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SIRIUS
PARIS , INVALIDES

-21:17-
-24 j u i n d e u x - m i l l e s s e p t-

- T'y vas comme ça ?

Sophia qui se trouvait dans sa chambre la dévisageait de haut en bas, elle qui avait toujours eu un penchant pour la franchise. Céleste l'adulait, sa franchise, elle qui avait un penchant plus fréquent pour le mensonge. Parfois, les mots de Sophia détonnaient sur elle, elle la trouvait dure. Mais elle ne pouvait pas lui en vouloir, après tout, elle était sa plus vieille amie.

Il y avait deux règles en amitié auprès desquelles Céleste se pliait sans pouvoir y trouver une justification. La première était de toujours privilégier la valeur du temps à la vertu des intérêts, et la seconde, de toujours s'entourer, car les chances que sa réputation de solitaire s'étendent étaient hasardeuses. Elle détestait qu'on la méprenne pour ce qu'elle était vraiment, elle préférait qu'on la considère comme la personne qu'elle se persuadait d'être.

Céleste pouvait se reposer sur son groupe d'amies pour témoigner de sa stabilité. C'était la seule chose qui n'avait pas bougé depuis l'époque des rollers.

- Les filles nous attendent en bas, relança Sophia en rangeant son blackberry dans sa poche arrière.

Elle acquiesça, se releva du lit de son amie pour rejoindre le couloir en faisant glisser ses doigts le long des cadres suspendus au mur en évitant chaque écart entre eux. Céleste les serpentaient en se figurant bien qu'elles n'étaient que simulacre d'un idéal qu'aucune famille ne parvenait à ébranler, ce n'était que des photos de famille pour se persuader que la prétention équilibrait leur déséquilibre familial. Au moins, chez Céleste, il n'y avait aucune prétention. Rien qu'un immense portrait de leur famille qui empiétait sur toute la pièce de l'entrée, bien trop imposant pour avoir envie d'éterniser sa visite dans leur appartement.

- On y va ? Sophia l'attendait en serrant les dents sur le paillasson, passant sa tête à travers la porte d'entrée pour surveiller son amie. Cela faisait déjà plusieurs mois qu'elle ne la reconnaissait plus, elle n'avait jamais été aussi silencieuse que désormais, même si Céleste avait toujours été imprévisible. Elle répondit seulement par un hochement de tête avant de s'entasser dans l'ascenseur, pour descendre plus tard dans la rue qui donnait deux cents mètres plus loin sur l'hôtel des Invalides.

Elle vous mentirait si elle affirmait que Paris était la plus belle ville du monde.

On l'appelait la ville lumière et pourtant, elle n'en allumait aucune à l'intérieur d'elle.

On l'appelait aussi la ville de l'amour mais en seize ans d'existence, Céleste n'avait accumulé que des déceptions amoureuses. Paris avait toujours fini par la décevoir.

Sophia prit par la main son amie qui marchait trop lentement à son goût pour poireauter au croisement de deux rues, attendant les trois autres manquantes au rendez-vous.

- Coucou ! Lança la grande blonde en s'excusant du temps qui avait légèrement débordé de l'horloge, causant leur retard. C'était Jeanne, sa meilleure amie. Elle, c'était celle qui lui avait tendu la main pour qu'elle évite de trébucher une seconde fois sur les patins.

Jeanne était la seule qui n'était pas apprêtée pour l'occasion. Béatrice lança un regard envieux vers sa tenue, même dans des vêtements amples, elle savait se mettre en valeur naturellement pour qu'on la regarde. C'était toujours Jeanne ou Sophia qu'on regardait, jamais elle.

- Depuis t'à l'heure Béa' elle fait que d'nous parler de sa proie de ce soir ! Riait Salomé tandis que la concernée rougissait en gardant bonne figure. Elle avait peur du regard de Céleste, lui qui était souvent vide, mais elle avait toujours l'impression que lorsqu'elle se permettait d'évoquer le prénom d'un garçon, Céleste la
regardait en pensant intérieurement qu'elle ne méritait aucune attention de la part de chacun d'eux.

Alors Béatrice baissa la tête, sourit en voyant les filles débattre à son sujet, mais régler ses affaires en dehors d'elle.

- J'suis sure que c'est Charles !

- Elle veut pas nous dire son prénom, laisse tomber.

- Je mise sur Liam perso, Céleste fixa Béatrice, du même regard qu'elle craignait.

- Ah berk, pas lui ! Désolée j'sais que c'est ton ex mais t'as mauvais goût, elle se sentait obligée de lui répondre alors qu'elle pensait évidemment tout le contraire. Céleste avait misé juste, Céleste avait toujours tout, et Béatrice détestait lorsqu'elle avait l'audace de s'en plaindre.

Il n'y avait que Jeanne, au fond, qui désirait son bien. C'était son soleil. Jeanne était tellement solaire, et ça reflétait bien l'état de sa crinière.

Céleste était une lune. Et la pleine lune ne se développait que lorsque qu'elle était entièrement éclairée par le soleil.

Pourtant, le soleil aussi avait parfois du mal à briller.

La lune, elle, avait décidé d'arrêter de faire semblant de briller.

Pas comme Jeanne.

nova (nekfeu)Where stories live. Discover now