Chapitre 19

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Le 10 novembre 2013 :

« Maxime vient tous les jours me voir au studio, il ne regarde que moi (Emy m'en donne la confirmation à chaque fois que je lui demande). Peut-être qu'il est juste dans ses pensées et qu'il fixe un point devant lui. »

Le 13 novembre 2013 :

« Maxime est venu à la maison cet après-midi, il avait oublié qu'Andrew avait un match et qu'il ne serait pas là. Du coup, on est resté tous les deux le temps qu'il revienne. On a fait un jeu de cartes, j'ai gagné à chaque fois. »

- Je suis à 985 points, plus qu'une partie et je gagne ! annonçai-je triomphalement.

Il décompte les cartes qu'il a dans les mains de celles qui se trouvent sur le plateau, il a un léger sourire au coin des lèvres. Il ne proteste pas, ce qui est étrange, il ne se plaint pas non plus de perdre toutes les parties, ce qui est encore plus étrange. J'inspecte rapidement les cartes qu'il a en main.

- Attends, tu avais deux jokers et tu n'as pas posé ta dame de pique ? demandé-je suspicieuse.

- Exact. Tu as soif ?

- Pourquoi tu n'as pas posé ta dame de pique ?

- Moi, j'ai soif.

Il se lève et se dirige vers la cuisine.

- Maxime Vanden, dis-moi que tu n'es pas en train de me laisser gagner.

- Tu veux un verre aussi ?

Je prends ça pour une affirmation. J'attrape un coussin sur le canapé et le lance dans sa direction. Naturellement il esquive aisément et se prépare à riposter. Il se muni à son tour du coussin qu'il lance sur mon visage. Mais ce n'est qu'une diversion. Il en profite pour se lancer sur moi et attraper un autre coussin, plus gros, derrière moi. Sa victoire est totale, ma défaite est écrasante. Je capitule mais prends tout de même le soin de lui faire la morale.

- Ne me laisse pas gagner, sinon ça ne compte pas.

- J'étais sans doute un peu distrait, je n'ai pas dû faire attention.

Dans sa voix sonne la mélodie du mensonge, un point que nous avons en commun. Il nous est impossible de mentir, parce que tout le monde s'en aperçoit. Andrew nous taquine sans arrêt à ce sujet et ment toujours à notre place si cela est nécessaire.

Je comprends mieux avec quelle facilité Andrew a réussi à me mentir pendant tout ce temps. Il a eu beaucoup d'années pour s'entrainer et moi très peu pour réapprendre à déceler ses mensonges. J'ai à peine le temps de lire les premières lignes du prochain texte qu'un souvenir s'immisce dans mon esprit.

Nous sortons du studio ensemble. Le temps est assez frais mais le soleil est présent, pas un seul nuage ne vient gâcher l'horizon. Max consulte rapidement son téléphone.

- Drew finit son entrainement plus tard que d'habitude, on a qu'à aller au parc en attendant. On pourra se poser tranquillement, ça te dit ? propose-t-il tout sourire.

- Avec plaisir ! L'entrainement d'aujourd'hui était vraiment intensif, j'ai mal de partout, c'est horrible !

- Même ici ? demande-t-il en pinçant ma joue.

- D'accord peut-être pas partout...

En arrivant au parc on se pose dans un coin tranquille près d'un arbre, des enfants jouent dans l'aire de jeu en face. Max envoie un message à Drew pour le prévenir de notre lieu de rendez-vous. Nous parlons ensemble, comme on a l'habitude de le faire.

- Donc vous êtes bientôt prêtes pour le spectacle de noël ? demande-t-il.

- On en est encore loin, on a eu les chorégraphies mais il faut encore les travailler jusqu'à ce qu'elles soient gravées dans nos membres ! Puis retravailler tout ça avec les costumes, puis avec la troupe en entier.

- Ma mère m'a demandé quand on pourra acheter les billets pour la représentation.

- Normalement ce sera pour la semaine prochaine s'il n'y pas de retard, mais je doute que tu veuilles assister au spectacle puisque tu le vois tous les jours en boucle ! le taquiné-je.

En disant ces mots je le bouscule légèrement de mon épaule, il me renvoit le coup avec encore plus de modération, faisant resserrer l'espace qui nous sépare.

- Je n'ai jamais raté un seul de tes spectacles, je ne vais pas commencer aujourd'hui.

- Tu pourrais.

- Non.

- Si.

On éclate soudain d'un rire qui fait se retourner toutes les personnes présentes, un rire sincère et décontractant qui traduit le lien qui nous unit. Puis sans que je puisse le voir arriver, sans comprendre comment on est arrivé à cette situation, il s'approche de moi tout en hésitant un peu. Ses lèvres rencontrent les miennes et nous nous embrassons. Après quelques secondes, je recule. Je le regarde droit dans les yeux. Je ne laisse transparaitre aucune émotion, aucun sourire. J'ignore comment je dois réagir. C'est mon meilleur ami, juste mon meilleur ami non ? Il n'y a jamais rien eu d'autre entre nous... Je me lève, tout en évitant son regard, je fais semblant de remettre mon t-shirt ne sachant pas vraiment quoi faire.

- Je suis désolée, je ne peux pas...

Je m'en vais sans me retourner, sans rien dire de plus.


Mon trou de mémoireWhere stories live. Discover now