Chapitre 14

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— C'est normal si les étoiles bougent ?

Et j'éclate de rire en tournant sur moi-même. Le trajet jusqu'au palais s'est fait sans encombre. Le seul souci, c'est que je me sens bizarre. Enfin, ce n'est pas réellement un souci. C'est même plutôt marrant. Je n'avais jamais ressenti ça auparavant. Ander me tuerait s'il me voyait dans cet état-là.

— C'est peut-être parce que tu tournes sur toi-même ? souligne Bianca.

Je lis l'inquiétude dans son regard mais honnêtement, je ne comprends pas pourquoi. Je peux bien m'amuser quand même ?

— Non, elle a raison, les étoiles bougent toutes seule ! s'exclame Bendy, hilare.

Il est aussi perdu que moi. Je crois qu'il a trop bu. Il m'attrape alors par les mains et nous nous mettons à virevolter ensemble. Le monde bascule sous mes yeux. Mon rire se propage autour de moi mais bientôt, une vive douleur me tiraille les genoux. Je viens de trébucher sur les marches extérieures du palais comme une idiote. Bendy ne m'aide même pas à me relever.

Rewind le prend par les épaules en grommelant et l'aide à grimper les marches. Moi, je regarde mes genoux écorchés, en sang, et je me mets à penser que cette douleur est plus agréable que celle présente dans ma poitrine. Bianca se précipite vers moi, me prenant par les mains comme si j'étais une enfant.

— Arynn, c'est la dernière fois que tu bois autant !

— Je m'occupe d'elle, intervient Eros, va aider Rewind. Bendy est aussi lourd que trois tonneaux réunis.

Bianca n'hésite pas, je crois qu'elle lui fait confiance. Alors Eros se penche et m'aide à me relever.

— J'ai mal. Mais en même temps, c'est agréable.

— Ne commence pas à penser comme ça, Arynn.

Il me prend par les épaules et m'aide à monter les marches. C'est une tache complexe, je bute sue chacune d'entre elle. Si bien que je finis par me rétamer de nouveau. Je l'entends soupirer dans mon dos et bientôt, il me fait basculer dans ses bras comme si je ne pesais rien.

— Comment je pense ? Je pense correctement.

Je lui touche le nez en riant. Ça ne le fait pas rire du tout. Au contraire, il a l'air crispé.

— Non, tu penses comme quelqu'un qui croit que la souffrance physique anesthésie la douleur.

— J'ai bien le droit de penser comme ça pour une petite soirée. Ma mère va mourir. Je devrais sourire et profiter de la vie en étant sobre ? Quelle tristesse !

— Tu devrais plutôt en parler à quelqu'un.

— Et pleurer dans tes bras comme une fillette ? Non merci. Certaines peines ne guérissent jamais.

Je le vois serrer les mâchoires alors qu'il déambule dans le palais, à la recherche de ma chambre, ou de la sienne, peu m'importe. Je m'en fiche dans tous les cas. Je voudrais dormir et ne jamais me réveiller.

— Pleurer ne fais pas de toi quelqu'un de faible. Ça te permet d'évacuer et de penser à autre chose, et boire autant de verres ne sera jamais la solution. Pourquoi crois-tu que je t'ai demandé si tu irais mieux après ce verre ?

— Tu ne m'as pas empêché de boire, je réplique d'une voix grave.

Et je hausse vivement les sourcils. Je fais n'importe quoi avec mon visage, c'est déplorable.

— Je ne suis pas ton père, répond-il avec indifférence.

C'est la goutte d'eau qui fait déborder la rivière. Je le repousse comme je peux et m'éloigne de lui en titubant, le cœur en miettes.

𝐋𝐞 𝐉𝐞𝐮 𝐝𝐞𝐬 𝐑𝐨𝐬𝐞𝐬 | TOME 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant