura sans la toucher.

— Sans doute une chute de tension. Surmenage... Je n'ai pas eu le temps de manger ce midi.

— Est-ce que vous hydratez assez ? demanda Hornet. Par ces chaleurs, c'est critique.

Elle haussa les épaules avec une moue embarrassée. N'importe quelle excuse était bonne à prendre. La vérité... la vérité ne pouvait être partagée. La porte s'ouvrit sur le médecin hospitalier et son infirmier. Conway et Hornet s'écartèrent tandis qu'ils faisaient leur travail, en professionnels détachés.

La tension de Laura était effectivement très basse et ils la firent boire une solution salée. L'infirmier suggéra qu'elle relève les jambes, mais n'insista pas face à son regard noir. Bien qu'Hornet avait branché un ventilateur, l'air demeurait chaud, incroyablement chaud, depuis que le fantôme avait disparu. Elle les assura, dix fois, cent fois, qu'elle allait bien, que c'était passager, mais ils ne voulurent rien entendre et elle capitula, se laissant manipuler par les experts, l'esprit encore bourdonnant.


— Vous ne pouvez pas reprendre la route dans cet état, annonça finalement Hornet, alors que Laura avait retrouvé une position plus ordinaire, assise à table, devant ses notes éparses. Je vais vous appeler un taxi.

— Je peux vous ramener, si vous me dites où vous habitez, intervint Conway. J'avais terminé ici, de toute façon.

— Ma voiture est juste devant, protesta Laura.

— Vous viendrez la rechercher demain, proposa le psychiatre.

— J'habite loin ! ajouta-t-elle, butée.

— Il est encore tôt, je ne suis pas pressé, renchérit le Brun.

— Merci, Gareth, conclut Hornet.

Laura réalisa que son sort était scellé et poussa un soupir.

— Très bien.

L'équipe urgentiste était repartie, après l'avoir abreuvée de bons conseils qu'elle connaissait par cœur. Éviter de toucher un fantôme n'en faisait pas partie.

Sain d'Esprit (Laura Woodward - tome 2)Where stories live. Discover now