Chapitre 51

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- Salut Cathy ! commence Nicolas en me tendant le nouveau programme, tu continues toujours le kiné le mercredi ?

- Oui.

- J'ai pensé que ce serait bien si on passait à la vitesse supérieure.

- Comment ça ? fais-je inquiète.

- Un cours ce n'est pas assez pour progresser, c'est suffisant pour ceux qui veulent faire de la danse un loisir mais pas pour ceux qui veulent faire plus, ce qui est ton cas.

- Je ne vais pas faire plus, je ne peux pas faire plus.

- Bien-sûr que si, tu es surement celle qui a le plus de technique dans cette salle.

Je m'apprête à rétorquer qu'il en sait certainement plus que moi en tant que professeur mais il me devance.

- J'ai dit celle, explique-t-il, tu es celle qui a le plus de technique. Mais ton corps n'arrive pas à suivre puisque ce n'est plus le même. Donc il va falloir que tu t'adaptes à ce nouveau corps, tu ne peux pas tout faire comme avant et c'est cela qui va être le plus difficile.

Nicolas réprimande Camille pour qu'elle arrête de faire le pitre sur les barres.

- Il y a un cours pour les adultes, mais c'est le mercredi pendant ton kiné. L'âge qui se rapproche le plus du tien serait celui du groupe du jeudi, des ados entre 16 et 18 ans. Même heure, même lieu, tu serais disponible ?

J'aimerai dire que j'ai autre chose à faire mais à la place je réponds par l'affirmative.

Ce soir-là, mon père me dépose à notre appartement où Drew est en train de prendre une douche. Les cours à la fac ont véritablement repris cette semaine et selon son emploi du temps, il a du sport tous les jours. Je lui crie que je suis arrivée et il me répond qu'il en a pour cinq minutes.

Mon regard se pose sur la pièce principale et plus précisément sur l'écrin noir qui repose au centre de la table. Un écrin que je reconnais aussitôt. Comment peut-il se trouver là, alors même que je l'avais laissé là-bas ?

Je suis toujours bloquée face à la petite boîte lorsque mon frère sort de la salle de bain.

- Comment l'as-tu eu ?

- Françoise. Tu l'avais oublié, murmure-t-il.

- Je ne l'avais pas oublié, je l'ai laissé là-bas, en même temps que lui.

Je prononce ce dernier mot dans un profond soupir. J'avais espéré pouvoir tout oublier, en laissant tout, ou presque, loin derrière moi. Sauf que ma mémoire est revenue, et avec elle tout ce qui le concernait.

- Tu m'as dit que tu étais partie pour ne plus penser à lui, tu as réussi ?

- Il revient quand je m'y attends le moins et il est toujours autant présent.

- J'ai vu une psy, annonce-t-il brutalement, pendant ton absence, parce que je n'y arrivais pas, sans lui et sans toi. Elle m'a poussé à parler de vous deux et ça m'a fait du bien. Il faut qu'on parle de lui, il faut que tu parles de Maxime.

Je tressaille en entendant son prénom, cela faisait une éternité que je ne l'avais pas entendu. Il marque un temps de pause.

- Oublier, puis faire semblant d'avoir oublié, ce n'était pas une solution, c'était pire, mille fois pire. Alors s'il te plait, parlons de lui. Moi aussi, commence-t-il, j'ai reçu une lettre de Maxime, où il me demande de prendre soin de toi, de te protéger. Je n'ai pas été à la hauteur jusqu'ici, je le serai à présent. Dis quelque chose, Cathy.

- Je l'aimais, soufflé-je les larmes aux yeux.

- Je sais, moi aussi et tu l'aimes encore, tout comme moi.

Je m'assoies sur une chaise et je prends le petit coffret dans mes mains, comme un trésor. Tous les moments de bonheur et de tristesse se rappellent à moi, sa voix résonne dans mon esprit. Des milliers de je t'aime comme prononcé à l'instant, des milliers de caresses qui semblent si réelles, des milliers de moments partagés avec lui.

Les larmes dévalent mes joues, plus abondantes que jamais. Andrew prend ma main dans la sienne, en signe de réconfort.

- Mon amour, murmuré-je comme si j'étais seule dans la pièce, tu me manques tellement.

J'entends encore sa voix dans mon esprit. Je me tourne vers Andrew, son visage reflète ma tristesse.

- Il ne sera plus jamais là, sangloté-je.

- Non, confirme-t-il, on s'y était préparé, on savait que ça allait arriver.

- Pourquoi lui ? me lamenté-je.

- Je ne sais pas Cathy, c'est...c'est comme ça.

- Il ne le méritait pas...

- Personne ne mérite de mourir.

Il me prend dans ses bras et me berce pendant quelques instants.

- Un jour il m'a avoué, explique-t-il dans un sourire, qu'il était devenu ami avec moi pour se rapprocher de toi. Il pensait que, comme on était frère et sœur, il pourrait aussi devenir proche de toi. Sauf que comme tu le sais, tu n'as pas du tout aimé me partager avec quelqu'un d'autre et tu l'as détesté.

Après un léger temps de rire, on continu de parler de lui, évoquant nos souvenirs communs ou ceux dont on ignore tout. On reparle de l'accident et je me confonds en excuse puis c'est à lui de s'excuser pour tout ce qu'il a fait à mon réveil. Je lui réponds que je ne lui en veux pas, que maintenant le plus important c'est que mon frère soit là.

On parle de tout ce qui s'est passé cet été et petit à petit on s'endort l'un contre l'autre sur le petit canapé, comme lorsqu'on avait six ans et qu'on sombrait pendant l'histoire du soir.



Mon trou de mémoireDonde viven las historias. Descúbrelo ahora