Chapitre 12 {Ivy/Kay} - Cache-Cache

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« La fidélité d'un ami est la sûreté de nos secrets, elle est comme une pierre précieuse. »

Axel Oxenstierna

P.O.V Ivy's

Quand certains ont la force d'affronter les épreuves, moi je prends la fuite. La première m'a fait totalement déconnectée de la réalité parce qu'elle était bien trop éprouvante pour l'accepter. Me réveiller dans un lit d'hôpital en ayant perdu mon frère et mes jambes, en même temps, c'était trop pour une seule personne. J'ai coupé mes synapses et j'ai laissé le temps faire son œuvre même les blessures ont pris énormément de temps pour cicatriser. Elles ne le sont pas encore, à ce jour mais j'avance, du moins, j'essaie.

Alors quand je me suis retrouvée face à cette magnifique femme dans l'appartement de Kay, je ne me suis pas sentie assez forte et j'ai su qu'il fallait que je réagisse si je ne voulais pas retomber dans cette spirale infernale par laquelle je suis passée. La léthargie puis une rage sans limite contre le monde entier mais surtout contre le responsable qui m'a tant pris dans ce foutu accident.

C'est toute cette rage envers un inconnu dont je ne sais rien, qui m'a permis de tenir quand j'ai sorti la tête de sous l'eau et que j'ai repris ma respiration. Le dossier d'enquête ne m'a été d'aucune utilité pour connaître son identité mais qu'est-ce que ça pourrait faire comme différence de toute façon ? Aucune. Je le haïrais toujours autant et ça ne me rendra pas mon frère ni mes jambes.

Voilà comment en un fragment de seconde, j'ai pris ma décision de venir m'installer chez Charly. Cette jeune femme que je connaissais à peine mais qui m'a accueilli sans poser de questions. Un mois que ça dure. Un mois que je squatte chez elle et qu'elle me laisse faire car j'ai l'impression que ça lui fait autant de bien qu'à moi, d'avoir de la compagnie. Son appartement se trouve un étage en dessous du mien et ça m'évite de croiser Kay.

Je ne réponds à aucun de ses messages, ni de ses appels. La chance doit être de mon côté, enfin si on peut appeler ça ainsi car pas une seule fois en un mois, on ne s'est croisé dans l'ascenseur ou dans les couloirs. J'ai conscience que c'est ridicule que je me cache comme ça et que je suis la première à penser qu'on doit rester amis mais ça m'a fait mal de trouver cette fille chez lui.

Il me faut du temps pour digérer tout ça, tout comme il m'en faut pour pardonner le sale coup que mon boss m'a fait. Il n'a pas daigné me fournir une explication pour le week-end à Paris, comme si j'étais indigne d'obtenir une réponse. À chaque fois que j'essaie d'aborder le sujet, il s'arrange pour avoir autre chose à faire et court dans tous les sens. J'ai envie de lui arracher les yeux et aussi de lui rouler dessus avec mon fauteuil.

Quel connard !

Sinon en dehors de ça, on peut dire que les choses se passent plutôt bien. Je ne dirais pas que je vais bien mais plutôt que je vais mieux qu'en étant enfermée dans cette chambre d'hôpital dans le Minnesota. La présence de Charly y ait pour beaucoup car comme avec Kay, le contact est aussitôt passé entre nous. C'est tellement fluide avec elle, sans prise de tête. Il n'y a qu'à voir la décoration de son appartement. Chaque mur est peint d'une couleur différente comme si elle voulait rendre cet endroit lumineux, joyeux et c'est réussi. On se sent bien chez elle. C'est vivant. Je suis toujours aussi amusée de voir toutes ces couleurs et sa décoration vintage qui détonne avec le reste. C'est son style à elle.

Mon amie ne m'a posé aucune question sur ma présence ici, elle doit sentir que je ne suis pas encore prête à en parler. Au lieu de ça, on en profite pour se faire des soirées plateaux télé sur le canapé quand je ne rentre pas épuisée après une nouvelle séance de kiné ou après mon boulot. Mine de rien, lire des manuscrits à longueur de journée, c'est épuisant. Certes ce n'est pas physique mais je vais finir par avoir des doigts tellement musclés à force d'écrire  mon avis sur un carnet et de taper sur le clavier de mon ordinateur, que je pourrais tordre un fil de fer d'une simple pression du petit doigt.

PersévéranceWhere stories live. Discover now