CHAPITRE TROIS

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Étrange sauvetage

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Le reste de ma première semaine à Barrows se passe sans le moindre accro. J'enchaîne les cours avec une étrange monotonie et seule la littérature me passionne réellement. Apolline n'apprécie toujours pas Monsieur Steven, même si elle fait des efforts pour être plus attentive. J'ai rencontré la fameuse Madame Treler – apparemment la meilleure enseignante d'histoire-géographie de tous les Etats-Unis – lors du deuxième jour de cours. Elle a l'air d'aimer ce qu'elle nous apprend et le fait avec une gentillesse parfois presque naïve mais je suis bien obligée d'admettre qu'elle est douée. L'histoire n'a jamais été l'une de mes matières préférées, j'ai tendance à vite m'ennuyer en classe mais étrangement avec notre professeur le temps passe plutôt vite. En trois heures de cours avec elle, j'ai seulement regardé par la fenêtre deux ou trois fois.

J'étais certaine de gagner mon pari jusqu'à vendredi. Le dernier jour de la semaine fut très dur psychologiquement. Il a plu jusqu'en début d'après-midi et avec mes colocataires, nous avons dû rester cloîtrées dans l'aile des filles pendant les récréations. Entendre le son de la pluie contre la fenêtre et voir le jardin trempé m'a déprimée. En Californie, nous ne sommes pas habitués à avoir un si mauvais temps en plein été. Je crois que tous les élèves ont été impactés par la pluie. La tension était palpable dans les salles de repos et des disputes ont éclaté sans raison apparente.

J'aurais pu tenir le coup face au mauvais temps sachant que nous finissions tôt Apolline et moi si seulement tout un tas d'autres facteurs n'avaient pas joué contre ma volonté. Le fait de ne pas avoir le droit à nos téléphones portables pendant toute la semaine, nous laissant ainsi sans nouvelles de nos proches, ajouté aux horaires strictes et aux nombreuses interdictions, m'a vraiment fait perdre pied. J'avais tout à coup l'impression d'être prisonnière de Barrows, comme si je ne décidais plus de ce que je faisais.

— Apolline ? l'appelé-je pour qu'elle lève les yeux de son livre.

Il est un peu plus de seize heures et nous sommes seules dans la salle de repos. Motivée, mon amie a décidé de commencer ses devoirs pour être tranquille ce week-end. J'ai essayé de suivre son initiative, en vain, me heurtant à une impossibilité à me concentrer plus de quelques minutes sur un problème. Pourtant, généralement, je termine mes exercices de mathématiques assez rapidement.

A l'entente de son prénom, Apolline relève la tête et sonde mon visage de son regard noisette pour chercher à anticiper ce que je vais lui dire. C'est un tic chez elle. Elle essaie toujours de deviner les choses avant qu'elles arrivent, ce qui lui donne toujours une longueur d'avance sur les autres.

— Un problème Cassandra ?

— Tu sais concernant ce qu'on a dit lundi..., je commence avec hésitation en prenant soin de choisir mes mots. Je crois que tu avais raison.

— A propos de ? me demande-t-elle innocemment avec un sourire en coin.

Elle sait très bien où je veux en venir et je la vois déjà se délecter de sa victoire. Pour me compliquer les choses et pour que je lui dise clairement que j'ai perdu mon pari, elle ne m'aide en rien et fait semblant de ne pas comprendre où je veux en venir. Merci Apolline.

— Eh bien, après une semaine de cours, je ne trouve plus Barrows aussi bien. Enfin, ça a l'air d'un bon établissement mais il est tellement sévère et je m'ennuie déjà.

— Attends un peu que l'hiver arrive et tu seras complètement déprimée, me prévient Apolline. Honnêtement, en été, avec le jardin ça passe mais l'hiver ! Oh l'hiver c'est l'enfer. On s'entasse dans les bâtiments en cherchant des endroits libres et calmes pour être avec ses amis et je peux te dire que c'est quasiment impossible.

DES NUITS PLUS CLAIRES QUE TOUS VOS JOURS [IS HE A BAD BOY ?]Where stories live. Discover now