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SIRIUS
PITIGLIANO, MAISON DE MAMIE

-16:03-
-09 a o û t d e u x - m i l l e s s e p t-

Même si les jours défilaient, le coeur de Ulysse se serrait de plus en plus que le calendrier rallongeait les jours. Il avait l'impression que son séjour ici était interminable, et ses yeux ne voulaient se décoller de son téléphone portable.

« C'était une erreur. Pardonne-moi, je ne voulais pas faire de mal à ton coeur. »

En temps normal, il se serait adressé à sa soeur. Il aurait pleuré dans ses bras, car c'était la seule avec qui il ne mettait aucun filtre. Le personnage qu'il s'efforçait de jouer à longueur de journée était pénible, si bien qu'il finissait toujours par craquer comme Céleste à l'intérieur. La peine dans cette famille était héréditaire.

Mais sa soeur se trouvait encore une fois partout, sauf près de lui. Elle devait certainement être encore avec Milo ou Lucia, si bien que passer du temps avec Ulysse semblait pour lui une corvée à donner à Céleste.

Sur un coup de tête et un trop plein de pensées, il ouvrit la porte de sa chambre brutalement pour rejoindre le salon où devait très certainement se trouver sa mère.

Il ne pouvait pas rester plus longtemps ici. Plus rien ne le rendait heureux, même le chant des oiseaux dans le jardin paisible de la maison qui était devenu un sifflement assourdissant.

- Maman, j'peux t'parler s'te plait ?

Elle releva sa tête piquée dans son bouquin en réajustant sa paire de lunettes qui ne lui servait qu'à peu de chose si ce n'était pour se donner un air.

- Oui ?

- Ça serait possible que j'parte un peu plus tôt cette année ? J'ai des choses à faire sur Paris, et..

- Une fille ?

Elle souriait, un vrai sourire, un sourire d'espoir. Son plus grand regret était de n'avoir jamais été proche de ses enfants. Elle avait mit un fossé, des règles entre leurs relations. Le temps était passé si vite, parfois elle espérait qu'un jour ils viennent se réfugier dans ses bras pour lui demander de l'aide, de ses précieux conseils. Mais malheureusement, le fossé, les règles avaient fait en sorte qu'ils n'eut jamais l'occasion de connaitre cette facette de leur mère. Et en voyant son fils qui en temps normal se tenait fier comme artaban, et devant elle tout frêle, elle fut consternée.

- Qu'est-ce qu'il se passe Ulysse ? T'as pas l'air en forme depuis le début de l'été.

Erica aurait aimé lui dire qu'elle l'aimait tellement fort. Qu'elle était fière de ce qu'il était devenu. Mais c'était trop dur, elle était tout aussi fière que lui.

- Rien, rien. T'inquiètes maman.

- C'est une fille ? Elle répéta sa question.

Ulysse se retenait de pleurer. Il ne voulait pas pleurer, encore moins devant sa mère. Mais tout ce qu'il avait taché d'occulter pour ne pas faire de la peine aux autres découlait petit à petit de son coeur serré, jusqu'à ce que ses yeux se voient larmoyer.

- J'sais pas c'qui m'arrive maman.., il pleurait dans ses bras, elle l'avait désiré pourtant mais sur le moment, elle ne savait comment agir.

Elle ne connaissait pas son propre fils.

- J'ai toujours cru que j'étais capable de subir le coeur brisé, mais la vérité c'est que c'est la seule partie de mon corps que je peux pas anéantir. Sans lui, j'suis rien maman.

Elle continuait à caresser son dos en laissant les gouttes s'étendre dans le creu de son cou. Elle se sentait comme sa fille, incapable de dévoiler ses propres sentiments à ceux qu'elle aimait.

- Je la connais depuis que j'suis gosse, depuis la première fois où je l'ai vu alors que j'avais même pas quatre piges je savais déjà que ça serait elle. Et rester ici ça me ronge maman, je sais qu'elle est pas loin, que j'ai aucune excuse.. J'ai pas le courage de rester encore quelques jours alors je t'en supplie, il relevait sa tête vers elle en rapprochant son front du sien, laisse-moi rentrer à la maison.

Ils se retournèrent en entendant une voix de la pièce limitrophe, discordante au climat de celle-ci: elle semblait heureuse.

- J'suis rentrée ! Maman, on va faire notre gâteau ? Une fois que la tête de Céleste dépassa du cadre de la porte, son sourire se souilla.

Sans aucune interrogation, elle alla se réfugier sur le canapé en entourant ses bras autour des épaules de sa mère qui contenaient celles d'Ulysse, les yeux perlants.

Ils s'étaient toujours crus différents dans leurs altérités. Mais ils étaient tous les trois pareils.

Sous différents reflets.

nova (nekfeu)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant