Chapitre 87

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En poussant Harry à bout de patience, Drago espérait qu'ils puissent enfin discuter honnêtement à propos de leur situation. Ça avait longtemps été leur mode de communication, se provoquer mutuellement jusqu'à ce que l'un d'entre eux finisse par craquer.

Il n'avait pas l'intention de se disputer avec Harry, mais il avait besoin de pouvoir lui parler sans cette prudence nouvelle entre eux qu'il n'aimait pas.

Depuis qu'ils s'étaient retrouvés, ils s'étaient rapprochés, très rapidement, mais ils pensaient tous les deux qu'ils n'avaient pas d'avenir. Ils ne s'étaient pas vraiment posé de questions, préférant profiter de chaque instant, et toutes les promesses qu'ils s'étaient faites n'avaient plus vraiment de raison d'être maintenant que la guerre était terminée. Maintenant qu'ils étaient libérés de leurs obligations et des menaces qui pesaient sur eux.

En fait, tout avait changé une fois de plus entre eux, puisque Harry lui avait sauvé la vie, une fois encore. Drago craignait que ça ne soit finalement un obstacle, déséquilibrant leur relation déjà fragile.

Drago n'avait aucun doute que Harry éprouvait de la tendresse pour lui, peut-être même un peu plus. Mais il avait besoin d'un peu plus que des suppositions.

Avant d'ouvrir son cœur pour Harry, il voulait être certain qu'ils étaient sur la même longueur d'onde. Il craignait par-dessus tout un autre rejet de la part de Harry.

Si ne pas obtenir son amitié lorsqu'il avait onze ans avait été un sérieux camouflet qui avait égratigné sa fierté, cette fois, si Harry le repoussait, il n'était pas sûr de pouvoir s'en remettre sans dommages.

Lorsque Harry avait pris la fuite pour s'enfermer dans la salle de bains, Drago avait été proche de paniquer. Il s'était levé malgré ses jambes encore chancelantes et la faiblesse de son corps et il s'était posté à la porte de la salle de bains. Il avait attendu devant la porte close sans savoir quoi faire pour rattraper le désastre qu'il avait lui-même causé, détestant se sentir aussi impuissant.

Lorsque Harry avait ouvert la porte, Drago était resté silencieux, toute son énergie mobilisée pour tenir debout. Harry ne semblait pas vraiment fâché contre lui et il s'était immédiatement inquiété, ses yeux dépourvus de lunettes ne pouvant pas complètement cacher à quel point il se souciait de lui.

Ses reproches montraient aussi son inquiétude et Harry se précipita pour le soutenir.

Oubliant sa fierté, Drago se laissa aller contre lui, avec un soupir soulagé. Harry le reconduisit vers le lit sans un mot et il l'aida à s'installer.

Lorsqu'il voulut s'éloigner, Drago le retint en évitant son regard.

– Je suis désolé.

Harry soupira et il se pencha vers la table de nuit pour y attraper ses lunettes. Il prit son temps pour les essuyer avec son tee-shirt, puis pour les chausser et il secoua la tête avec une légère grimace.

— Ne t'en fais pas. Tu avais raison, nous devons parler...

L'expression prudente de Harry gela le cœur de Drago et il eut un mouvement de recul involontaire, craignant les mots qui allaient être prononcés.

Harry ne sembla pas s'en rendre compte, le front plissé, perdu dans ses pensées. Finalement, il murmura, un peu hésitant.

— À chaque fois que j'ai été proche de quelqu'un, c'était... il y avait la guerre derrière. Le danger. Je... J'espérais une fin heureuse, bien sûr, mais je savais que c'était... juste un rêve.

Drago garda prudemment le silence, les mains crispées sur les draps, se sentant stupide d'avoir provoqué cette conversation. Aveugle à ses réactions, Harry haussa les épaules avec un rire gêné.

— Ce que je veux dire, c'est que maintenant que tout est terminé, je suis... perdu.

Drago haussa un sourcil perplexe et il se força à demander, la voix rauque.

— Tu veux dire que tu n'as plus besoin de moi ?

Harry sembla horrifié et il secoua vivement la tête.

— Non ! Ce n'est pas ça... Je veux... rester près de toi.

Il se tut une fois encore, le front plissé, puis il laissa échapper un grognement frustré.

— Je me sens... perdu. Inutile.

Il fallut un instant à Drago pour comprendre les paroles de Harry et il soupira.

— Toi et ton foutu complexe du héros... Tu n'as pas besoin de... faire plus. Bon sang, tu as sauvé le monde magique. Tu m'as sauvé la vie. Encore une fois. Que veux-tu accomplir de plus ?

Harry leva les yeux vers lui avec une grimace gênée.

— Et si je suis incapable de vivre normalement ? J'ai été en danger depuis mon entrée à Poudlard et je suis incapable de dire ce qu'est une vie normale.

Drago grinça presque des dents et il siffla, agacé.

— Alors quoi ? Tu veux partir chercher des aventures pour satisfaire ton besoin de sensationnel ?

Harry sursauta, comme surpris de l'hostilité soudaine de Drago, et il secoua la tête, les yeux écarquillés.

— Quoi ? Bien sûr que non ! Je dis juste que...

Harry s'interrompit avec une grimace agacée et il passa la main dans ses cheveux, tirant sur ses mèches noires en désordre. Puis il laissa échapper, avec un grognement furieux.

— Je n'ai jamais eu de vraie relation avant toi et je ne veux pas tout gâcher !

Drago se figea, stupéfait, dévisageant Harry qui semblait se torturer. En quelques mots, Harry avait étouffé toutes ses peurs et lui avait donné de l'espoir pour l'avenir. Non seulement il avait admis implicitement qu'ils étaient engagés dans une relation, mais il imaginait un avenir...

Toujours muet, il approcha de Harry et il prit son visage entre ses mains, le fixant droit dans les yeux en espérant que Harry verrait ses sentiments. Puis, il déposa une série de baisers tendres sur ses lèvres jusqu'à ce que Harry se détende légèrement et s'accroche à ses épaules.

Il s'écarta juste assez pour lui sourire et lui murmurer, le cœur battant.

— On va apprendre ensemble. Je n'ai jamais eu de vraie relation non plus, mais ça n'a pas d'importance. Je veux apprendre avec toi. Et tu ne pourras pas tout gâcher, parce que je ne te laisserai pas faire, d'accord ?

Harry eut un sourire hésitant et il hocha la tête lentement.

— Je ne te laisserai pas tout gâcher non plus.

Drago gloussa, se sentant soudain invincible et il hocha la tête à son tour. Il y aurait encore des obstacles sur leur chemin, mais il avait l'impression qu'ils pourraient tous les franchir, ensemble.

Faux SemblantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant