Chapitre 35

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Freyja et Faolàn s'installent devant la maison tandis que la vieille femme décide de faire la cuisine. Faolàn ne la regarde pas en face, l'observe seulement du coin de l'oeil. Il a les dents serrées.

Freyja a fait l'amour à Erohel.
Il l'a touchée.

La pensée des doigts de cet homme sur elle lui retourne l'estomac. La jalousie le rogne. Faolàn serre les dents, il n'a aucun droit d'être jaloux.
"Je suis désolée de... T'avoir accusé aussi méchamment.", murmure la jeune femme et cette fois il se tourne vers elle.
"Non. C'est moi qui suis désolé de la manière dont j'ai agi. Tu aurais du m'assomer un bon coup."
Un sourire éclaire le visage de Freyja et le coeur de Faolàn accélère et raisonne dans sa cage.

C'est la première fois qu'il arrive à la faire sourire.

Elle a une fossette sur la joue gauche, ses boucles brunes glissent sur son épaule et ses yeux pétillent. Comment avait-il pu la trouver banale? Il sourit à son tour, un vrai sourire, pas un de ses mouvements de lèvres carnassiers. Freyja soulève un sourcil et approche son visage du sien.

"Je ne savais pas que tu pouvais avoir l'air sympathique."
Le sourire de Faolàn s'élargit.
"À ta place, je ne m'y fierai pas."
Elle rit.
"Pourquoi pas? Le méchant guerrier risque de me manger?"
Le guerrier en question la fixe avant de parler.
"Peut-être bien.", dit-il, la voix lourde de sous-entendus et Freyja se fige quelques instants. Son souffle lui caresse le visage, ses yeux se perdent dans les siens.

Faolàn prend brusquement conscience du peu de distance qui les sépare. Il déglutit. Freyja ne bouge pas d'un millimètre, malgré que son corps semble-t-être sous tension.

Il veut embrasser ces lèvres qu'il désire et qu'un autre à souiller peu de temps auparavant.
Il veut toucher ce corps.
Ces cheveux.

Faolàn sert les dents.
Il ne peut pas. Parce qu'elle ne le voudrait jamais. Tout ce que lui désire la révulse. Pour Freyja, il restera à jamais une brute sanguinaire et détestable, qu'il rit avec elle ou qu'elle le soigne, son passé le rendant encore plus misérable. Il sert les poings, cette fois. Les yeux de la jeune femme le fixe toujours, elle cligne des yeux et ses cils caressent ses joues pour quelques secondes.
"Quelque chose ne va pas ?"

Il se passe la langue sur les lèvres et se lève d'un seul coup, avant de faire quelque chose qu'il regretterait.
"Je vais voir si je peux être utile quelque part.", murmure-t-il avant de se retourner et rentrer à l'intérieur.

~***~

"Faolàn?", demande la vieille femme lorsque le jeune homme entre, tendu.
"Vous avez besoin d'aide?", grommelle-t-il, tête baissée. Elle fronce les sourcils.
"Tu souhaites m'aider pour la cuisine?"
Il relève la tête, un air un peu affolé sur le visage.
"Oui... Non... "
La vieille femme soupire et pose sa cuillère en bras avant de s'approcher de lui à pas lents. Elle lui pose une main sur le bras.

"C'est à cause de Freyja, mon petit?"
Il entrouvre la bouche mais finit par hocher la tête. De toute façon, elle savait.
"Pourquoi ne lui dis-tu pas?"
Il ferme les yeux, exaspéré.
"Parce que je ne peux pas. Parce qu'elle ne veut pas. Parce que j'ai déjà été assez rejeté. Les hommes comme moi n'aiment pas. Ils ne se prennent pas une femme. Les hommes comme moi paient des femmes de petite morale pour se satisfaire et n'en demande pas plus." La vieille femme lui pose une main sur l'épaule et secoue sa tête.
"Pourquoi es-tu aussi dur avec toi? Même si tu n'es pas un exemple à suivre, même si la vie t'as amené à subir et à faire subir, tu as le droit d'aimer et d'être aimer en retour. L'amour est un moyen de rédemption, mon petit, c'est ainsi que tu parviendrais à te pardonner tout tes crimes et défauts."
Faolàn rouvre les yeux et sourit tristement.
"Mais elle ne m'aime pas."
"Tu verras bien, mon petit. Ai confiance en la vie et tout se passera bien.", murmure la vieille femme avant de se retourner.

Les bras ballants, Faolàn la regarde avancer.
"Je n'ai pas besoin de ton aide ici.", lui dit-elle"Je veux que tu sortes d'ici, que tu t'assois à côté de Freyja et que tu lui parle. Fais la rire. Et arrête de baisser les bras aussi vite"

Faolàn hoche la tête.
Peut-être qu'elle avait raison : il ne pouvait pas abandonner avant d'avoir réellement essayer. De plus, que lui restait-il à perdre?

Des miettes de coeur et d'humanité, enfouies au plus profond de lui.

Vénus a froidOù les histoires vivent. Découvrez maintenant