Chapitre 80

508 38 30
                                    

Beurk, une île escarpée au climat rude avec seulement quelques zones planes, loin d'être accueillante, elle était pourtant aimée de ses habitants. Une île ayant vu naître de grands hommes et qui venait en quelques heures de se gorger de plus de sang que dans toute son histoire. Ses terres en étaient imbibées, son ciel en feu, laissant pleuvoir une lourde pluie rougeâtre à chaque coup d'épée des dragonniers, à chaque lacération des griffes d'ivoires.

Les hommes se battaient dans le sang pour le sang, celui de leurs ancêtres, celui de leurs familles, celui de leurs chefs. Pas pour la gloire, pas pour l'honneur, seulement pour une vision différente. Un camp se défendait, un camp voulait conquérir. Le propre des hommes, l'un voulait s'emparer de ce qu'il ne lui appartenait pas, l'autre conserver ce qu'il considérait comme sien.

— Aujourd'hui, cela prend fin... murmura Eldrid.

Elle se trouvait en haut d'une butte, aux côtés de Siv et Soren. Derrière eux quatre dragons patientaient. Jamais voyage depuis les îles du nord n'avaient été si rapide, ils avaient établi un record pour les générations futures. Tous méritaient d'être loués pour leur excellent travail. Un temps des félicitations qui devrait cependant attendre, ils avaient plus urgent à faire.

— Je ne pensais pas que ça se passerait si bien, commenta Soren.

Eldrid grogna un assentiment. Dès qu'ils avaient été en vue de l'île, ils avaient envoyé leurs dragonniers pour dégager un passage. Ceux de Drago étant trop occupé à se battre, ils n'avaient pu intervenir. Les navires bloquant le passage à la flotte nordienne avaient été détruits avant même d'être à portée de tir, lui laissant la voie totalement libre. Ils n'avaient pas eu besoin de ralentir, au contraire ils avaient usé de toute leur célérité pour arriver au plus vite et prendre de court leur ennemi. Le débarquement s'était fait en trombe, leurs dragonniers tenant du mieux possible les troupes adverses à distance.

Les soldats étaient en train de finir de prendre position, les régiments avançant au pas de course pour former les lignes. Face à eux, les soudards de Drago semblaient perdus, pris au dépourvu. Ils ne s'étaient pas attendus à l'arrivée d'une nouvelle armée alors même que la victoire se profilait à l'ouest.

— Des renforts approchent, fit remarquer Siv en regardant une longue colonne d'hommes venir dans leur direction.

— Ils ont l'air d'être bien disciplinés, peut-être des troupes d'élite, supposa Soren.

— Ils seront sur nous avant qu'on ne puisse lancer l'assaut, dommage, soupira Eldrid.

— Au moins, nous avons réussi à nous mettre en formation avant leur arrivée, c'est déjà une bonne chose, dit Siv avec optimisme.

En effet, s'ils avaient dû affronter les Jomsvikings en plein débarquement, ils auraient risqué de se faire refouler à la mer. Les Dieux s'étaient montrés cléments. À la place, ils devraient leur faire face, rien de bien méchant vu leurs effectifs, c'était déjà prévu dans le plan d'origine.

Un homme approcha, la cinquantaine, des cheveux courts et brins, le visage tiré par la fatigue. Olsen, l'intendant de l'île d'Hagbard. Il avait insisté pour venir alors même que sa place était dans le nord. Hagbard n'ayant plus la capacité de régenter ses terres, il aurait dû y rester, mais il avait insisté pour venir. De son point de vue, si leur armée était défaite ici alors le nord était perdu. Il n'avait pas tort.

— Quand pourrons-nous attaquer ? demanda Eldrid.

— Dans quelques minutes.

— Le moral ?

— Les gars sont fatigués par le voyage, mais ils sont prêts à se battre. Ils savent que leurs frères qui se battent aux côtés d'Almar et Stoïck sont en difficulté, ils sont prêts à tout donner pour les aider.

Dragon NoirWhere stories live. Discover now