• CHAPITRE QUATRE-VINGT-DOUZE •

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– H –

— Hayden  ! hurle la ballerine dans mon dos.

Aurais-je dû m'attendre à autre chose de sa part ? Bien sûr que non... Je me dégage violemment de l'emprise de celui qui lui sert de colocataire et je pivote vers elle, un sourire glacial figé sur mes lèvres.

— Je savais que tu serais incapable d'accepter les termes de notre accord.

Ma voix résonne, froide et tranchante, comme taillée dans un iceberg. Une fois de plus, Angelina Carter me rappelle que la chose qu'elle voit en moi, c'est ce monstre abject.

— Si celui-ci impliquait de t'en prendre physiquement à quelqu'un, tu te doutais que je ne serais pas aligné avec ça  ! réplique-t-elle.

Une déferlante de colère me submerge et je lutte pour ne pas laisser le fameux monstre que tout le monde s'attend à voir prendre le contrôle. À la place, je ricane avec amertume et ajoute :

— Merci pour le gage de confiance dont tu fais preuve une fois de plus à mon égard.

— Hay...

En un claquement de doigts, la rage et la peine s'entremêlent dans un cocktail explosif et je n'arrive plus à les contenir.

— Quoi que je fasse, vous êtes tous volontaires pour me rappeler constamment que je ne suis qu'une putain de grenade prête à exploser au moindre tremblement. Vous devriez songer à arrêter de me dégoupiller et de me secouer dans tous les sens plutôt que de spéculer sur la façon dont je pourrais réagir !

Le regard émeraude de la ballerine me pénètre d'une manière étrange et c'est à cet instant que je réalise que j'ai laissé entrevoir ma peine malgré moi.

— Hayden, souffle-t-elle doucement. Ce n'est pas ce dont il s'agit et tu le sais très bien.

Je n'en ai plus rien à faire. Qu'ils pensent tous ce que bon leur semble. Je suis simplement las d'être le méchant de l'histoire.

— Garde ta salive, Angelina. Je me suis mise à nu en tentant de t'expliquer comment fonctionnaient les rouages de mon cerveau, mais il semblerait que tu n'aies jamais compris finalement... comme personne d'ailleurs.

J'empoigne mon casque et ma veste, prêt à m'éloigner d'ici.

— Quand tu verras ton frère, passe-lui un message de ma part. Dis-lui de ne plus jamais croiser ma route, je crache à l'attention de Stella.

Je la contourne pour sortir, mais je sens que ses doigts m'agrippent pour me retenir. Tout mon corps se tend, son contact m'est aussi insupportable qu'une brûlure acide. Je tourne la tête vers elle et elle a au moins la présence d'esprit de me lâcher et de reculer. Inspirer la crainte ne me fait plus ni chaud ni froid ce soir.

— J'aurais dû tenir la promesse que je t'ai faite le jour de mon anniversaire, mais je compte bien l'honorer aujourd'hui. Considère que tu devras te dégotter un nouvel emploi dès demain matin.

Elle recule et porte la main à son cœur et j'en conclus qu'elle a senti la morsure de la lame froide s'enfoncer jusqu'aux tréfonds de son âme. Parfait! Il n'y a aucune raison pour que je sois le seul à éprouver des émotions douloureuses.

— Tout ce que je désirais, c'était retrouver la stabilité dans notre relation, celle que nous avions enfin trouvée avant l'incident avec Judith, dit-elle d'une voix brisée.

Mes poings se contractent le long de mon corps et je siffle entre mes dents serrées :

— Ne relaye pas ça au rang de simple incident.

BALLERINAWhere stories live. Discover now