Chapitre 16 {Arès/Ivy} À corps perdu

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« On voit parfois plus clair dans celui qui ment que dans celui qui dit vrai. La vérité comme la lumière aveugle. Le mensonge, au contraire, est un beau crépuscule qui met chaque objet en valeur. »

Albert Camus.

P.O.V Arès's


Je viens de lui mentir, à l'instant.

Mais un mensonge de plus pour protéger n'est pas vraiment considéré comme un mensonge, n'est-ce pas ?

Mademoiselle Allister n'a pas besoin de tout savoir, je ne lui dois rien après tout alors pourquoi ai-je accepté son offre de soin ? Je n'ai pas besoin de son aide, non je n'en ai même pas envie mais j'ai compris en la regardant, qu'elle, elle en avait besoin.

Son regard horrifié, ses mains tremblantes et les battements affolés de son cœur que je pouvais sentir battre sans les entendre. C'est moi qui ai reçu ces coups mais c'est elle qui est dans tous ses états, c'est le monde à l'envers.

Je pousse son fauteuil jusqu'aux ascenseurs qui nous conduisent à l'étage de mon bureau. L'avantage d'être le patron, c'est que personne ne pose de questions sur le fait que vous revenez à une heure tardive et en plus de ça, la gueule fracassée.

Une fois à l'intérieur, je la laisse se débrouiller seule et m'approche de mon bar pour me servir un verre de whisky que je commence à déguster en grimaçant et lève celui-ci vers elle.

— Vous en voulez ?

— Non merci, je ne bois jamais d'alcool fort. Vous avez une trousse de secours ?

Ah oui c'est vrai, j'avais oublié pour quelle raison elle se trouvait dans mon bureau alors qu'elle a terminé sa journée. Je vide cul sec le reste de mon verre et ouvre un placard pour en sortir une trousse de secours dont je n'ai aucune idée de ce qu'elle contient car je ne l'ai jamais ouverte. Elle n'est là que par obligation de sécurité.

Je la dépose sur la table basse proche du coin détente et repars me servir un autre verre avant de revenir près d'elle pour m'asseoir sur un des fauteuils en faisant valser de gauche à droite, le liquide ambré sous mes yeux. Elle ouvre l'objet que je lui ai remis, attrape des lingettes et du désinfectant avant de s'approcher de moi jusqu'à ce que son fauteuil bute dans l'accroche du mobilier.

D'un geste de la main, sans même me lever, je le pousse pour lui laisser l'espace nécessaire pour passer. Sans un mot mais avec un regard reconnaissant, elle tapote sur mon arcade qui me fait un mal de chien. C'est douloureux et ça pique à la fois, j'ai connu mieux comme fin de soirée mais il faut dire aussi que je l'ai mérité alors je n'ai eu que le juste retour des choses.

Ce que je ne comprends pas en revanche, c'est pourquoi Mademoiselle Allister se trouve dans mon bureau, en train de se soucier de moi alors que je suis infecte avec elle, depuis le début. Ce n'est pas que je ne l'apprécie pas, c'est juste que c'est mieux ainsi. Cette barrière entre nous, est nécessaire.

Je n'ose même pas songer à mon attitude désobligeante chez elle l'autre soir et à notre rencontre impromptue dans sa douche, le lendemain matin. C'est affreusement gênant, même pour moi.

— Pourquoi est-ce que vous faites ça ? l'interrogé-je en continuant de grimacer.

— Faire quoi ?

— Ça ? Me soigner.

— Parce que vous êtes blessé et que c'est sans doute quelque chose que vous ne pouvez pas concevoir mais aider son prochain, c'est un acte tout à fait normal.

Évidemment, comme si ce n'était pas assez la merde comme ça, il faut en plus que ce soit quelqu'un de bien. Je regrette de l'avoir engagé, non pas pour ses compétences car elle fournit un travail à la hauteur de mes espérances, même plus que ça. Non ce que je regrette, c'est tout le reste. Elle dépose quelque chose sur mon arcade et passe ensuite à ma lèvre qu'elle tamponne avec la même douceur comme si j'étais une chose fragile sous ses doigts.

PersévéranceWhere stories live. Discover now