Chapitre 38

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- C'était le bureau à l'origine mais on l'a changé en chambre quand on a su que tu venais. C'est un peu à l'étroit mais ça devrait être suffisant, annonce mon père fièrement en posant ma première valise.

Je le remercie d'un sourire. La pièce est à peine plus petite que ma propre chambre chez Françoise, comme il le dit c'est largement suffisant. Un lit une place, un bureau dans le coin et une armoire qui attend mes affaires. Sarah et mon père m'aident à déposer mes deux valises dans ma chambre.

- Chéri j'ai oublié de mettre une couverture pour qu'elle n'ait pas froid la nuit ! s'excuse Sarah, tu peux aller en chercher une dans l'armoire de notre chambre, merci mon amour.

Depuis que je suis arrivée, je ne cesse d'entendre les marques d'amour qu'ils s'échangent. Je trouve cela absolument adorable et en même temps assez déroutant. Mon père a réussi à trouver l'amour et il a construit une magnifique famille.

Une fois que nous nous retrouvons seule toutes les deux elle semble nerveuse et s'apprête à dire quelque chose.

- Je tiens à être honnête avec toi, commence Sarah. Je ne veux pas qu'au moment où la mémoire te reviendra tu te dises que j'ai profité de la situation. Tu ne m'aimes pas, tu acceptes la présence des jumelles parce qu'elles n'y sont pour rien mais tu ne m'adresses pas la parole, tu me tolère à peine...

Ses paroles heurtent mon esprit, je ne voyais pas les choses de cette manière. Elle vient de m'accueillir d'une manière si chaleureuse. J'essaie de formuler une pensée cohérente, une réponse de cette nouvelle moi en contradiction avec l'ancienne.

- Je ne sais pas tellement quoi répondre... J'avais hâte de te rencontrer et je n'imaginais pas une seule seconde ce genre de situation. Avec tout ce qu'il vient de se passer, je pense que la colère que je dirigeais contre toi n'était pas fondée, et qu'elle n'a pas lieu d'être.

Elle répond par un sourire ravi, elle semble si heureuse de ma réponse que je me demande pourquoi je ne lui ai pas dit une telle chose avant.

- En plus grâce à toi j'ai un père heureux et deux petites sœurs adorables qui dessinent terriblement bien, affirmé-je en désignant les dix dessins qui ornent les murs de ma nouvelle chambre.

Elle les regarde également d'un air admiratif, un véritable regard de maman devant le travail de son enfant.

- Tu devrais aller les voir, elles se sont réfugiées dans leur chambre dès l'instant où elles ont entendu la voiture. Les jumelles ne sont d'ordinaire pas timide, c'est plutôt même le contraire, plaisante-elle. Elles ont hâte de te revoir.

Moi aussi j'ai hâte, mais j'ai aussi très peur, et ça je ne l'avouerai pas. Les dessins qui embellissent ma chambre sont tous signés de leur prénom, des flèches pointent les autres personnages, papa, maman, Cathy et même Maxime. Son personnage n'est représenté qu'une seule fois et il est paré des ailes d'un ange. J'imagine qu'on a dû le leur expliquer, elles l'avaient déjà vu quand je les connaissais. Seulement aujourd'hui je ne les connais plus.

- Je ne saurai pas les reconnaître, murmuré-je.

- Il n'y a rien de plus simple, plaisante-t-elle, la brune c'est Talya, la blonde Lola, m'informe-t-elle dans clin d'œil.

Je la remercie par un sourire, il aurait été embêtant que je ne me souvienne pas de mes petites sœurs. Je me dirige vers la chambre des jumelles, je sais qu'elles s'y trouvent grâce aux petits sons cristallins qui s'en dégagent. Aussitôt que j'entre dans la pièce, les petits sons s'arrêtent et deux paires d'yeux se fixent sur moi. J'essaie de faire un petit sourire rassurant mais elles gardent une certaine méfiance.

- À quoi vous jouez ?

Silence. Je remarque les tas de cubes empilés.

- Vous faites des constructions ?

Hochement de tête. Je prends ça comme une amélioration. Je m'assoie à leur côté et prends quelques cubes dans la boîte.

- Je peux jouer avec vous ?

Nouvel hochement de tête.

- Qu'est-ce que vous construisez ?

- Une cabane pour Poilu, reprend aussitôt Talya d'un air enjoué tandis que Lola hoche vigoureusement la tête.

- Poilu ? je demande intriguée.

Elles pointent le doigt en direction d'un petit chien en peluche blanc avec de longs poils.

- Papa et maman ont dit qu'ils nous achèteraient un vrai Poilu si on s'occupait bien de celui-là.

- Ce serait génial ! Moi aussi je peux vous aider à vous occuper de Poilu ?

Deux sourires rayonnants éclairent leur visage.

- Papa a dit que tu savais plus qui on était, déclare Talya en faisant une petite moue triste.

- C'est vrai... Pour moi c'est comme si je vous rencontrais pour la première fois, mais ça ne veut pas dire que je ne sais pas qui vous êtes ! Toi, tu es Talya, toi tu es Lola et toutes les deux vous êtes mes petites sœurs !

Je ponctue mon discours en tapotant leur petit nez ce qui provoque deux petits gloussements adorables. Elles ont l'air si heureuse de voir que je ne les ai pas oubliés que je me félicite d'avoir demandé à Sarah.

- Merci beaucoup pour vos dessins, ils me font très plaisir.

Un sourire se fixe sur leur visage tandis qu'elles poursuivent leur construction.

Mon père entre dans la pièce et sourit de nous voir toutes les trois ensembles. Il me demande encore si je ne manque de rien, si j'ai besoin de quoi que ce soit. Je m'apprête à dire non encore une fois quand mon regard s'arrête sur le petit chien en peluche que Talya tient dans ses bras.

- Il y aurait bien quelque chose... commencé-je.

- Je croyais que tu avais peur des chiens ? demande mon père en comprenant mon souhait.

- L'ancienne Cathy avait peur des chiens, mais moi je les aime bien ! affirmé-je.

Une semaine plus tard, un vrai Poilu en chair et en os arrive à la maison. Un petit chiot trouvé à la SPA sur lequel les jumelles ont craqué.


Mon trou de mémoireWhere stories live. Discover now