Un homme à l'orée de la forêt...

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    Même si l'attaque du loup géant restait dans ma mémoire, je décidai de ne plus y penser, et, surtout, de ne pas en parler en cours. Toujours dans les bras rassurants et chauds de mon père, je tremblotait de partout et il ne cessait de me rassurer à l'aide de mots doux dont il avait le secret. Il y avait des années, ma mère avait disparue. Nous l'avions retrouvée morte dans un fossée, trois jours plus tard. Elle était couverte de sang - le sien - et son visage s'ouvrait dans un dernier cri d'horreur. Pendant l'autopsie, nous avions retrouvé des traces de morsures animales - des morsures de loups. Depuis lors, mon père et moi déménagions de villes en villes. La seule évocation d'un carnage quelconque par un loup suffisait à nous faire déménager. Mais cette fois-ci, je ne voulais pas partir. 

- Cette fois, c'est allé trop loin! Nous allons leur montrer, à ces bêtes, ce que nous avons dans le ventre! se fâcha mon père. J'étais bien de son avis.

      L'image de ma mère revint dans ma mémoire, et j'imaginais le sort que ce loup-ci nous réservait. Peut-être était-ce même le même... Non, l'attaque avait eut lieu bien ailleurs. Cette ville-ci était totalement différente.

     Je m'arrachai au réconfort de ses bras et montai à grandes foulées dans ma chambre. Je claquai la porte et laissai aller mes sanglots. Ma mère me manquait tellement... Je détestais cette bête qui l'avait attaquée. Tout autant que je me détestais pour l'avoir laissée aller courir dans les bois alors que nous savions déjà que des loups rôdaient. J'avais tout fait foiré; ma vie, celle de mon père, et, accessoirement, celle de ma mère. 

     Séchant mes larmes, je me repris, et redescendis auprès de mon père. Celui-ci avait déjà téléphoné à la police, et il me prit la main quand il me vit descendre les escaliers. Il me rassura sur le fait que ce loup allait être attrappé et que ça n'arriverait plus, mais je n'écoutais qu'à moitié. Soudain, un mouvement dans la forêt attira mon attention. Il y avait quelqu'un. Une forme humaine. Je criai, et attirai mon père vers la baie vitrée. Avec stupefaction, il avisa la silhouette. Il sortit précipitemment et le héla:

- Eh! Toi, là-bas, dans la forêt! Dégage: y'a un loup qui rôde!

     La silhouette le regarda, puis se retourna et s'enfonça dans les ténèbres de la forêt. Mon père serra ma main plus fort encore, puis me ramena à l'intérieure et me fit m'asseoir sur le canapé du salon. 

- Reste là, Corinne. Je vais te préparer un bon thé. Vanille et fleur d'oranger, comme tu les aimes.

     Je hochai la tête, mais mon esprit dérivait ailleurs. Qui était cette homme dans la forêt? Pourquoi avais-je ressenti la même sensation que lorsque j'avais compris que le loup n'était pas loin? Des images de films me vinrent en tête, mais je les chassai vite. Je n'y croyais pas. Mon père revint bientôt avec ledit thé, et je bus à petite gorgée le liquide sucré et chaud. Puis, la sonnette retentit. La police était sûrement arrivée. Mon père alla ouvrire, et il accueillit les policiers dans la maisonnée. Puis, il les mena au salon, et ils vinrent vers moi. 

- Mademoiselle, vous avez assisté à l'attaque?

- Oui...

- Pouvez-vous m'expliquer votre version des faits? Nous avons déjà celle de votre père, mais en temps que témoins nous avons besoin de la vôtre.

    Je hochai la tête.

