Chapitre 7

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Il se sent très sûr de lui en quittant la tente. La gamine n'allait pas lui échapper, il avait clairement vu la peur briller dans ses pupilles – petite idiote. Il allait jouer avec elle un moment, s'amuser avec son innocence ridicule, jusqu'à ce qu'il en ait assez et l'offre à Vam sur un plateau doré. Il grogne et se frotte les mains sur le pantalon usé. Si seulement elle n'ouvrait pas tant la bouche – elle n'était là que depuis peu de temps et l'avait déjà insulté. Pour qui se prend-t-elle ? Les dents serrées, Faolàn prend la résolution de lui faire comprendre où était sa place. Dans ce camp, sa vie dépendait de lui, sa survie, même. Si elle continuait comme ça, elle en subirait bientôt les conséquences.

Le jeune homme continue à marcher, en direction de la tente de Vam, le chef des Winterschlächter, un énorme abri en peau de bête, richement ornementé. La gamine était pourtant plutôt jolie. Plus jolie que la veille : la lune avait rendu ses traits insignifiants et pâles, tandis qu'à la lumière du jour, elle n'était plus aussi terne. Elle avait les traits fins, les joues roses, de grands yeux expressifs encadrés par de longs cils noirs et des boucles brunes en cascade le long du dos. Faolàn se mord la joue et lève les yeux au ciel. Quelles pensées idiotes. La gamine n'est qu'un passe-temps, un petit jouet avec lequel il s'amuserait le temps d'un hiver. Le jeune homme grogne lorsqu'un flocon lui tombe sur le nez et l'écarte d'un revers de main enragé. Concentre-toi sur l'essentiel. La troupe avait encore beaucoup d'assauts de prévu et un sentiment d'excitation se fait sentir.

Faolàn arrive devant la tente de Vam et ouvre le lourd morceau de cuire qui marque l'entrée avant de pénétrer à pas lourds à l'intérieur. Le chef est allongé sur ses fourrures, le visage froid et arrogant, observant du coin de l'œil une femme qui s'affaire sur son corps nu.

« Vam. », dit Faolàn d'une voix glaciale, le visage dénué de toute émotion « Tu voulais me parler. »

L'homme soulève un sourcil puis ricane, un rire gras et cruel. Il fait un geste de la main dédaigneux à la prostituée qui, après émettre un son proche d'un miaulement, s'écarte de lui et s'assoit à côté des fourrures, le dos droit, les genoux repliés sous son corps. Vam cesse de rire.

« En effet, petit loup. J'ai entendu des rumeurs à ton sujet. »

« Des rumeurs ? Qu'a-t-on raconté sur moi ? Que j'ai gardé une partie du butin ? Ne t'inquiète pas, je n'ai que -»

« On m'a dit que tu as ramené une gamine et qu'elle couche confortablement entre tes fourrures. », dit Vam en lui coupant la parole, la voix dure, « Tu sais très bien que nous n'avons pas le temps pour ce genre de conneries. Nous n'avons pas le temps de nous enticher de petites paysannes trouillardes qui ne vont que nous faire des problèmes ! »

Faolàn fronce les sourcils un instant puis crois les bras devant sa poitrine, son éternel sourire carnassier au visage.

« Oh, je sais bien, Vam. Mais tu devrais me connaître, après tous ces hivers que nous avons passés ensemble. Il y a en effet une femme dans mon lit : mais je n'ai pas l'intention de la laisser nous causer des soucis. »

Le chef lève un sourcil arrogant, se grattant la barbe, ses yeux divaguant quelques instants sur la prostituée, silencieuse et toujours sagement assise. Il se racle la gorge.

« Et comment comptes-tu faire ça ? Tu veux l'accrocher à une laisse pour qu'elle t'attende la journée et que tu puisses t'amuser le soir ? »

Faolàn laisse tomber sa tête en arrière et éclate de rire. Un rire cruel qui illumine ses yeux bleus d'une lumière presque diabolique. Il regarde ensuite Vam dans les yeux, un grand sourire aux lèvres.

« Presque. », dit-il et lentement, le chef sourit à son tour, d'un air malsain.

« Tu me plais, petit loup, qu'as-tu prévu exactement ? »

Faolàn fait mine d'enlever une saleté sur son ongle et se passe une main leste dans les cheveux blonds. Il fait ensuite un pas en avant et se penche vers son chef, comme pour lui révéler un secret.

« Je vais faire d'elle ma femme. », annonce-t-il. Vam l'observe un moment, incrédule, avant d'éclater d'un rire tonitruant.

« Toi ? », s'exclame-t-il, « Tu veux prendre une femme ? Une qui de plus n'est qu'une petite villageoise ? »

Faolàn prend une mine offusquée puis rit à son tour.

« Ne te méprends pas, Vam. Je ne vais pas la garder longtemps. Elle me servira pour l'hiver, dès que la neige aura fondu, elle pourra finir sa vie autre part. » Il fait un clin d'œil et le chef se redresse un peu, tapotant l'épaule de l'homme plus jeune.

« C'est comme ça que je te connais mon garçon, j'avais déjà peur que tu viennes me parler d'amour ou d'une autre ânerie en ce genre. La semaine dernière seulement, j'ai dû écouter des discours à l'eau de rose qui m'ont donné envie de leur cracher mon repas à la figure.»

Faolàn pousse un juron et se retient de faire une mine dégoûtée à l'image qu'évoque les mots de l'homme devant lui.

« Ne t'inquiète pas, ça ne va pas m'arriver de sitôt. », répond-t-il simplement, d'une voix neutre. L'amour, en effet, est très peu pour lui. Sentiment pour les faiblards.

Vam sourit de toutes ses dents et se gratte à nouveau la barbe.

« J'aime entendre ça ! », s'exclame-t-il ensuite. Il se tait un moment et semble réfléchir. Un air ennuyé vient ensuite assombrir son visage et il regarde à nouveau la prostituée avant de claquer les doigts d'un air autoritaire, signe pour Faolàn de partir.

Sans attendre un moment de plus, le jeune homme ressort de la tente. Le froid l'accueille à l'extérieur et il ferme un moment les yeux, appréciant la neige mordante sur sa peau glacée, gelant au passage un peu plus, son cœur déjà froid. 

 

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Vénus a froidWhere stories live. Discover now