-14-CHARLIE

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« Ce que je veux, c'est me fuir moi même, ne plus me rappeler, rien ... me vider de toute ma vie ... ne regarder que mon corps ...être seulement ce corps "

Luigi Pirandello

Charlie

J'avais si mal à la poitrine d'avoir couru comme une dératée pour rentrer chez moi. Une autre part c'était pour ce qu'avait dit Connor de mes yeux, il avait lu en moi si facilement. Personne ne remarquait quand je déconnectais, personne n'en connaissait les vraies raisons, souffrir.

Souffrir, ce mot résonnait en moi. Il me démolissait, laissant les démons venir m'habiter et il leur avait permis de prendre une trop grande place en me parlant ce que j'essayais de fuir. Je ne voulais pas attirer la pitié ou un quelconque intérêt parce que je ne le méritais pas. Toutes ces choses que j'avais pu faire étaient condamnables par mille jurés qui aurait la même sentence. Quant à Alec, il était aussi une source intarissable de chagrin.

Je ne pouvais pas m'empêcher de pleurer, prise de panique parce que oui j'avais mal. Mal d'avoir vécu l'enfer sans raison, mal d'avoir encore mal. Je détestais ce que j'étais devenue, je savais que mes choix m'avait conduit à être là aujourd'hui. De mauvaises décisions qui m'avaient gâché la vie mais quand je pensais avoir été abolie de mes erreurs, tout une vague de merde avait déferlé sur moi. Me passant de l'eau sur le visage, je n'osais lever les yeux vers le miroir. Je supportais difficilement de me voir, je ne me souciais guère de mon apparence. Quand je me coiffais se sont mes cheveux que je regardais, jamais je ne restais fixé sur moi, je n'y arrivais pas. Mon reflet me renvoyait tout un tas de défauts. Je me concentrais toujours sur un point précis pour ne pas voir l'ensemble. C'était plus fort que moi, je voulais être une autre. J'aurais tellement aimé changé cet état.

Je frappais le fond du lavabo plein d'eau comme une enfant colérique, affreusement énervée par ce que mon cerveau pouvait débiter et de ce que j'étais. Cette colère aidait à me tenir debout, à me faire avancer mais quand tout se fissurait par une seule phrase alors, je me reprenais le tout en plein dans la figure. C'était comme pisser face au vent mais la colère avait ses limites, elle me bouffait de l'intérieur. Plus je la nourrissais et plus elle en demandait. Bientôt, je n'aurais plus rien à lui donner et je me perdrais alors.

Il n'y avait qu'une solution dans ces moments difficiles pour les faire disparaitre, la douleur physique dépassant le déchirement mental. Avant que tout ne s'écroule comme un château de carte, je me déshabillais en projetant mes affaires loin de moi, collant de sueur. Je tournais les boutons de la douche et passait sous le jet sans me préoccuper si c'était froid ou chaud juste pour me débarrasser de cette mauvaise impression.

Sortant rapidement pour m'essuyer, j'enfilais une de mes nombreuses tenus de sport. J'armais mon bras de la sangle pour mon Ipod, j'enfournais mes écouteurs à leur place, chaussures, les clés de l'appartement dans une poche cachée et je fonçais à vive allure. Mes muscles n'avaient pas eu le temps de refroidir et j'imposais une cadence rythmée. Je quittais les rues pour avancer vers la plage, je mettais moins de deux minutes pour arriver sur l'esplanade. L'air extérieur m'arrivait et j'inspirais le plus possible pour me donner des forces. Plus rien ne pourrait stopper ma course, pas de mur, de photographie et encore moins mon visage dans les miroirs. C'était un cri silencieux que celui de mes muscles hurlant à la maltraitance mais j'échappais à mes songes alors j'accélérais un peu plus.

Complètement essoufflée, percluse d'un point de côté et d'un crampe au mollet, je voulais continuer mais mes pieds ne suivaient plus. Je le sentais mais je ne pouvais me résoudre à écouter mon corps mais la chute était obligatoire. Je sentais ma jambe droite rester à l'arrière tandis que mon corps lui continuait sa course. Tout ce passa au ralenti, je voyais le sol de plus en plus prêt, les mains en avant, j'étais bonne pour me fracturer au moins un poignet. Dans ces moments là le cerveau turbinait à plein régime et toutes les situations vous passaient par la tête. Le ridicule, la douleur qui allait arriver et qui serait inéluctable. Alors, j'avais le réflexe de me tourner légèrement et c'était mon épaule droite qui prenait en premier. Je sentais la déchirure de la peau sur le bitume puis celle du choc. Une douleur irradiante dans tout le bras puis ma tête et le reste du corps. Finissant sur le dos, le souffle court, je ne voyais que les étoiles puis des têtes inquiètes au dessus de moi.

—Vous allez bien, demandait un homme d'un cinquantaine d'années au visage marqué par le temps.

Quelle question, sérieux.

Est ce que je me portais comme un charme ? Bien sûr que non ! Je sentais l'attaque cuisante de la brûlure sur ma peau, une virulente douleur à la tête, à l'épaule. J'avais honte de m'être écroulée devant un public et par dessus tout, je croyais devenir dingue, littéralement. L'homme s'accroupissait à genoux auprès de moi pour continuer à me reluquer et j'arrivais à me mettre assise non sans sentir un petit vertige, il avança une main que je repoussais de nouveau.

—Je vous interdis de me toucher, disais-je d'une voix limpide mais d'un ton bas, encartant son bras sans le toucher.

—Mademoiselle, votre genou...

—J'ai dis PAS TOUCHE. C'est compris ?

Je le fusillais du regard. Je n'avais pas besoin de pitié et sûrement pas celle d'un inconnu.

—Du calme, on ne vous veut aucun mal mais vous auriez pu être grièvement blessée.

—Ça ira.

Je me relevais difficilement mais seule avançant aussi vite que je le pouvais avec le peu de dignité que il me restait. Je n'allais pas me laisser m'écrouler ici, sous la vision de qui que se soit. Non, j'allais me battre pour revenir dans le monde des vivants. M'élever la tête hors de l'eau pour pouvoir respirer.

Arrivée chez moi, je jetais mes affaires et j'attrapais la trousse de secours dans ma cuisine. Installée à table, je sortais le matériel nécessaire afin de soigner mes écorchures. Je grimaçais en appliquant les compresses imbibées de produit désinfectant. Des graviers et de la poussière étaient venus se coller à la plaie séchée par le vent. C'était extrêmement douloureux même si je n'étais pas du genre douillette. Je répétais l'opération pour mon genou. Je voyais des hématomes bleutés se former déjà au point d'impact, pour ça, je n'y pouvais rien. Une seconde douche dans cette soirée trouble, finissait de laver mes blessures. J'avais fait couler de l'eau bouillante dessus et je me sentais apaisée d'avoir mal de cette manière parce que mon cerveau ne se concentrait que sur les signaux alertés par mes nerfs mis à mal. Toujours la douleur physique qui venait prendre le dessus sur tout le reste pourtant une fois installé dans mon lit, j'en revenais au brun armé de ses yeux verts qui avait deviné une partie de celle que j'étais.

Je ne trouvais toujours pas le sommeil alors je me relevais comme pratiquement toutes les nuits et s'en suivait le même rituel de nettoyage de mon appartement sous mes grognements causés par ma chute. J'arriverais à gérer si on me foutait la paix. Je n'avais pas le choix.

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A suivre ....

A suivre

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Fallen "In the deep"  TOME  1Tempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang