Chapitre 49

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Garm se posa lourdement sur l'esplanade faisant face à la capitainerie. De premiers abords le bâtiment pouvait sembler plutôt brut et imposant avec sa façade de pierres apparentes, mais si on prenait le temps de l'observer on finissait par y déceler un certain charme.

Comme la majorité des bâtiments de l'île, il était certes fait de basalte, une ressource facilement exploitable sur cette terre, mais il était évident que sa construction avait été méticuleuse. Les charpentiers, tailleurs de pierres et maçons ne s'étaient pas contentés d'y agglomérer à la va-vite les matériaux. Ils avaient pris le temps d'y réfléchir et de consciencieusement en préparer les plans. Un travail colossal.

Les pierres étaient finement taillées, pas toutes de la même manière et semblaient même reproduire un motif quand on cherchait bien, mais Thorkell aurait été bien en peine de dire lequel. Le mortier avait lui aussi été savamment dosé, ni trop ni trop peu. Portes et volets en bois de chêne, toit de bardeaux, il y avait là une certaine élégance pour ce bâtiment dédié aux officiers du port. L'ancien chef de l'île avait pris grand soin de ses hommes pour que finalement tout cela tombe entre les mains des soudards de Drago.

Thorkell descendit de son dragon, enleva son casque et passa le seuil du bâtiment, faisant craquer au passage sous ses bottes ce qu'il restait de la porte d'entrée. Le verre des vitres se brisa en miette sous ses semelles telle une litanie discordante venue annoncer son arrivée. La guerre n'avait que faire de l'architecture et des biens matériels.

Ni même de la vie d'ailleurs, pensa Thorkell en voyant dans un coin de la pièce le cadavre d'un homme au crâne défoncé et dont la cervelle se répandait sur le sol.

La pièce était assez grande avec un comptoir en bois ayant connu des jours meilleurs. Il était dans un sale état, martyrisé par nombre de coups de hache, reflet des combats venant de s'y produire. Une table avait été installée au milieu de la salle, une carte de l'île y était étalée, entourée d'une petite troupe de vikings.

Thorkell s'en approcha et se faufila entre deux chefs du Nord, Ditwin et Leif. Son père était resté avec la flotte pour la diriger, une décision prise en commun avec Stoïck qui se trouvait actuellement de l'autre côté de la table. L'un s'occupait des forces navales et l'autre des forces terrestres. Une séparation équitable des pouvoirs entre les deux chefs de clans les plus puissants de l'Alliance.

Stoïck était entouré par trois autres chefs : Dankrad, Karl et Orlik. Godfred était resté avec la flotte pour représenter la Coalition et éviter les complications dans la chaîne de commandement. Même si tous savaient l'Alliance indispensable, on ne pouvait empêchait les divergences d'opinions entre les peuples et personne ne voulait voir un capitaine de navire de la Coalition refuser les ordres d'Hagbard au nom de ses idéaux ou de son caractère. Cela pourrait mettre en danger toute la flotte et il revenait à Godfred d'évitait cela. Il lui incombait certainement là l'une des tâches les plus ardues.

— Maintenant que le port est pris, nous devons au plus vite prendre position sur les plaines et commencer l'assaut des murs. Vous êtes tous d'accord avec moi ?

La question de Stoïck n'attendait pas réellement de réponse, il s'agissait plus d'une politesse à l'intention des nordiens qu'autre chose. Tout comme la flotte revenait à Hagbard, l'armée revenait à Stoïck, mais lui aussi devait faire attention. Il se devait de traiter les nordiens comme ses propres hommes sans quoi tout pourrait se finir lors de cette bataille. Qu'il mette en difficulté les troupes du Nord avec intention en leur faisant subir le plus gros des pertes et l'Alliance disparaîtrait.

— En effet, il nous faut prendre les positions au plus vite, avant que l'ennemi ne réagisse, mais ne serait-il pas mieux d'attendre que les armes de siège soient assemblées. Avec les catapultes que nous avons, nous pourrions faire tomber leurs murs ou au moins les endommager sans subir de pertes.

Dragon NoirWhere stories live. Discover now