Rupture et passion

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      La pluie se mit à tomber, se transformant rapidement en neige quand la température baissa soudainement. Assise à ma place, en classe, je regardais le rideau blanc qui se formait derrière la fenêtre. Beaucoup, autours de moi, chuchotaient. Probablement à propos de Stephen et de moi. Et je ne pouvais même pas dire qu'il ne s'était rien passé, car je savais que j'avais éprouvé quelque chose. Le feu de la passion avait déclenché quelque chose en moi qui me faisait douter de tout, même de mon amour pourtant infini pour Ronan. Lequel des deux voudrais-je avoir jusqu'à la fin de me vie à mes côtés. Et surtout, je devrais affronter Ronan. Pourquoi affronter? Je pouvais tout à fait lui mentir. Sauf qu'il pourrait sentir que je n'étais pas honnête, et je ne voulais surtout pas perdre sa confiance.

       Jess, assise à côté de moi, jubillait. Elle pensait dur comme fer que j'étais faite pour être avec Stephen. Peut-être était-ce le cas, après tout. Je ne savais même plus ce que je devais choisir. Je savais qu'égoïstement, mon coeur trouvait ce choix très simple: deux mecs un peu dérangés, autant beaux gosses l'un que l'autre... Quoi de mieux? J'étais la plus chanceuse d'entre toutes. Oui, ça aurait été le cas s'ils n'étaient pas deux Alphas en manque de compagne, et surtout s'ils n'étaient pas si possessifs. 

        La cloche sonna, et je me levai rapidement, quittai la salle et tombai nez à nez avec Ronan.

- Tu l'as embrassé?

- Je voulais te le dire maintenant... Il m'a embrassée par surprise, et c'était très rapide...

- Mais ça t'a plu. Je le vois; je le sens. 

       Je baissai les yeux, puis les levai lentement vers lui, une expression légèrement coupable sur le visage, et lui dis, doucement:

- Oui...

       Il soupira, mais je perçus derrière son air déçu qu'il était bien plus profondément touché.

- Ecoute, je suis désolée! Je ne peux pas lutter contre mes sentiments... Tu sais très bien que c'est toi que je vais choisir!

       Il se figea, se concentra un moment sur moi, alors que les battements de mon coeur, qui s'étaient légèrement accentués, se calmaient.

- Tu mens... Tu ne sais même pas si tu vas me choisir... Je croyais que tu m'aimais autant que je t'aime... Vas-y, vas avec lui, à ce foutu Bal!

- Ronan, tu sais que c'est faux!

- Ah oui? Alors tu peux me dire pourquoi ça t'a plu?

- Parce qu'il est un Alpha! Je ne peux pas lutter contre ça et tu le sais!

- Va-t-en, Corinne. S'il te plait, va-t-en.

      Mes yeux se posèrent sur les siens, et j'y voyais le refus de me croire désormais. Des larmes vinrent troubler ma vision, et je m'en fus. Bien heureusement, c'était le dernier cour que j'avais de la journée étant donné que les professeurs allaient tous à l'enterrement de leur ancien directeur. Je sortis du collège rapidement, désertant les couloirs eux-même désertés depuis longtemps avant même notre dispute. J'étais non seulement fâchée envers moi mais aussi envers Ronan. Il n'avait pas le droit de me traiter comme il l'avait fait; c'était lui-même qui m'avait expliqué que mon attirance pour Stephen était de l'ordre naturel. Je ne pouvais rien la contre, mais il n'osait pas se l'avouer. Mais de peur de quoi? De me perdre? Il l'avait déjà fait en me disant tout cela. Il n'avait même pas essayé de me comprendre, il ne m'avait même pas écoutée... Seulement entendue. Je comprenais enfin ce que les gens voulaient dire par coeur brisé; le mien l'était. Tout du long de notre engueulade, j'avais eu le coeur serré à l'idée de le perdre, et voila qu'il se brisait de douleur. Je pouvais presque sentir les fissures intérieurs qui séparaient ma tristesse, ma douleur et mon désespoir. Bien sûr, la colère prenait une place importante en mon fort intérieur, mais je l'ignorais... Du moins jusqu'à ce que je ne me laisse aller. Il est toujours plus facile d'avoir recours à des gestes irréfléchis lorsqu'on a mal intérieurement ou physiquement. Quelqu'un qui se coince le petit doigt dans l'entrebaillement de la porte de frappera pas celle-ci même dans l'espoir de détourner l'attention de la douleur vers son poing, non pas douloureux mais coléreux? Mais là, ce n'était pas une porte que je voulais briser. C'était Ronan. Je lui en voulais pour ne pas m'avoir crue. Pour m'avoir fait tant de mal - volontairement. 