- J'aime bien faire mes devoirs dehors; avec une couverture et du thé. C'est donc ce que j'ai fait. Il devait être... quatre heure? Bref, je les ai faits. Et, quand le jour a commencé de décliner, j'ai entendu quelque chose dans le jardin. Je suis donc allée voir. Comme je n'ai rien vu de particulier, je suis revenue sur mes pas. Mon stylo était tombé dans la neige et je le cherchai quand j'ai remarqué des traces de pas dans la neige. C'était des traces de loups. Elles n'étaient pas là quand je suis allée dans le jardin. J'ai pris peur et je suis rentrée précipitemment. Mon père m'a entendue et est descendu pour voir ce qu'il se passait. Je lui ai dis ce que j'avais vu... Alors il a ouvert la baie vitrée par laquelle j'étais rentrée et il a regardé dehors... Et là, le loup a surgi. Il a traversé le jardin depuis la forêt, et mon père s'est précipité à l'intérieur. Le loup s'est écrasé contre la vitre et il a essayé de la... griffer jusqu'à ce que sa meute l'appelle... 

- Bien. Et comment était ce loup?

- Il était énorme! Je n'en avais jamais vu d'aussi gros. Sa fourrure était noire.

- Votre père m'a aussi signalé que le loup était d'une taille hors du commun. Et les traces, pouvons-nous les voir?

    Je hochai encore une fois et leur fit signe de me suivre. J'ouvris la porte vitrée presque automatiquement et les menait jusqu'aux traces, énormes, du loup. J'en profitai pour chercher mon stylo, et remarquai un endroit où la neige s'était tassée. Je farfouillai mais ne trouvai rien. Je soupirai, frustrée.

- Un probblème, mademoiselle Brown?

- Hum? Ah... Je cherche mon stylo. Il me venait de ma mère. 

- Elle est...

- Décédée? Oui. Elle a été tuée par un loup...

      Les policiers retinrent leur respiration et ils baissèrent les yeux en signe de respect. certains chuchotèrent un "désolé". Je continuai mes recherches, mais en vain. Puis, quelque chose attira mon regard. Des traces de bottes.

- Ici! Quelqu'un est venu entre temps!

      Ils se précipitèrent tous autours des traces, et deux d'entre eux suivirent les pas qui faisaient le tour de la maison pour arriver sur la rue. Là, ils se perdaient parmis tant d'autres. Le chef de la police s'agenouia. 

- Il s'agit de traces masculines. Il s'est arrêté ici, et s'est baissé. On voit que les traces sont plus profondes vers l'avant. Il a récupéré quelque chose dans la neige; regardez, il l'a fouillée par ici. 

- Mais il n'y avait probablement rien, à part mon stylo...

- Pourquoi un homme aurait-il voulu vous voler votre stylo?

     Je me tus, n'ayant aucune idée du pourquoi du comment. Tout cela semblait si bizarre... Bien sûr, mon stylo était précieux... Mais personne n'aurait pu faire de plans pour le voler... C'était ridicule! Je réfléchissais encore quand le policier déclara:

- Il fait trop noir pour voir encore quelque chose. Nous reviendrons demain. N'hésitez pas à appeler.

- Ah! Il me revient un détail. Juste après l'attaque, mon père et moi avons vu une silhouette à l'orée de la forêt. Elle était immobile et nous fixait. Quand mon père lui a crié qu'il y avait un loup, il a tourné les talons et s'est enfoncé dans la forêt...

- Il, vous en êtes sûre?

- Pas exactement... Mais sa carrure était masculine.

- Je vous remercie pour ces informations. Elles nous seront très précieuses. Je vais vous demander d'avoir votre portable allumé en toutes circonstances. Dites-le à vos professeurs demain.

    Heureusement, le lendemain, c'était mercredi. Nous aurions donc l'après-midi de libre. Mais, malheureusement, mon envie de taire l'informations sur l'attaque allait être compromise... 

     J'espèrais pouvoir ne pas être le centre de l'attention générale; je détestais ça. 

      J'allai dans ma chambre sans manger, et mon père me monta vite un plateau repas. D'habitude, je cuisinais. Mais là, il s'était surpassé. Je mangeai le contenu du plateau devant l'ordinateur, et m'endormis rapidement, la tête remplie d'images d'horreur.

Souls of Alphas Where stories live. Discover now