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SIRIUS
PARIS, ASSAS

-20:18-
-22 a o û t d e u x - m i l l e s s e p t-

- Tu sais que je t'aime, pas vrai ?

- Je sais, elle lui répondit en lui serrant sa main le plus fort possible.

Jeanne avait toujours tâché de faire en sorte que Céleste ne craigne ni les autres, ni son propre sort. Que tout paraisse plus vivant que son étui de rouge à lèvres lorsqu'elle était à ses côtés, quitte à s'anéantir pour elle. Les sacrifices n'étaient alors que peu de choses en comparaison à l'amour qu'elle s'adonnait à lui perfectionner.

Par amour. Elle aurait tout fait par amour.

- T'es prête ? Jeanne tournait la tête vers Céleste en attendant son signe pour qu'elle toque à la porte.

Rien que ses yeux méritaient d'être explorés milles fois. Elle se répétait souvent que si elle finissait par y plonger trop longtemps, elle deviendrait Hugo le temps d'une expédition. Aujourd'hui, quand elle regardait le fond de ses pupilles, elle se réincarnait en Ken. Elle se voyait lui replacer la mèche blonde qui caressait son visage derrière les oreilles, ou sentir la bouche de Céleste contre le creux de sa joue.

Puis lorsqu'elle ouvrait les yeux, elle se rendait compte qu'elle n'était qu'un embryon né dans le mauvais corps. Que tous ses fantasmes, tous les garçons qu'elle aurait rêvé d'être rien que pour avoir l'opportunité de plaire à Céleste ne vivaient que dans sa tête, pas dans les peintures rouges de celle pour qui elle vivait, par amour.

- Oh Jeanne ! S'extasiait Elena, une fille résolut à une connaissance, en écarquillant les yeux lorsqu'elle aperçut les deux blondes au pas de sa porte. C'était comme un honneur de les avoir à sa soirée, et c'était également une chose que Céleste avait du mal à comprendre mais que Jeanne avait apprit à concevoir au fil du temps.

Elle craignait le jour où les autres apprendraient son secret, qu'elle n'aimait pas les hommes et qu'elle rêvait d'en être un. Est-ce que les gens lui ouvriraient la porte de la même manière ?

Jeanne y connaissait la réponse, alors elle préférait croire qu'il y avait des malheurs qui valaient la peine d'être méconnus des autres.

- Euh.. Y'a de l'alcool là-bas, elle pointa la table basse du salon, et les garçons sont en train de se rouler un joint si vous voulez. Et faites comme chez vous surtout.

Les deux acquiescèrent en la remerciant, et Jeanne observait Céleste en s'attendant à ce qu'elle regarde tout autour d'elle à la recherche de Ken parmi la foule. Mais une fois que l'hôte eut le dos tourné, cette dernière s'empressa en lâchant la main de Jeanne derrière elle d'aller chercher le flash de label 5 coincé dans son soutien-gorge, et se mit à boire au goulot d'une traite tout le liquide contenu comme si elle n'avait plus qu'une seule vie.

- Mais t'es folle ! Jeanne lui arracha des mains le flash pour le garder au fond de son sac, et Céleste qui n'avait pas mâché un mot depuis le début de la soirée finit par hausser les épaules en se dirigeant vers la table basse pour attraper une bouteille de vodka.

Céleste revoyait passer devant ses yeux la vidéo en boucle, et plus elle passait, plus elle voulait raccourcir le temps pour en passer moins à s'infliger son pire cauchemar. Bien sûr qu'elle aimait son père, même si elle avait toujours essayé de se persuader du contraire. Et elle se sentait bête en comprenant enfin pourquoi il avait disparu de sa vie lorsqu'elle en avait eu le plus besoin, parce qu'il aimait les enfants, il les aimait comme sur le DVD, il les aimait neufs et naïfs, pas comme elle.

nova (nekfeu)Where stories live. Discover now