• CHAPITRE CINQUANTE SEPT •

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— A —

Kris est sagement accoudée au bar depuis ce matin, plongée dans ses révisions pour ses futurs partiels. Je passe papoter avec elle dès que j'ai un petit moment de libre. La journée précédente a été plutôt calme, mais celle-ci s'annonce plus mouvementée. D'abord, parce que le vendredi est un jour qui excite particulièrement le commun des mortels et ensuite parce que Monsieur bleu acier vient tout juste de franchir les portes du restaurant pour le service du midi. Il ne me jette pas un regard et s'installe à sa place habituelle, qui est, sans surprise, l'une de mes tables. Triple merde ! Je jure dans ma langue natale tout en feignant une indifférence totale avant de me diriger vers lui.

— Bonjour, je lance avec mon plus beau sourire.

— Bonjour Angelina.

Je ne me laisse pas décourager par son air maussade et je continue.

— Eh bien, que puis-je te servir, Monsieur Grincheux ?

Pitié, pas d'esclandre, Monsieur Hyde! Je prie intérieurement en jetant un coup d'œil à Kris, qui n'a encore rien remarqué.

— Si j'ai bien compris, lorsque je ne donne pas de nouvelles pendant quelques jours parce que je suis débordée de travail, c'est la fin du monde, mais quand c'est toi, nous agissons comme si de rien n'était ?

Un point pour lui! Je ne peux pas le nier, depuis l'arrivée de Kris, j'ai complètement oublié Monsieur bleu acier. Je ne l'ai pas contacté et pire encore, je n'ai pas répondu à ses messages ni à ses appels.

— Je suis désolée, j'étais occupée.

— Occupée ? Non, Angelina, il semblerait que ce ne soit pas une excuse valable lorsque je l'invoque, donc elle ne le sera pas non plus pour toi.

— Tu es... vexé ?

— Pas du tout. Cela m'importe peu pour tout te dire, mais si tu désires mettre un terme à notre arrangement, j'apprécierais un minimum de courtoisie de ta part.

— Je ne mets fin à rien du tout ! J'étais simplement occupée !

— Oh, je vois, je suppose que je devrais m'en contenter. Tu ne devrais pas faire à autrui ce que tu ne voudrais pas que l'on te fasse.

— C'est inutile de monter sur tes grands chevaux, après tout nous n'avions convenu de rien quand je suis partie.

— Ne nous emmène pas sur ce terrain alors que c'est toi qui m'as expressément demandé de ne pas te laisser sans nouvelles  ! crache-t-il en claquant bruyamment son verre sur la table.

— Oui, mais tu n'as rien exigé en retour ! je me défends lamentablement. Tu ne cesses de me dire que tu n'as aucun compte à me rendre, alors je suis en droit de ne pas t'en rendre non plus. Nous étions d'accord pour n'être que le partenaire sexuel du mois de l'autre et rien de plus.

La colère inonde ses pupilles et ses doigts se crispent autour du verre qu'il tient toujours fermement. J'ai conscience de creuser ma propre tombe. Décidément ! Nous ne pouvons pas rester cinq minutes dans la même pièce sans que cela dégénère du début à la fin !

— Partenaire sexuel du mois ? répète-t-il. Puisqu'on parle de comptes, tu devrais mieux les tenir. Ça fait bien plus d'un mois maintenant et si tu cherches à me provoquer, tout ce que tu réussis, c'est à m'échauffer encore plus.

— Je ne cherche pas à te provoquer, mais tu n'as pas à venir sur mon lieu de travail pour me faire des reproches !

— Alors, cesse d'agir comme une gamine.

BALLERINAWhere stories live. Discover now