        Mais, bien que je lui veuille désormais du mal, que pouvais-je donc faire? Il m'avait littéralement jetée. Ce retournement de situation, aussi douloureux soit-il, n'était pas du tout en ma faveur. Je n'avais plus ni Ronan ni Stephen. Je n'avais plus rien. Stephen était parti, un sourire victorieux aux lèvres, et Ronan était parti, un sourire figé et glorieux aux lèvres. Il s'était débarassé de moi comme s'il s'était débarassé d'une petite amie embêtante, alors que je pensais être beaucoup plus pour lui. Une Alpha - SON Alpha. 

       Mes pas laissaient dans la neige une traînée. Quand j'expirais, une mince nuée de vapeur gelée s'évaporait dans l'air. Il faisait froid, mais j'aimais ça. J'arrivai enfin chez moi, mes larmes glacées figées sur mes joues. Je n'essayai même pas de les enlever. Je m'assis sous le porche, sur la balancelle. Il devait être onze heure, et je n'était toujours pas réveillée de ma rupture avec Ronan. Je réfléchissais, encore et encore. Que pouvais-je donc faire?

      Et soudainement, l'idée me vint. Si Ronan s'en fichait de moi, alors qu'est-ce qui m'empêchait d'être avec Stephen? Après tout, il avait déjà prouvé son amour pour moi. Ce n'était pas non plus lui qui m'avait attaquée sous forme de Loup, et il n'était pas non plus prouvé que ce soit lui qui ait écrit ce message sur mon miroir.Qu'est-ce qui me disait que ce n'était pas Ronan le méchant dans l'histoire? Après tout, ce qu'il m'avait montré, il disait ne pas s'en souvenir... Alors pourquoi avait-il ces souvenirs en tête? Et pourquoi ne les voyait-il pas lui-même? Qui voyait, dans l'histoire? Mes certitudes s'envolèrent toutes d'un coup. Qui voulait mon bien finalement? Stephen ne m'avait, en somme, jamais fait de mal. Ronan si. Je ne savais même pas pourquoi il m'avait attaquée, alors pourquoi devrais-je lui faire confiance? Je pris mon téléphone portable et envoyai à Stephen:

On doit parler. Tu peux venir? 

     La réponse - positive- ne tarda pas. Et, quelques minutes, il était là, en Loup, devant moi. Et je me devais d'admettre qu'il était dix fois plus beau sous sa forme de Loup que ne l'était Ronan. 

- Alors, quoi de beau? Mon baiser t'a plu?

- Ronan a rompu.

- Il a rompu juste pour ça? Ce mec est pas pour toi... Je suis désolé pour toi, même si au fond c'est ce que je veux... Mais bon. Tu te sens comment?

- Peu importe. Tu es toujours libre pour le Bal de Glace?

- Oui. 

      Je souris, et il me rendit mon expression. Ce qui était simplement de la veangeance pure devint de la joie. J'étais réellement contente d'aller à cette fête avec Stephen. 

- Voudrais-tu être ma cavalière pour le Bal de Glace, Corinne Brown?

- Avec plaisir, répondis-je avec un petit rire.

      Stephen s'approcha de moi et, pour la deuxième fois, il m'embrassa. Ce qui était doux devint passionné. Ce qui était hésitant devint entrepreneur. Et ce qui était méfiance devint amour.Et ce qui était amour devint envie. Mon amour pour Ronan était du passé. Mon futur se passait ici même, avec Stephen. Et le feu de notre baiser se propageait tellement vite dans mon corps que j'eus l'impression de m'embraser de l'intérieur. Tout allait bien, jusqu'à ce qu'il achève notre unions corporelle, que j'ouvre les yeux et que je découvre Ronan, figé sur les marches du porche, un bouquet de roses jaunes, symbole du pardon, à la main. Il voulait s'excuser? Qu'il aille se faire foutre. Je restai dans les bras de Stephen, parfaitement à l'aise, alors qu'il ouvrait la bouche comme un poisson. Le regarder dans la même détresse que celle que j'avais vécue quelques minutes plus tôt me donnait une impression de vengeance infinie. Il finit par laisser tomber son bouquet et redescendit les marches tranquillement. Arrivé hors de portée de ma vue, il se métamorphosa en Loup et hurla son désespoir. Je reportai mon regard sur Stephen. Il avait une expresion de victoire intense dans les yeux et le doute s'éprit de moi.

- Tu savais qu'il était là?

- Oui. Mais je ne voulais pas briser tout de suite ce qu'il y avait entre nous.

- Hm. Je...

- Je t'aime aussi Corinne.

        Voila des mots qui semblaient bien plus doux que la plus soyeuse des étoffes. Je souris et repris notre baiser là où on l'avait laissé. C'est à dire au Paradis.

Souls of Alphas Où les histoires vivent. Découvrez maintenant