Chapitre 35

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Assise dans le salon, je pense à mon père qui ne devrait plus tarder à arriver.

- Est-ce qu'il est déjà là ? je demande tremblotante.

Maxime regarde derrière le rideau et secoue négativement la tête, cinq secondes plus tard je regarde à mon tour et je n'aperçois que sa chaise vide au premier rang.

- Et s'il ne venait pas ? Je ne lui ai pas demandé explicitement de venir, je lui ai juste envoyé le prospectus et le programme, peut-être qu'il n'a pas compris que c'était une invitation.

- Il va venir Cathy.

- Et s'il venait mais décidait que finalement il est mieux sans enfant ? Qu'après toutes ces années il préfère repartir sans plus jamais nous parler.

Maxime me regarde, son sang-froid pourrait presque déteindre sur moi, presque. Il me fait signe de respirer un bon coup, ce que je m'empresse de faire. Il dépose un léger baiser sur mon front pour ne pas abimer mon maquillage. J'aimerais qu'il me fasse un câlin mais il pourrait endommager ma coiffure ou mon costume et Isa, la responsable, entrerait dans une colère folle.

- Ouverture du rideau dans cinq minutes ! Je ne veux voir que les danseurs en coulisse, toutes les personnes étrangères au studio vont s'asseoir dans la salle !

Elle jette un regard d'avertissement dans notre direction et me fait un clin d'œil. Maxime sert ma main en guise de réconfort.

- Je sais que je te l'ai déjà dit mais tu es splendide. Tu vas être éblouissante ! Bonne chance ! m'encourage-t-il.

Je lui fais un sourire de remerciement et il part rejoindre mon frère, ses parents et ma mère vers le milieu de la salle. Emily se positionne à côté de moi et nous nous étirons.

- Ton paternel s'est pointé ?

- Il n'est pas encore là.

- Tu veux demander de retarder l'ouverture ?

- Non ça va aller, il reste encore un peu de temps, mon solo est dans seulement dix minutes, s'il n'est toujours pas là ce n'est pas grave, je m'en fiche.

- Menteuse, ricane-t-elle.

Je lui lance mon regard qui tue et elle me tire la langue. Elle se place en face de moi et plante ses yeux dans les miens.

- Voilà ce que tu vas faire, tu vas arrêter de regarder derrière ce rideau, tu vas rester en coulisse avec moi et on va rassurer les petits qui font leur premier spectacle, pour que ce soit le plus beau jour de leur vie. Tu vas arrêter de penser à qui se trouve ou ne se trouve pas dans la salle et tu vas aussi vivre la plus belle soirée de ta vie parce que ce soir on fait toutes les deux notre solo alors on va, et on doit être extraordinaire ! Tu vas danser comme tu n'as jamais dansé, pour toi-même, pas pour ceux qui sont venus nous voir. Ok ?

- Ce que tu peux être autoritaire ! soufflai-je en levant les yeux au ciel.

Le rideau s'ouvre et le silence se fait. Emy et moi avons réglé le problème de l'une des petites fées juste à temps pour l'entrée en scène. Plus rapidement que ce à quoi je m'attendais le tour de mon solo arrive, je me lance. Les projecteurs m'empêchent de voir qui que ce soit, je suis seule sur scène et j'adore ça. Je fermerais volontiers les yeux pour être entièrement absorbée par cette atmosphère mais Isa n'aime pas ça.

A la fin du spectacle je m'empresse de retrouver Maxime, ses parents, mon frère et ma mère qui m'attendent devant l'entrée. J'ai eu le temps de me changer et de me démaquiller avant la fin de la représentation, je ressemble de nouveau à moi. Maxime et Andrew me font de grands signes par-dessus la foule.

- Tu as été superbe ! lance Andrew quand j'arrive à leur hauteur.

Maxime embrasse le haut de mon crâne puis me fait un grand sourire. Il me dit que j'étais magnifique, ses parents approuvent. Ma mère me dit qu'elle est fière de moi.

Andrew et elle finissent par s'en aller. Je demande à Françoise où est garée la voiture mais Maxime me fait un signe que je ne comprends pas. Il bascule de nouveau la tête sur le côté et, en suivant le mouvement, je découvre mon père qui nous observe à quelques mètres. Je le reconnais immédiatement, mis à part les quelques rides qui entourent son regard, il n'a pas changé. Je verserais presque une larme de bonheur de le voir ici en chair et en os. Il a l'air de ne pas savoir quoi faire, avancer vers nous ou attendre que nous venions. Je l'aide à choisir en me jetant dans ses bras. Il est surpris quelques instants puis il me rend mon étreinte.

La porte d'entrée s'est ouverte sans que je ne m'en rende compte, trop emportée par le souvenir qui se jouait dans ma tête. Françoise se tient derrière lui, le même papa que dans mon souvenir. Son attitude est identique, il ne sait pas comment réagir. Je décide encore une fois pour lui, portée par l'impulsion de mon souvenir, je me jette dans ses bras en murmurant dans un sanglot :

- Papa.


Mon trou de mémoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant