Chapitre 63 - Au fond du gouffre

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Maddie fut incapable de trouver le sommeil. Elle partit s'enfermer dans la salle de bain et, assise à même le sol, enfonça les écouteurs de son lecteur de musique dans ses oreilles et mit le son à fond.

Quand les premières notes d'une chanson de Sam Smith résonnèrent, Maddie ne put contenir ses larmes. Elle laissa tomber sa tête sur ses genoux et tenta d'étouffer ses pleurs.

Nostalgique, elle écouta l'album en boucle, lui rappelant la si merveilleuse soirée du bal. Quand la fatigue la gagna enfin, elle retourna dans la chambre.

La chaleur était lourde dans la pièce et l'agitation du ventilateur au plafond n'y changeait pas grand-chose. Elle fut surprise de voir à travers les rideaux fins que la noirceur de la nuit se dissipait et avait laissé place aux premières lueurs de l'aube. Elle se colla contre la fenêtre et contempla le lever du soleil.

Lorsque ses colocataires de chambre émergèrent de leur sommeil, Maddie se roula dans sa couette et fit mine de dormir.

— Madeleine ? tenta Janice en posant délicatement sa main sur le dos de la jeune fille.

— Laisse-la, elle doit dormir, sa nuit a été courte, dit Desiree.

Maddie entendit les cinq filles discuter entre elles et la porte claquer. Elle se laissa bercer par le vrombissement du ventilateur et s'endormit.

Un claquement désagréable résonna soudain, la faisant sursauter.

— Qu'est-ce que ? murmura-t-elle en entrouvrant difficilement les yeux.

Mme Mills était debout sur le seuil de la chambre alors que Mme Powell marchait, tapant ses talons contre le sol.

— Madeleine, tu es réveillée, il faut y aller ! Tout le monde va partir pour le parc !

Desiree et Janice entrèrent dans la pièce pour récupérer leurs sacs.

— Je ne peux pas, je suis malade, grogna Maddie en cachant sa tête sous son oreiller.

— C'est cela ! souffla Mme Powell en levant les yeux au ciel.

Mme Mills vint s'accroupir à côté du lit.

— C'est en lien avec cette nuit ? On m'a raconté ta dispute.

— On ne va pas y passer la journée ! s'impatienta Mme Powell en s'approchant.

Maddie enleva le coussin et fixa ses professeures. Son visage était pâle, défait et creusé de fatigue. Ses yeux étaient rouges, gonflés et cernés.

— Il faut avouer que tu n'as pas bonne mine, dit Mme Powell, l'air choqué.

— Je l'ai entendue vomir cette nuit, c'est vrai, elle est malade, confirma Janice.

Elle murmura à l'oreille de Desiree.

— Elle me fait trop de la peine.

— Bon, tu peux rester ici, accepta Mme Powell.

— Je vais t'apporter le sac repas qui est prévu pour chacun, proposa Mme Mills. On viendra te chercher dans l'après-midi avant de prendre la route pour rentrer.

— Merci, murmura Maddie en fixant Janice.

Cette dernière lui adressa un signe de tête. Elle était peinée des moqueries qu'elle avait entendues dans la salle du petit déjeuner. Quoi qu'il se soit passé entre Sally et Maddie, et avec le reste des Venus, elle ne méritait pas tout ce qui était dit sur elle.

La chambre se vida à nouveau et Maddie se retrouva seule. Pour peu de temps. La porte se rouvrit et Maddie entendit quelqu'un arriver d'un pas énergique.

— Merci Mme Mills, lança-t-elle en l'imaginant revenir avec son déjeuner.

— Non, ce n'est pas elle, répondit une voix masculine familière.

Maddie fit un bond dans son lit et son visage afficha une expression d'incrédulité. Anthony prit la seule chaise disponible et la tourna vers Maddie avant de s'y installer.

— J'ai besoin que tu m'écoutes sans me couper, imposa-t-il, déterminé.

Elle agita son index en signe de refus.

— Je n'ai pas la force.

— Tu vas la trouver parce que je commence. Je n'ai rien à me reprocher. Là où j'ai péché, c'est de ne pas être parti au moment où les Venus sont entrées. Mais je n'ai rien fait.

— Anthony ! s'écria Maddie. Je ne peux, et je ne veux, pas t'écouter.

— Mais pourquoi ? T'en fais trop là, Maddie, sérieux ! s'emporta-t-il. J'ai couché avec personne, je n'ai même embrassé personne !

Le teint de Maddie passa du pâle au rouge écarlate.

— Non, mais dites-moi que je rêve ! Pour une soirée entre Mercures, c'était une vraie soirée entre mecs, hein ? Et Adèle allongée sur toi, c'était un bonus, c'est ça ?

Anthony ouvrit la bouche pour répondre, mais la voix de Mme Mills s'éleva.

— Anthony Ryan-Tate ! Vous n'avez rien à faire ici.

Elle déposa le sac-repas sur un coin de la table et fit signe à Anthony de la suivre.

— Madeleine, vous nous appelez s'il y a quoi que ce soit. Sinon, on se voit cet après-midi pour repartir.

— Oui, Mme Mills, fit Maddie d'une voix faible.

— On est partis ! lança la professeure à l'attention d'Anthony.

Elle attendit qu'il se lève et quitte la chambre pour faire de même. Elle adressa un petit signe de la main à Maddie et referma la porte. Maddie s'allongea sur le dos en se demandant ce qu'elle allait pouvoir faire de sa journée.

— Un bain ! s'exclama-t-elle à haute voix.

Elle partit ouvrir les robinets au-dessus de la large baignoire. Elle s'assit sur le bord et se perdit dans ses pensées. Elle restait obnubilée par l'image d'Adèle couchée sur Anthony qui affichait un large sourire.

Quand la baignoire menaça de déborder, elle ferma le robinet et s'immergea dans l'eau chaude jusqu'au menton. Elle laissa ses bras flotter et vida son esprit. Tout ce qui importait, c'était le plaisir qu'elle ressentait à cet instant précis.

Une bonne heure plus tard, elle se rua, en serviette, sur le sac apporté par Mme Mills et avala son contenu en un temps record. Elle fouilla dans ses affaires et avala l'ensemble des provisions qu'elle avait apportées de chez elle. La baignade lui avait creusé l'appétit. Et l'avait aussi détendue au point de ne pouvoir résister au sommeil qui la gagnait. Elle se traîna jusqu'au lit et s'endormit profondément.


MaddieWhere stories live. Discover now