CHAPITRE QUATORZE

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La boxeuse

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Avant de sortir de la chambre, je vérifie que mes colocataires dorment. Il est aux alentours de onze heures du soir et tout est silencieux. Seules les respirations régulières des filles troublent le calme qui règne dans la pièce. Elles ont toutes l'air endormies. Ça ne m'étonne pas après la nuit de samedi que nous avons passée. D'un accord commun, Apolline, Rosalyn et moi-même nous sommes décidées pour nous coucher tôt afin de récupérer un maximum. Elles sont très vite tombées dans les bras de Morphée alors que de mon côté, je n'ai pas réussi à trouver le sommeil. J'ai entendu Sacha rentrer une petite heure auparavant, et pour éviter une confrontation à cette heure avancée, j'ai fait semblant d'être endormie. J'ai assisté à son passage dans le royaume des rêves tandis qu'il m'était toujours impossible de trouver le repos dont j'ai inexorablement besoin.

Puisque personne ne se réveille, j'enfile le plus discrètement possible un leggings noir et un top assorti avant de me diriger vers la sortie sur la pointe des pieds. Je déverrouille la porte en bois blanc de la chambre et je l'entrouvre légèrement, juste assez pour laisser passer mon corps. Pour mon plus grand malheur, le battant de la porte émet un grincement sonore lorsque je le pousse, rompant le silence de la chambre. Je grimace en me retournant vers les silhouettes immobiles de mes colocataires, allongées dans leur lit. Je retiens ma respiration quand je perçois un mouvement subite de Sacha. Heureusement pour moi, ce n'est qu'une fausse alerte : elle s'est seulement retournée dans son sommeil.

Je soupire de soulagement en me glissant à travers l'embrasure de la porte. Cette fois-ci, c'est avec le plus de précautions possibles que je referme le battant, n'émettant qu'un discret bruit qui passe inaperçu.

Comme le couvre-feu est passé, tout est silencieux dans les couloirs. Aucune lumière n'est allumée et puisque je n'ai pas pris de lampe de poche ni mon portable, je suis obligée d'avancer à tâtons, guidée par la simple lueur émise par la lune. Je reste prudente dans mes déplacements pour ne pas attirer l'attention d'élèves qui pourraient ne pas dormir à cette heure avancée de la nuit. Si on me trouve à arpenter les couloirs, je risque une grave sanction et ce n'est en aucun cas ce que je souhaite alors j'essaie d'être la plus discrète possible.

Tout est extrêmement calme. D'habitude, les longs corridors du lycée sont bondés et pris d'assaut par des bandes bruyantes mais à onze heures du soir, les allées sont paisibles et apaisantes. Marcher ainsi dans l'obscurité est reposant. Mon énervement s'atténue et le poids qui jusqu'alors étouffait ma poitrine, s'évapore pour me laisser respirer. Je devrais être morte de peur de défier ainsi l'une des règles fondamentales de l'établissement, pourtant je ne le suis pas. Une pointe d'euphorie commence même à m'envahir.

Lorsque je débouche dans le jardin, la fraîcheur nocturne m'assaille et termine de me réveiller. Je prends une grande inspiration en regardant les étoiles qui parsèment joliment le ciel sombre pour essayer d'oublier ma colère. Ma sœur et moi faisions beaucoup ça quand j'étais petite et que je n'arrivais pas à dormir. Elle me sortait de mon lit et nous allions sur le balcon de sa chambre pour observer la voûte céleste. La pureté et la magnificence du ciel nocturne m'apaisaient et généralement je m'endormais contre Scarlett, sous les étoiles et les constellations.

Maintenant ce temps est révolu. Je suis seule face au spectacle extraordinaire de l'espace. Ce qui n'est pas plus mal vu les circonstances de mon agacement. Un peu plus tôt dans la journée, ils ont osé m'envoyer un SMS. Dès que j'ai lu le numéro qui s'affichait dans mes messages, j'ai supprimé la conversation sans même regarder ce que mes « parents » m'avaient écrit. Il s'agissait sans doute d'un long message rempli d'excuses bidons et de fausses explications. Le culot dont ils ont fait preuve en tentant de me contacter m'a énervée au plus haut point. Depuis ce mystérieux SMS, je tourne en boucle des passages de mon enfance et de mon adolescence pour trouver des indices sur mon adoption. J'ai beau me repasser toutes les discussions dont je me souviens, je ne trouve aucune allusion à ce secret, ce qui a pour conséquence de m'agacer encore plus. Je suis tellement obnubilée par la recherche de réponses - qui ne viendront sans doute jamais -, que je ne parviens pas à trouver le sommeil. Il m'a totalement désertée, laissant en moi un mélange de triste et de colère que j'ai besoin d'extérioriser, sous peine d'exploser.

DES NUITS PLUS CLAIRES QUE TOUS VOS JOURS [IS HE A BAD BOY ?]Where stories live. Discover now