58. Fauves

11 4 1
                                    

Lui et Elle. Ils sont seuls dans cette maison vide et ça faisait bien longtemps. Dehors, les cordes tombent et c'est un peu l'excuse pour ne pas partir. Les deux corps sont avachis dans un canapé trop grand pour réunir leurs peaux. 

Il ne se disent pourtant rien. Ils ne se regardent même pas et se touchent par la pensée. Personne ne saurait l'expliquer mais même sans contact ils se comprenaient. Il y avait bien des années qu'ils ne s'étaient pas retrouvés et alors ils n'existaient plus.

Le passé est oublié, les prénoms sont écorchés et la bienséance est ruinée. Tous deux savaient et ne disaient rien. En vérité, ils ne pouvaient plus parler. La parole appartient à l'humain et ce soir ce ne sont que des animaux. 

La jeune femme ne reste pas impassible au silence tranchant du désir. Des images lui traversent l'esprit, la raison la quitte et laisse place au rêve. Tandis que sa poitrine se soulève irrégulièrement à la pensée de la sauvagerie, elle sent son corps s'attirer à l'objet de ses tentations.

Les joues de la femme s'enflamment et sa peau s'attise sans douceur. Loin de là l'idée d'une envie, tout devenait un besoin, une nécessité. Les deux êtres ne se regardaient toujours pas et la tension en était plus grande car les yeux se laissaient deviner.

La femme pousse un long soupire et lèche fiévreusement sa lèvre inférieure. L'homme sourit. Sans secret ils se désiraient tant bien que le seul inconnu restait celui qui allait résister. La tentation virulente l'emporta. L'homme électrifié bondit sur la femme et lui arracha la bouche.

Ils n'étaient plus des enfants qui hésitaient sur le corps de l'autre. Non. L'homme cueilli un gémissement inespéré de la jeune femme lorsqu'il sauta sur ses lèvres.  L'homme voulait être le maître du désir, à l'affût de tout et au contrôle de chaque plaisir. 

Ils se regardèrent enfin. La pupille noire, l'homme admirait la beauté de sa partenaire, sans mots. C'est comme si rien n'avait changé alors que tout semblait différent. Les respirations saccadées de ces vieux inconnus faisaient le chant de leur supplice. 

Puis leurs langues dansèrent, longuement, dans le sens du temps, celui qui se s'écoule pas. Les mains de l'homme passèrent sous le vêtement de son amante, laissant sur son passage un frisson. Puis tout s'enchaîna. 

Leurs peaux criaient de se confronter. Il fallait faire ça vite, l'envie pressait. Alors, la femme se releva et fit place à l'envergure de sa nudité. Ses courbes blanches se dessinaient par le regard de l'homme dont l'excitation n'était plus à prouver. La femme debout, dans toute sa grandeur, dominait l'homme, assit, subjugué.

Les doigts de la femme prenaient plaisir à parcourir l'échine de ses seins dressés. L'homme ne pouvait pas la toucher, il lui était interdit. Et alors que les cuisses de la jeune femme suppliaient leur ouverture, la commandante n'en fit rien. 

L'homme au rictus malin n'avait pour seul pouvoir que de se sentir à l'étroit dans son habit. C'était de la torture. Alors, il se leva à son tour et prit violemment la femme par la gorge. Il s'approcha délicatement de son oreille avant de lui murmurer :

- "Tu es à moi."

La femme laissa échapper un rire et confronta l'homme du regard. L'un contre l'autre, tout était possible et la passion n'a jamais été aussi grande. L'homme animal empoigna fermement les fesses nues de la jeune femme et la porta plus près encore contre son corps.

Leurs sexes se frottaient et leurs peaux brûlantes suppliaient d'avantage. La femme au summum de son désir empoignait les cheveux de l'homme entre ses doigts tandis qu'il lui baisait le cou. Dans toute sa force, l'homme plaqua l'amante contre un mur et il n'y avait dans cette pièce que le témoin de leur bestialité.

Le corps de la femme appelait le sien et la courbe de son dos s'inclinait de façon à ne plus jamais quitter la chaleur de l'autre. L'homme enleva le reste de ses vêtements et le choc des peaux nues était sans pareil.

Ils s'abandonnèrent l'un à l'autre et leurs cris sauvages griffaient la nuit noire. Leurs chaires se pénétraient encore et encore sans fin, sans scrupule, sans aucune pitié. Ils s'embrassaient, se violentaient, se léchaient, se désiraient sans jamais s'arrêter.

Et dans l'empreinte du fracas de la pluie, les deux amants s'aimaient de nouveau. Un peu comme un toujours qui disparait lorsqu'il faut partir.

29/10/2022 - Two feet - Pink

Céleste  [TERMINÉE]Where stories live. Discover now