• CHAPITRE VINGT-NEUF •

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— A —

«Neuf jours et dix-huit entraînements plus tard...»

Pour la cinquième fois depuis le début du repas, je relis ce message de Monsieur bleu acier. J'aimerais trouver sa petite blague drôle, mais c'est très loin d'être le cas. Voilà la seule chose qu'il se décide à m'écrire après des jours de silence ! Ce culot !

— Il est déjà mort, tu sais.

La voix d'Evan m'extirpe de mes pensées et je reporte toute mon attention sur lui. À en juger par l'expression amusée d'Alec, cette remarque m'était bel et bien destinée.

— Le poisson, poursuit-il en pointant mon plat du bout de sa fourchette.

— Quoi ?

— Le poisson dans ton assiette est déjà mort. Il est donc inutile de le fusiller du regard plus longtemps.

— Je ne...

— Tu veux en parler ?

Sa question me prend au dépourvu. Depuis que ce mur invisible s'est dressé entre nous, nous n'avons pas échangé plus de quelques mots. La plus longue conversation que nous ayons eue ces dernières semaines n'a pas duré plus d'une minute. Je ne sais même plus comment nous en sommes arrivés là ni même pourquoi nous avons laissé la situation s'envenimer de la sorte, mais ce que je sais en revanche c'est que tout ceci me pèse chaque jour un peu plus.

— De ? je demande.

— De la raison ou de la personne qui te fait froncer les sourcils ainsi.

— C'était de la publicité.

— Ah oui ?

Il croise les bras négligemment et s'enfonce un peu plus dans le dossier de sa chaise.

— Tu es beaucoup de choses Angy, mais tu n'es certainement pas une bonne menteuse. Je préférerais encore que tu me dises de m'occuper de mes oignons plutôt que de voir que cela ne te fait ni chaud ni froid de me mentir ouvertement.

— Je vais chercher de l'eau ! scande Alec avant que je ne puisse réagir.

Je le regarde s'emparer de la carafe à moitié pleine avant de quitter la table.

— C'est ma vie privée.

— Voilà qui a au moins le mérite d'être honnête, rétorque Evan entre ses dents.

— Aux dernières nouvelles, savoir ce qui me préoccupe ne fait plus partie de tes priorités, je lance acerbe.

— Tu veux rire ?

— Je suis on ne peut plus sérieuse.

— C'est justement parce que je me souci de ton bien-être que nous en sommes là aujourd'hui.

— Eh bien, laisse-moi te dire que tu as une drôle de façon de le montrer !

— Quant à toi, tu as une drôle de façon de faire part de ta reconnaissance aux gens qui t'entourent.

— La carafe est...

— Oh... Mais je te remercie alors de surveiller mes faits et gestes pour mon bien-être ! j'ironise plus venimeuse que jamais.

— Quelqu'un veut des glaçons ? C'est une bonne idée des glaçons, non ? fait Alec plus pour lui-même que pour nous.

Il disparaît de nouveau avec la carafe non sans un regard médusé dans ma direction. Je n'ai pas besoin de ça pour comprendre que je suis allé trop loin avec cette réflexion déplacée.

BALLERINAWhere stories live. Discover now