𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟒𝟎: Lorsque tout s'effondre.

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𝐒𝐇𝐀𝐍𝐍𝐀


𝖮'𝖡𝗅𝗈𝖼𝗄, 𝖢𝗁𝗂𝖼𝖺𝗀𝗈,
14 𝗈𝖼𝗍𝗈𝖻𝗋𝖾 𝟤𝟢𝟤𝟥.

   En face du O'Dinner dans lequel j'ai travaillé pendant des mois, j'hésite. Il est pourtant ouvert. Je vois les clients s'y installer. Mais ce qui traumatise mon esprit, c'est le ruban jaune et noir, usé par le temps, et à moitié déchiré, traînant à l'entrée du dinner. C'est ça qui m'envoie une onde de choc complètement bouleversante. Il faut décidément que je me fasse violence. Je vais passer ici tous les jours. Ou devant le parc. Ou devant chez moi. Et dans toutes ces situations, je ne serais pas dans un bon état. Alors autant arracher le pansement tout de suite, ravaler la boule qui m'obstrue la gorge et faire fi du passé.

Quand j'entre, la clochette retentit à mon arrivée. Au départ, personne ne fait attention à moi. Tous concentrés sur leurs plats, ou sur leurs tâches, ils ne remarquent qu'à peine que je suis plantée au milieu du restaurant. Enfin, jusqu'à ce qu'une voix féminine ne m'interpelle.

   — Shanna ?

   C'est Latisha. Et mon simple nom, balancé au hasard dans le dinner, déclenche une réaction en chaîne. Le silence qui suit me désespère. Tous les regards convergent naturellement sur moi. Je remarque que même celui de Quincy Brown, le patron, est rivé sur ma personne. Il y a eu des changements par ici. Quincy ne venait jamais auparavant. Enfin, c'est peut-être normal. Son dinner a été attaqué. Mais ce qui me choque c'est qu'il ne me fait aucune remarque cinglante, pour me reprocher mon absence. Il n'ose dire un mot. Et venant de lui, c'est très surprenant. C'est comme s'il me regardait avec une peur dans les yeux... et quand j'observe le reste de la salle, le constat me coupe le souffle.

   En fait, tout le monde m'observe dans un silence de mort, les yeux transis par l'angoisse. J'ouvre la bouche, en vain. Aucun mot ne sort de ma bouche. Heureusement, Latisha vient à ma rescousse dans un soupir éloquent.

   — Vous êtes cons quand vous vous y mettez, souffle-t-elle en sortant de derrière le comptoir pour venir à mon niveau. Viens, suis-moi. Je prends une pause.

   Quincy ne bronche même pas quand elle m'attire à sa suite, vers les cuisines, mais surtout vers la porte de la petite cour. La pause clope se fait là-bas, même si je ne fume pas. Y revenir me perturbe un instant, mais ce n'est pas pire que la réaction que je viens de provoquer plus tôt.

   — Et ben, ma belle. Il s'en est passé, des choses, hein ? me taquine-t-elle.

Je ricane, pour détendre l'atmosphère et me détendre moi-même par la même occasion. Latisha s'installe sur un muret, en me faisant les gros yeux.

— Tu sais que j'ai du travaillé deux fois plus ? ironise-t-elle. Tu vas me le payer !

Quand on éclate de rire toutes les deux, elle ne sait pas que ce qu'elle dit va bientôt s'avérer vrai.

— Le O'Dinner a rouvert vite ? questionné-je, ne sachant plus à quoi m'attendre.

Elle hoche la tête.

— Probablement deux semaines après... après Trevor, dit-elle en déglutissant. T'étais encore là, mais la police est restée même après ton départ. Enfin c'était compliqué pour eux, les gamins les viraient rapidement. C'est peut-être pour ça qu'ils se sont éternisés. Ou peut être qu'ils en avaient rien à faire.

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