• CHAPITRE SOIXANTE-NEUF •

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— A —

Alors que je termine de parfaire mon maquillage, une question obsédante tourne en boucle dans mon esprit. Comment est-il possible qu'aucun pressing n'ait été disponible dans cette ville au moment même où j'avais le plus besoin de leurs services ? J'ai sillonné les rues, enchaînant les enseignes pendant ma pause déjeuner sans succès. J'ai donc dû me résoudre à faire les magasins pour trouver une robe de remplacement à la hauteur de celle que j'ai endommagée. Sans surprise, je n'ai pas réussi à dénicher une pièce aussi spectaculaire, mais j'ai fini par jeter mon dévolu sur une magnifique robe noire à la coupe élégante.

J'examine ma tenue complète et souris à mon reflet. L'association n'est peut-être pas aussi sophistiquée que celle que me proposait Monsieur bleu acier, mais je suis fière du résultat. Les chaussures et la pochette qu'il m'a offertes se marient harmonieusement avec ma robe et mettent en valeur chaque détail. Je fouille une dernière fois dans ma trousse de maquillage pour en sortir un rouge à lèvres rouge vif, assorti à la semelle écarlate de mes chaussures, et je l'applique avec précision. Mes cheveux sont soigneusement coiffés et mon maquillage est irréprochable. Une étincelle d'assurance danse dans mes yeux lorsque je recule d'un pas pour m'admirer de la tête aux pieds. J'aime le reflet que me renvoie le miroir. Je me sens prête pour la soirée à venir. Toutefois, mon assurance vacille d'un coup sec au moment où je consulte mon téléphone et que j'aperçois un message de Monsieur bleu acier : « Je suis là. » La peur prend le pas sur l'excitation malgré moi. Je suis reconnaissante envers lui pour son geste généreux, mais même si je n'ai pas eu l'occasion de la porter, j'ai bien l'intention de lui rembourser intégralement la robe que j'ai abîmée.

Je prends une profonde inspiration et je décide de mettre temporairement de côté mes inquiétudes. Je me parfume délicatement, j'attrape la pochette et je quitte enfin la salle de bain. Absorbée par mes pensées, je percute de plein fouet Evan alors qu'il surgit de nulle part. Surprise, je m'agrippe sans réfléchir à lui pour maintenir mon équilibre. Nos yeux se rencontrent dans cette proximité inattendue et ce que je discerne dans son regard me pousse à me détacher de lui à toute vitesse.

— Excuse-moi, Evan ! Je... je ne t'avais pas vu, je bégaie.

— Angelina... tu es... sublime, souffle-t-il.

Son compliment suscite en moi un mélange troublant d'embarras et de fierté.

— J'ai fait de mon mieux ! je plaisante en pivotant légèrement sur moi-même.

— Une occasion spéciale ?

— Oui.

— Avec le crétin prétentieux ?

Je n'apprécie pas les propos d'Evan, mais je hoche la tête. Un silence lourd de sous-entendus s'installe entre nous et je détourne les yeux en cherchant désespérément une échappatoire à cette situation inconfortable. Evan, visiblement mal à l'aise lui aussi, se racle la gorge pour se donner un semblant de contenance. Il se décide à faire un pas de côté pour me laisser le champ libre et alors que je m'éloigne, je l'entends chuchoter à contrecœur : « Il a vraiment de la chance, tu sais. » Ses mots résonnent dans l'air et je marque un bref temps d'arrêt, mais je suis incapable de trouver une réponse adéquate, alors je poursuis mon chemin en silence.

La porte de l'immeuble se referme derrière moi avec un doux grincement et mon cœur s'emballe avant de descendre en flèche dans mon ventre quand Monsieur bleu acier se tourne pour me faire face. Il est l'incarnation même de la perfection. Ses cheveux, habituellement rebelles, sont désormais disciplinés en une coiffure raffinée et le costume sombre qu'il porte à l'air d'avoir été taillé à même sa silhouette. Chaque détail de sa tenue semble choisi avec une précision obsessionnelle et je me demande comment il réussit à être encore plus séduisant et élégant à chaque nouvelle rencontre. Ses yeux perçants se posent sur moi et je dois presque ordonner à mes jambes de continuer à me soutenir. Dans un mouvement d'une grâce quasi irréelle pour un homme de son gabarit, il fait quelques pas vers moi et tend son bras. 

BALLERINAWhere stories live. Discover now